Ce mois-ci, le magazine Cerveau & Psycho tente de nous éclairer sur les mécanismes de la séduction. Vaste programme.
Les chercheurs en psychologie se penchent depuis longtemps sur ce sujet en essayant par exemple de déterminer les variables qui influencent la durée de vie d'un couple. On trouve également des travaux qui s'intéressent à l'impact de la tenue vestimentaire sur le déclenchement d'un "coup de foudre", ou encore qui tentent de savoir si effleurer le bras d’une personne au moment de l'aborder pourrait aider à "conclure" (Sciences Humaines, n°217, juillet 2010).
Le thème est donc vaste et les études sont nombreuses. Malheureusement, il est presque impossible de généraliser tous ces résultats à la vie de tous les jours tellement il est difficile de définir précisément ce que sont des « comportements de séduction ». Rien que de définir "un comportement amoureux" de façon objective est un véritable casse-tête pour un chercheur en psychologie (en comparaison, on retrouve le même genre de difficulté lorsque l'on essaie d'évaluer "l'intelligence").
Néanmoins, dans le numéro d'été de Cerveau & Psycho, on peut trouver un article qui propose un point de vue intéressant sur la séduction (par Nicolas Guéguen, enseignant-chercheur en psychologie sociale). Il s'agit d'une approche "scientifique" de la séduction, s'appuyant sur les principes de la science du comportement et des travaux en psychologie sociale. Une approche qui pourrait bien vous donner des idées pour séduire cet été…
Une théorie des émotions
Dans les années 70, des psychologues se sont posés la question suivante : « qu’est-ce qui fait que les gens croient être amoureux ? ». Pour y répondre ils se sont penchés sur les mécanismes biochimiques des émotions. Ainsi, si l’on considère les émotions d’un point de vue physiologique, il est très difficile de les distinguer. La peur, la colère ou l’amour par exemple sont tous caractérisés par une accélération du rythme cardiaque, une sécrétion d'hormones, des contractures musculaires, etc. Bref, des émotions différentes s’accompagnent de réactions physiologiques identiques (on dit d’ailleurs de ces réactions qu’elles sont non spécifiques).
Pourtant, on fait l’expérience d’émotions très différentes les unes des autres. En réalité, pour percevoir une certaine émotion, il ne suffit pas seulement d’une activation physiologique, il faut aussi interpréter cette sensation, lui donner une étiquette. Le fait d’appeler une émotion de la joie, de la peur ou de l’amour est donc fonction du contexte social et culturel de la situation dans laquelle on ressent l’activation physiologique.
Une expérience en psychologie sociale illustre bien cette notion de contextualisation de nos émotions :
Brehm (1970) sollicite un groupe de participants pour une recherche et prévient la moitié d’entre eux qu’elle impliquera de recevoir des chocs électriques très douloureux. Il n’est pas question de chocs électriques pour la deuxième moitié du groupe. Durant une période d’attente, une jolie jeune femme se joint aux participants. On observe ensuite qu’au sein du groupe qui anticipait des chocs électriques, les individus déclarent ressentir beaucoup plus d’attraction envers cette jeune femme que ceux du groupe pour lequel il n’avait pas été question de chocs électriques. Comment expliquer ces résultats ? En fait, la menace des chocs électriques a produit une activation physiologique qui a été ré-attribuée à des sentiments d’attraction en raison de la présence de la jeune femme.
En somme, si les circonstances sont appropriées, n’importe quel type d’activation physiologique peut être interprété comme de l’amour. La source réelle de l’activation physiologique ne serait pas fondamentale. Le fait que cette activation soit interprétée comme une passion amoureuse le serait tout autant.
Privilégiez les sensations fortes
Voilà donc pourquoi, en emmenant votre « target » au cinéma voir un film d’horreur, ou bien en lui faisant faire un tour en moto, ou encore en l’invitant dans un manège à sensation, vous favoriserez votre capital de séduction en vous rendant plus attirant(e). Par un mécanisme d'association entre vous et l’environnement « stressant », le partenaire, a priori peu enclin à succomber à vos charmes, pourrait bien interpréter ses sensations physiologiques comme étant un début d’attirance pour vous. Il s’agit en quelque sorte d’un apprentissage de l’amour par conditionnement.
En résumé, comme l’écrit Nicolas Guéguen, « certains lieux peuvent augmenter les chances du séducteur en créant un éveil émotionnel qui sera attribué à votre charme ».