Les médias sont unanimes : Benoît Hamon serait à la peine dans les sondages. Inaudible, sa campagne serait vouée à l'échec et expliquerait les désistements de son camp au profit d'Emmanuel Macron. A tel point que des éditorialistes de chaînes d'information, ces nouveaux apôtres des temps modernes, n'hésitent pas, depuis la campagne des primaires, à qualifier son programme d'utopiste. Versus, vous l'aurez compris, le réalisme d'un Valls ou d'un Macron. Bon débatteur, clair lorsqu'il s'agit de défendre ses opinions, Benoît Hamon tranche avec un Emmanuel Macron, objet de communication non identifié, qui assène ses discours de manière mécanique. Pourtant, le candidat reste peu intelligible : sa campagne peine à franchir le mur du son en matière de communication. Pourquoi ?
Parce que les médias relaient son relatif amateurisme
Au lendemain de sa victoire surprise à la primaire de la gauche, les médias avaient relayé à grand bruit l'amateurisme de l'organisation de la soirée sur cette fameuse petite péniche envahie de perches et de micros. Mise en cause ? L'organisation qui n'aurait pas anticipé le ras-de-marée médiatique et la foire d'empoigne qui s'en est suivie. Depuis, au fil des émissions de télévision -souvenez-vous du débat tendu avec François Lenglet- et des articles de presse transparaît, de manière sibylline, les éléments à charge pointant cette impréparation. Il n'est qu'à lire cet extrait paru sur Radio France pour s'en faire clairement une idée : "Un programme présenté jeudi, un grand meeting à Paris Bercy dimanche, un débat télé, le premier, lundi prochain : la semaine s'annonce cruciale pour Benoît Hamon, qui revient d’un déplacement de trois jours aux Antilles. Déplacement parfois incognito et sans ferveur particulière...Toujours encalaminé à la quatrième place dans les sondages, loin derrière Emmanuel Macron, le candidat socialiste doit impérativement inverser la tendance. C'est une question, maintenant, de jours."
Parce qu'il n'évoque pas assez la France et ses sujets régaliens
Là où une Marine Le Pen évoque une certaine vision de la France, sa place dans le monde, avec la conception étriquée qu'on lui connaît, là où un Emmanuel Macron médiatise à outrance ses déplacements à l'étranger, Benoît Hamon fait figure de localier de l'étape. Certes, il s'est déplacé au Portugal récemment, mais sa campagne n'imprime pas. Ses discours ne prennent pas l'envol escompté. Il ne passe pas le plafond de verre médiatique au point de rester méconnu du grand public. Les mauvaises audiences de son passage à L'émission politique de France 2 programmée face à un match de football -2,2 millions de spectateurs- ne vont pas arranger ses affaires. Hors revenus universel et futur désirable, quid de la culture et de l'éducation, de l'Histoire avec un grand H de notre hexagone ?
Parce que les rumeurs de ralliement à Emmanuel Macron alimentent le doute
Les équipes d'Emmanuel Macron veillent savamment aux annonces : un jour un ralliement de droite, l'autre un éléphant de gauche. Surtout alterner, c'est la consigne, pour ne pas donner l'impression d'être ni de droite, ni de gauche. Sioux. Encore plus habile aujourd'hui les informations distillées par le camp de Manuel Valls. "Je ne peux pas apporter mon parrainage à Benoît Hamon", a-t-il déclaré à Paris Match, dans un entretien à paraître mercredi 15 mars alors même que bruissent les rumeurs de son soutien à Emmanuel Macron, pourtant l'adversaire honnis, l'ennemi juré de l'ex premier ministre. Ce dernier prendra la parole ce mardi soir à l'Assemblée Nationale auprès de ses soutiens pour clarifier sa posture. Mais en coulisses, le jugement est sévère et sans ambages. Il rejoint d'ailleurs, les jugements émis dans les couloirs de l'Elysée : Benoît Hamon ne fait pas le poids. Sa campagne ne décolle pas et dans ce contexte, le seul adversaire crédible serait Emmanuel Macron. Pourquoi chercher des adversaires lorsqu'on a de tels soutiens me direz-vous ?
Parce que la campagne se jouera les quinze derniers jours
Les affaires Fillon ainsi que les très (trop) longues négociations avec les écologistes du camp de Yannick Jadot ont passé sous silence la campagne du candidat. Impossible dans ce contexte hystérisé de faire passer ses idées regrette-t-il. A quand les débats de fond ? Alors pour exister médiatiquement, Benoît Hamon, dont le réservoir de voix se niche du côté des abstentionnistes et des sympathisants de Jean-Luc Mélenchon, tente de cliver de plus en plus avec Emmanuel Macron. Objectif ? Enfin faire parler de lui et mobiliser son coeur de cible : la gauche de la gauche. Celle qui s'étonne encore de l'existence d'un vrai socialiste. Avec une maladresse lorsqu'il tente d'expliquer que voter pour le candidat d'En Marche c'est favoriser Marine Le Pen : "aujourd'hui, je considère que le projet d'Emmanuel Macron, c'est le marchepied du Front national". Inaudible là encore et stérile de pointer le bien et le mal en politique. Pour être entendu, bornons-nous à répondre point par point à Marine Le Pen pour la confronter à ses contradictions, notamment en matière économique. Dans les rangs de l'impétrant qui souhaite faire battre le coeur de la France avec un vote d'adhésion et non de rejet, les équipes sont convaincues que tout se jouera les derniers jours : la cristallisation n'a pas encore eu lieu. Des annonces seraient à venir pour la dernière séquence d'une campagne écrites par les scénaristes de son équipe. Ralliement, annonces...ensemble tout est possible comme l'affirmait Nicolas Sarkozy en son temps.
La volatilité extrême des votes rend toute prédiction périlleuse. Dans cet océan d'incertitude qu'est cette campagne, une seule chose est sûre : les médias ne font plus l'élection. Kant écrivait : “On mesure l’intelligence d’un individu à la quantité d’incertitudes qu’il est capable de supporter.” Une seule certitude qui va vous remplir de joie pour la journée : nous sommes tous très intelligents.
Anne-Claire Ruel
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