Pas de menus, mais des mots pour choisir ce que vous mangez. C’est le principe et le pari proposé par un restaurant parisien : Maguey. Une manière étonnante de découvrir votre profil gourmand en choisissant les intitulés de quatre menus dont les plats vous restent cachés : explications !
C’était la première carte de Maguey, sympathique restaurant niché dans le 12ème arrondissement. Une carte dont l’ensemble des plats ne sont inscrits nulle part : pas d’ardoise au mur, pas de menus imprimés, pas d’annonce orale… Une carte muette ? Pas vraiment.
Des mots sont là pour vous guider, vous inspirer.
Shu Zhang, ancienne de l’Ecole Centrale, a initié ce concept intriguant : “Ce n’est pas une démarche littéraire, prévient-elle. Quand je mange, j’essaie toujours de mettre des mots sur ce que je ressens. Ce qui importe, c’est la définition d’une sensation. Aussi, pourquoi ne pas mettre en avant cette sensation et décliner autour une série de recettes ? ”
Et comme une sensation seule peut, à la longue, être lassante, Shu Zhang a eu l’excellente idée de les marier, de les confronter. Ainsi, sur cette première carte, quatre menus s’invitaient à nos réflexions et proposaient une dialectique riche d’intentions. Allait-on choisir le menu “Percutant et honnête”, ou le “Percutant et malicieux”, serait-on tenté par le “Moelleux et honnête”, ou encore par le “Moelleux et malicieux” ?
Le concept prend tout son sens à ce moment crucial de la décision. Il nous oblige, finalement, à nous interroger sur notre humeur du jour. Sommes-nous plutôt enclins à subir des assauts “Percutant et malicieux”, ou souhaitons-nous être dorlotés par un menu “Moelleux et honnête” ?
Avant de choisir définitivement, Shu Zhang vous interroge sur vos allergies et vos goûts. En l’absence de contre-indication, le repas peut commencer. Et les surprises aussi.
Sous le tandem “Moelleux et Malicieux” se cachait en entrée une soupe de patate douce et fenouil (pour le moelleux), relevée de poivre du Sichuan (pour la malice), suivait un pigeon et ses croquettes, purée d’oignons (le versant moelleux), noisettes et champignons, une gelée de canneberge (la pointe malicieuse). En dessert, un entremet praliné flirtait très nettement sur le registre moelleux, juste piqué par la malice de grains de grenade.
L’ensemble tenait bien la promesse du duo de sensations. Autre exemple ? Le menu “Percutant et honnête” s’ouvrait avec des nems croustillants, gingembre confit, poivrons marinés et chèvre frais. Percutant avec le croustillant et les épices, honnête avec la tempérance du fromage de chèvre frais. Venait ensuite un lieu noir en croûte de brebis, gelée de badiane, échalotes au vinaigre, mousse de pain. Lieu, mousse de pain, gelée de badiane pour le “yin” honnête de ce plat, les échalotes et la croûte de brebis pour le “yang” percutant.
Pour chaque plat, un mariage (un autre) est proposé avec un vin. Chaque association était remarquablement imaginée par Benoît Richert, également un ancien de Centrale, de très beaux accords.
Maguey est aujourd’hui à sa deuxième carte, où les propositions de sensations seront : “aimable/arrogant” et “rusé/chaleureux”. Laissez-vous questionner par vos sentiments du jour…
Adresse : Maguey – 99, rue de Charenton – Paris 75012 – Tél : 09 81 09 48 92 – Le menu “senasation” 39€, avec accords mets et vins 58€.