La gauche peut-elle encore inverser la tendance ? S’appuyant sur les 5 derniers scrutins établis depuis 1983, Electionscope a décrypté, analysé et envisagé une prévision des comportements électoraux lors des municipales françaises. Ses conclusions nous permettent d’affirmer que la cristallisation du vote est dès à présent probable : à un mois des municipales, le parti au gouvernement aura beaucoup de mal à "retourner" les électeurs qui ont décidé de la sanctionner, ou à re-mobiliser ceux qui aurait décidé de s’abstenir.
Explications.
Quels sont les facteurs clés du vote aux municipales ?
Lorsqu’il vote, l’électeur dresse le bilan du sortant. Aux municipales, des facteurs clés émergent : outre les résultats des scrutins passés, les facteurs économiques, la socio-démographie, la structure de l’habitat, la qualité de la gestion municipale et la popularité du président de la République sont tous ces éléments qui façonnent le choix de l’électeur.
1. Pour les facteurs économiques, le phénomène d’hystérèse est inévitable
On ne peut pas compter sur un retournement positif de situations dégradées qui n’évoluent qu’avec lenteur. Si la courbe du chômage s’était retournée fin décembre, les électeurs auraient pu en tenir compte dans leur vote aux municipales. Mais elle ne s’est pas retournée, et il est trop tard pour imaginer que cela puisse changer d’ici le 23 mars et affecter les choix des électeurs.
2. La socio-démographie est figée
Le maillage social des territoires municipaux est une donnée structurante de l’électorat. Le nombre d’agriculteurs, d’entrepreneurs et de professions libérales, ou encore le taux d’ouvriers ou de retraités par exemple sont figés pour mars, et ils sont à interpréter comme influençant directement le positionnement d’une ville à droite ou à gauche (faiblement, modérément ou fortement).
3. La structure de l’habitat est elle aussi figée
Les caractéristiques urbaines que sont le nombre de logements HLM, le poids des propriétaires, des locataires … sont autant d’éléments qui structurent le vote et font émerger des tendances. Mais ceci doit s'envisager sur la durée. C’est en début de mandat que le maire prend les mesures incitatives qui peuvent l'aider à modifier la structure urbaine dans un sens qui lui sera plus favorable. Il s’agit pour lui d’avoir une "sur-représentation" de son électorat. Car il sait que cela va jouer sur le soutien politique dont il bénéficiera lors du prochain scrutin. En février 2014, il est trop tard pour espérer d’avantageuses modifications !
4. Qualité de la gestion municipale : le bilan est dressé
La performance financière des communes pèse nécessairement dans le vote. La charge de la dette, par exemple, est une donnée de long terme que l’électeur ne risque pas d’oublier, surtout si elle est élevée !
5. La popularité du président de la République
Le point se passerait presque de commentaires. La situation est mauvaise, la dégradation de l’indicateur fut rapide, et l’état de grâce réduit à peau de chagrin. Pire encore, il semble que l’on frôle les records d’impopularité pour un président sous la V°, avec plus ou moins 20% de satisfaits. On ne peut pas éviter d’en tirer des conclusions. L’argument de la séparation du national et du local est difficile à défendre quand le mécontentement est si fort. Comment éviter qu’il ne "fasse tâche" et n'handicape les sortants de gauche, les bons comme les mauvais gestionnaires ? Une fois encore, une improbable embellie de dernière minute serait inopérante : ici aussi, c’est à trois mois que l’électeur décide.
Le vote sanction est inévitable ?
Les mauvais résultats économiques, la popularité dégradée de l’exécutif, et, pour les sortants de gauche, une socio-démographie et une structure de l’habitat orientées à droite (même dans une ville de gauche), ajoutés le cas échéant à une gestion municipale jugée calamiteuse sont autant d’éléments qui alimentent un vote sanction. Il sera inévitable pour chaque ville où ces indicateurs seront dans le rouge.
Seul un choc aléatoire de grande ampleur pourrait changer la donne, qu’il soit international, national ou local, qu’il s’agisse d’événements tragiques ou de simples stratégies électorales (pouvoir de nuisance du FN, dissidences conduisant à des quadrangulaires voire des pentagulaires)… mais il faudrait que ce choc soit puissant pour rendre inopérante l’asymétrie du blâme !