Les élections municipales françaises ne sont pas des élections locales comme les autres, elles se déroulent le même jour dans tout le pays, et le système des partis est très influent, ainsi dans les grandes villes, les têtes de liste sont désignées par les états-majors nationaux.
Les municipales sont aussi un domaine peu exploré, les premiers travaux ont été réalisés par Bruno Jérôme en 1991, puis en 2002 par Bruno et Véronique Jérôme avec le premier modèle complet d’analyse et de prévisions politico-économiques des élections municipales françaises. Ces travaux s’inscrivent dans le courant dit de l’analyse des Choix Publics, car ils sont au confluent de la science économique et de la science politique (http://www.electionscope.fr).
Dans les démocraties, lorsque le peuple souverain vote pour ses représentants, il choisit ceux là même qui vont décider de la politique économique. Les modèles ont donc vocation à traduire explicitement ces liens qui s’établissant entre sphères économique et politique.
Comment ? Plus précisément, il s’agit de postuler (à l’instar de Peffley) que, lors du vote l’électeur agit comme un juré qui ferait le procès du sortant. Il dresse le bilan de sa mandature et, s’il est satisfait il reconduit le sortant, dans le cas contraire, il sort le sortant. Nombreux sont les faits générateurs du vote aux municipales. Ils peuvent agir comme autant de coûts allant jusqu’à produire un vote avec les pieds ou de gains alimentant une prime électorale. Il faudra les ajouter ou les retrancher du socle électoral constitué par la clientèle captive des partis ou des candidats.
Les facteurs locaux sont bien sûr les éléments les plus actifs dans le processus dit de maximisation des chances de réélection des sortants. Mais cela n’interdit pas la manifestation d’une nationalisation des élections municipales. Elle sera plus ou moins forte selon la place des municipales dans le calendrier des élections nationales. Le degré de politisation doit en principe augmenter à partir du milieu du quinquennat. C’est ainsi que de nombreux maires, par ailleurs bons gestionnaires, peuvent voir leur réélection compromise lorsque l’exécutif national est en déficit de crédibilité, et/ou lorsque les performances macroéconomiques du gouvernement sont jugées insuffisantes. Les retombées locales d’une dégradation du taux de chômage peuvent alors pénaliser un maire sortant.
Les prochains posts d’ElectionScope reviendront plus en détail sur ces éléments explicatifs du vote : déterminants nationaux comme la crédibilité gouvernementale ou les performances macroéconomiques et déterminants locaux, que sont l’usure du pouvoir, la prime au sortant, les performances économiques et managériales locales, l’état de la fiscalité et des finances locales, l’évolution de la socio-démographie urbaine, ou encore la modification de l’habitat…
Les sortants sont conscients de la nécessité de présenter un bon bilan, c’est pourquoi ils tentent de faire jouer les leviers de la socio-démographie et de la structure de l’habitat qu’ils vont chercher à modifier à leur avantage. Ils peuvent aussi s’offrir une prime électorale grâce au cumul des mandats. Sa disparition annoncée pour 2017 n’aura donc pas que des avantages !
Tous les éléments qui précèdent expliquent en grande partie la dynamique de ce que l’on appellera la trajectoire politique d’une ville. Il se trouve en effet, que certaines villes constituent de véritables bastions inexpugnables (comme Neuilly-sur-Seine ville de droite stable ou St Denis ville de gauche stable) tandis que d’autres basculent systématiquement au gré d’une instabilité chronique (telles que la Seyne-sur-Mer, ville de droite instable ou Valence ville de gauche instable). D’autres villes présentent des situations intermédiaires entre ces cas types (Reims ville de droite quasi-stable ou Brest ville de gauche quasi-stable).
L’électeur va réinterpréter ces éléments dans son vote. Le modèle ElectionScope en produit la transcription formalisée et quantifiée, afin de donner sens au comportement passé de l’électeur et, d’envisager les conditions d’une prévision du vote de 2014.
Mais attention, la prévision ou simulation électorale, a toujours un caractère probabiliste et conditionnel. Tout modèle est constitué d’un panel d’observations et d’hypothèses quant aux éléments expliquant le vote, il doit donc être interprété avec une marge d’erreur. Cette dernière reflète les variables non prises en compte par le modèle, et les facteurs aléatoires qui justifient l’écart possible entre, le résultat estimé par le modèle et, celui réellement observé. Les informations tirées d’un modèle ne sont donc valables que dans le cadre des hypothèses qui le déterminent. C’est la raison pour laquelle une probabilité de réalisation est affectée par ElectionScope à chaque prévision de voix.