La cinquième conférence du Président de la République s'achève. Comme d'habitude, les commentateurs commenteront, les analystes analyseront, les sondeurs sonderont, les militants tweeteront et l'opinion publique... Eh bien pas sûr qu'elle ne soit véritablement marquée par cette intervention, même si les Français ont plébiscité la gestion de crise du Président et attendent de lui qu'il prenne la parole sur la question. Pourquoi ? La faute au format des conférences de presse. En l'état actuel, sont-elles utiles ou non ? Le point sur la question.
Oui, pour perpétuer le "rituel"
Je l'ai expliqué déjà plusieurs fois précédemment : toute la communication d'un Président de la République tient dans la tension ténue entre "sacré et profane". Comment faire preuve d'empathie, être proche des citoyens, tout en incarnant la fonction présidentielle à la télévision ? Comment passer de la posture d'un "conseiller emploi" à celle d'un Président fixant un cap et une vision ? Le dosage en matière de communication est subtil. Trop empathique ou proche, vous désacralisez votre fonction. Trop présidentiel, vous paraîtrez distant. Pour François Hollande, qui excelle à ce type d'exercice, la conférence du presse a pour vocation de ritualiser ses prises de parole et de réinjecter un peu de sacré, sous les lambris de la salle des fêtes. Seul face à son pupitre devant un parterre de journalistes, le gouvernement posté à sa droite, le rituel est immuable. Mais il le sait : en aucun cas cela ne marquera l'opinion. En revanche, le format des conférences lui permet d'entretenir un lien privilégié avec les journalistes et de faire la pédagogie de son action via des "temps forts", tout en annonçant de nouvelles mesures pour imprimer une vision, un cap et... tenter de préempter la prochaine séquence de communication ! Car leurs analyses coloreront le paysage médiatique les jours suivants. Le but est -encore et toujours- de garder la main sur l'agenda médiatique, d'ouvrir des séquences et de s'assurer qu'elles durent aussi longtemps que possible.
Non, pour marquer durablement l'opinion
Aucune conférence de presse d'un Président n'a jamais bouleversé les téléspectateurs au point de faire basculer l'opinion. Aucune. Lors des points presse précédents, certes, François Hollande avait fait des annonces, mais il s'était embourbé dans le détail technique de sa "boîte à outils". Trop obscur pour le grand public qui attendait un cap. Ce qui change véritablement la donne en termes de popularité, ce sont les images fortes et symboliques. Celles qui donnent à voir -sans un mot- la stature d'homme d'Etat, capable de faire preuve de sang-froid dans les pires situations. Ce qui change aussi la donne en temps "normal", et donc hors crise, c'est de nouer des liens avec l'opinion en engageant avec elle un dialogue permanent pour passer des messages clairs et précis. Non pas avec les journalistes, mais avec le grand public lui-même, à la manière d'un Obama lors de ces fréquents points presse. Exit les termes trop techniques et les formules impersonnelles. Certes, le Président s'adresse à des journalistes, mais c'est l'opinion dans son ensemble qu'il souhaite toucher in fine. En communication, il ne faut jamais perdre de vue le récepteur final, ce que François Hollande avait un peu fait précédemment. La jeune garde du président semble l'avoir compris. Avancer l'heure de cette conférence de presse à 11 heures avant le JT de 13 heures et développer une stratégie de communication on line, c'est s'assurer une visibilité maximale et donner plus de temps aux journalistes pour préparer leurs sujets. Progresser, c'est changer d'erreur : alors à quand une refonte du format ?
Anne-Claire Ruel
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