Il y a quelques jours de cela la Lettre de l'Expansion révélait que François Hollande allait faire évoluer sa stratégie de prise de parole médiatique en multipliant les intervention dans des médias spécialisés (presse féminines, culturelle, sportive...) plutôt que dans les journaux d'informations générales. Du micro-ciblage en somme pour toucher des catégories définies de futurs électeurs. De là à considérer que l'homme politique est un produit comme un autre qui s'adresse directement à ses "consommateurs" dans leurs médias de prédilection, il n'y a qu'un pas. Marketing et politique sont-ils pour autant compatibles ?
Politiques et marques, même combat ?
«Avant, la communication, c’était une affaire de convictions, aujourd’hui on vend des produits.» Jacques Séguéla ? Perdu. Anne Visage alias Nathalie Baye, l’héroïne de la série Les Hommes de l’ombre, diffusée en janvier 2012 sur France 2, peu avant l'élection présidentielle. Certes, si une «marque» peut-être définie comme un signe distinctif permettant au consommateur de différencier le produit ou le service d’une entreprise de ceux de ses concurrents, un parallèle peut être dressé entre politiques et marques. Il n'est qu'à remonter aux années 60 et 70 pour prendre conscience de l'importance des publicitaires dans la définition des stratégies de communication politique. Mais c'est aller un peu vite en besogne. A quoi correspondraient alors les votes contestataires, des votes blancs, des votes de désespoir ?
Le micro-ciblage ou la conquête du vote consumériste
Une forme de vote consumériste existe bel et bien et celui-là même que François Hollande tente de capter, lui qui est déjà entré en campagne pour l'élection présidentielle de 2017. Et ce vote se puise dans ce qu'on appelle communément le réservoir des abstentionnistes. Il est avec le vote idéologique, marqué par le clivage gauche-droite, et le vote citoyen pour le bien de la Nation, la troisième forme de choix électoral. Pour résumer de manière triviale, il s'agit d'un vote à la tête du client. Et pour trouver le consommateur, il faut partir à sa recherche et aller à sa rencontre pour le surprendre là où il s'informe. Quitte à donner une interview dans le "Chasseur français" ou à inviter les caméras de la chaîne des enfants Gulli pour cibler les familles comme il l'a déjà fait. Sur les votes citoyens et idéologiques, vous n'avez aucune marge de manoeuvre, seul le vote consumériste peut faire la différence dans une élection. Et ça les politiques l'ont compris depuis toujours.
Contrairement à une marque immuable, un homme politique évolue
A ceci près qu'un homme politique n'est pas une marque immuable : il change, il évolue. Comme un organisme vivant, il se compose et se décompose. S'il tente d'imposer un style à travers l'ensemble de ses interventions médiatiques, les changements de perception à son égard sont très difficiles à imposer. Aujourd'hui, un homme politique comme Bruno Le Maire, identifié comme assez terne, tente ainsi de "fendre l'armure" en apparaissant sous les traits d'un évangéliste venu prêcher la bonne parole au moment de sa déclaration de candidature à l'élection présidentielle. A force de cours de théâtre et de changement de style, chemise ouverte, cet énarque défroqué tente de se renouveler. Mais c'est peine perdue ! Si les politiques se vivent comme des héros de série télévisée, les spectateurs, quant à eux, ont une image et une opinion bien définie dès le début de la "saison". Il vous faudra faire montre de patience pour la faire évoluer. Et ce ne sont pas les slogans "le renouveau, c'est Bruno" ou "la primaire, c'est Le Maire" qui changeront la donne.
Primaires LR : Bruno Le Maire officiellement candidat
Seuls les repères iconiques font une marque. Hormis le mariage pour tous et peut-être sa gestion des attentats, François Hollande -tout comme Nicolas Sarkozy en son temps- peine à définir son identité. "Est-il toujours de gauche ?" se demandent ses propres électeurs. Créer de la nouveauté tout en restant cohérent, cela paraît mission impossible pour un président a renié mot pour mot son discours du Bourget. Les politiques devraient enfin prendre conscience que leur véritable adversaire, c'est le monde du marketing politique.
Anne-Claire Ruel
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