Comment la psychologie peut-elle se mettre au service de la sécurité routière ? (2/2)

Death proof (Quentin Tarentino, 2007)

Suite et fin de l’article dont vous pouvez découvrir la 1ère partie en cliquant ici.

La science du comportement au service de la politique de sécurité routière (suite)

Principe n°2 : nos comportements sont influencés par les normes sociales

Autre principe comportemental pouvant changer les comportements plus efficacement : les comportements sont motivés par les normes sociales.

Les expériences en psychologie sociale montrent que :

  • les gens ont tendance à se conformer aux comportements de la majorité.
  • motivation apprise : pression des pairs, désir de conformité, ne pas être l’objet de la désapprobation du groupe.
  • le jugement du groupe s’internalise : les individus finissent par penser comme le groupe.

Donc : les groupes unanimes fournissent des modèles puissants pour modifier les comportements. Exemple d’application de ce principe pour faire respecter les vitesses et les panneaux de signalisation :

Une des stratégies actuelle : les radars de feu. Inconvénients des radars de feu : couteux, stratégie critiquée par les populations et surtout efficacité limité (revenus annuels engendrés en 2015 pour violation au code de la route : 48, 90 et 41 millions de dollars respectivement pour les villes d’Edmonton au Canada, Chicago et NYC). Nous sommes donc nombreux à ne pas respecter le code de la route…

Exemple d'alternative : Etude princeps en 1981, répliquée en 1991 :

Installation d’une signalisation indiquant régulièrement aux automobilistes le pourcentage d’automobilistes respectant la vitesse autorisée.

>> Résultat : stratégie 10 fois plus efficace et moins couteuse que les stratégies classiques.

Principe n°3 : la motivation est un levier puissant pour changer nos comportements

Expérimentation au Texas pour réduire la quantité de détritus au bord des autoroutes (population ciblée : jeunes hommes 18/24 ans) :

1ère stratégie : campagnes couteuses pour convaincre la cible de cesser de jeter leurs ordures >> échec (résultats non significatifs)

2ème stratégie : utiliser la motivation des jeunes (patriotisme important envers l’équipe de football « Dallas Cowboy ») : spot TV des joueurs de l’équipe ramassants eux-mêmes les ordures et grondant « don’t mess with Texas ! »

>> Baisse de 29% des déchets la 1ère année, 72% après 6 ans : résultats significatifs  et surtout les comportements civiques se maintiennent à long terme.

Pour conclure…

Ces quelques exemples représentent une petite illustration de comment la recherche en science du comportement peut améliorer la sécurité routière. Il existe des stratégies fondées sur les preuves (méthodologie scientifique) qui démontrent l’efficacité de certaines procédures issues de cette science (littérature très importante). Tenir compte de la façon dont les comportements humains fonctionnent peut donc permettre de changer les comportements plus efficacement qu’ils ne le sont actuellement.

Mais les principes comportementaux sont peu pris en compte par nos dirigeants politiques. Résultat : les mesures actuelles ont des effets non « contrôlés », aléatoires et sont souvent peu efficaces sur nos comportements. Pourtant, la sécurité routière est un enjeu majeur de santé publique.

La sécurité routière est un exemple de domaine parmi beaucoup d’autres pour lesquels nos gouvernements se limitent à une action uniquement politique. La consommation de tabac, d’alcool, les comportements alimentaires, les problématiques sociétales, le travail, l’économie, l’écologie et bien d’autres domaines pourraient être gérés avec beaucoup plus de pertinence si l’on prenait un peu plus en compte la façon dont fonctionne l’être humain. De nombreux pays appliquent déjà avec succès les principes issus de la science du comportement pour les aider à résoudre leurs problématiques. Alors pourquoi pas en France ? 

Hypothèses :

  • Méconnaissance de la science du comportement 
  • Culture et stratégies actuelles ancrées depuis longtemps
  • Raisons financières