Entendez-vous au loin le bruit assourdissant du retour de Nicolas Sarkozy ? Celui qui prônait la stratégie de la rareté de la parole publique il y a plus d'un an, a visiblement changé d’avis. Enfin, disons plutôt qu’il n’a tout simplement JAMAIS quitté l’espace médiatique. Volonté de s’imposer dans l’agenda pour se rappeler au bon souvenir de ses sympathisants -grands adeptes du culte du chef, prises de parole tout azimuts dans les médias et fréquents envois de newsletters. Les commentateurs de tous bords n'en reviennent pas. Celui qu'on disait mort et enterré remonte dans les sondages. Francetv Info le rappelle via le décryptage attentif du sondage TNS Sofres-Onepoint pour Le Figaro Magazine publié mercredi 29 juin: "Chez les sympathisants de droite, frange de l'électorat la plus susceptible de se déplacer pour la primaire de la droite en novembre, il gagne 9 points, à 44%, quand Alain Juppé en perd 6 à 41%. L'écart est encore plus important auprès des seuls proches des Républicains (LR), avec un bond de 17 points de l'ancien chef de l'Etat qui recueille 65% de réponses positives, alors que le maire de Bordeaux chute de 14 points à 52%." Alors pourquoi ?
Parce l'actualité lui permet de capitaliser sur son territoire de communication
Les grèves à répétitions ? Du pain béni pour Nicolas Sarkozy. Cela lui permet de taper sur "l'ennemi" originel de son propre camps, la CGT de Philippe Martinez, pour mobiliser ses soutiens tout en s'affichant comme le champion du respect de l'ordre. En d'autres termes d'actualité lui permet de rester sur son territoire de communication et donc d'être perçu comme totalement cohérent, centré sur ses positions soutenues de longue date.
Parce qu'Alain Juppé a décidé de jouer la stratégie de la rareté
La rareté de la parole publique génère le désir. Et cela les équipes de campagne d'Alain Juppé, dans la lignée de Jacques Pilhan, l'ont bien compris. A ceci près que cela laisse un boulevard à Nicolas Sarkozy, l'adepte de la stratégie de la fréquence, pour s'emparer de l'agenda médiatique avant l'été. Mais, j'en fais le pari : la prochaine prise de parole d'Alain Juppé sera extrêmement relayée. En ce sens, le maire de Bordeaux en revient aux vieux principes de la com' à la papa qui veut la rareté permet des ruptures de rythme, tout en créant l'événement. A l'aune de notre agora numérique, il est possible de remettre en cause cette posture. Cependant, elle a le considérable avantage d'être en accord avec sa stratégie de "positionnement" : aux présidences quelques peu hystérisées de François Hollande et Nicolas Sarkozy dont les Français se sont lassés, il oppose l'image d'un homme hors du temps et au-dessus de la mêlée. Une sorte de patriarche qui donnerait le cap et imprimerait sa vision du monde.
Parce qu'il prépare d'ores et déjà la rentrée médiatique
J'en veux pour preuve la stratégie de communication déployée dans le magazine ELLE, via Carla Bruni : «Je suis une bâtarde et j'aime bien les bâtards d'ailleurs. Mon mari aussi est un genre de sang-mêlé, il ne ressemble en rien à ces élites comme on dit, il ne fait pas partie de l'establishment et j'adore ça !» Ou comment réactiver le storytelling du candidat de 2007, qui se voulait loin des élites et rompant avec l'ancien temps. Nicolas Sarkozy se présentait alors comme "un petit Français de sang-mêlé", devant donc se battre pour conquérir le pouvoir. Aujourd'hui, la manoeuvre est limpide : contrer Alain Juppé, l'énarque, héritier de Jacques Chirac, le bourgeois tenant de l'immobilisme. D'ailleurs, François Hollande a tout intérêt à le laisser faire : Alain Juppé est un candidat qui jouit d'un certain capital de sympathie auprès de la gauche dite "progressiste". La boucle est bouclée et la rentrée promet d'être musclée.
Anne-Claire Ruel
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