Il ne s’appelle pas Louis, comme son arrière grand-père, son grand-père et son père. Alors Stéphane Pitré, qui a le sens des racines, a baptisé son premier restaurant du nom de ses aïeux : Louis. Un style frais et tiré à quatre épingles, une addition raisonnable, Louis mérite votre attention.
Stéphane Pitré a indéniablement un petit côté premier de la classe. La version rebelle de la jeune cuisine française n’est pas son style de beauté. Moderne, sans aucun doute, dans l’air du temps, bien évidemment, mais certainement bon genre. Et comme de juste, Stéphane Pitré a déjà reçu, malgré son jeune âge, de jolies récompenses. La première offerte par le Michelin sous la forme d’un Bib gourmand, alors qu’il était le chef de “Chez Cécile” dans le 8ème arrondissement, la seconde par Gault et Millau qui le fit lauréat de sa dotation pour les jeunes talents. Un prix, sonnant et trébuchant, qui lui permet aujourd’hui de franchir le pas et de devenir propriétaire de son propre établissement.
Ouvert en mars, nous lui rendions visite quelque temps après. Moments toujours périlleux... La peinture est encore fraiche. Une nouvelle salle, ça ressemble un peu à des souliers neufs, il faut la faire à sa mesure. On est toujours un peu gêné, on a peur de griffer le joli cuir... Du coup, on devient prudent. Et c’est un peu le sentiment qui dominait à l’issu de ce repas. La cuisine de Stéphane Pitré est très appliquée avec un grand sens des équilibres, à la fois des saveurs et des textures. Il n’y a pas de fautes de goût, tout est très juste, très “à sa place”. Peut-être manque-t-il seulement d’un peu d’audace, ou plus simplement d’un geste relâché d’où l’imprévu pourrait surgir. Sans doute faut-il voir là le stress des premiers jours, l’envie de bien faire est quelque fois aussi un garde fou dont il faut savoir se départir. Mais cela viendra, les adresses où Stéphane a œuvré dans le passé, et dernièrement au “Métropolitain”, place de Mexico à Paris, parlent pour lui.
Chaque midi, Stéphane propose une formule déjeuner en trois (32€) ou six plats (48€) avec un accord mets et vins (24 €) remarquablement orchestré par la jeune sommelière Adeline Salaün. Ce jour-là, un saumon label rouge mi-cuit livrait une chair rose et sans défense aux morsures acidulées d’une pomme verte, une fleur d’ail pour tendre l’ensemble et un assaisonnement précis laissaient le champs libre à l’épanouissement des saveurs douces du poisson. L’accord choisi par Adeline était une trouvaille merveilleuse, un vin Serbe nature cuvée “Estina”, une splendeur d’équilibre floral/minéral, réalisé par deux français, Cyrille et Estelle Bongiraud.
Suivait ensuite une épaule d’agneau confite accompagnée d’une texture de chou fleur, belle assiette monochrome, élégante, aux saveurs profondes, un travail irréprochable. Là encore, bel accord avec un Luberon rouge 2012, “La cavale” de Paul Dubrule.
Une île flottante aux pomelos confits clôturait avec légèreté ce déjeuner. Ceux qui optaient pour la formule à six plats se régalaient - en plus des plats déjà présentés - d’un foie gras mi cuit fouetté par l’acidulé de la rhubarbe, puis d’une volaille de Challans accompagnée de morilles fraiches et de radis roses glacés...
Oui, Louis mérite la rencontre. Take a date ?
L’adresse : Louis - 23 rue de la Victoire - 75009 Paris - Tél. : 01 55 07 86 52