La panna cotta, dessert piémontais, est trop souvent galvaudée. Ferme et lourde, elle perd son onctuosité lactée, valeur pourtant cardinale de cette gourmandise. Sempiternellement associée avec des fruits rouges ou un caramel, là voilà relookée avec une infusion de cardamome et un coulis de potiron bien de saison. Gracié qui ? Gracié “Vino & Cucina” !
Pour trouver “Vino & Cuccina”, il vous faut aller rue Saint-Sauveur, dans le quartier Montorgueil. Vous passerez prudemment devant “Big Fernand” et son troupeau d’ado-rateurs faisant le pied de grue sur le trottoir en attendant sa ration de hamburgers “so hype”. Vous remarquerez de très jolies et de très jeunes filles, mais vous poursuivrez votre chemin. A quelques mètres de là, un refuge pour adultes vous attend ; ouf, merci Saint-Sauveur.
“Vino & Cucina” est la nouvelle adresse de Charles Teboul, le taulier de deux adresses italo-parigotes : “Improvista” et plus récemment “Viola”.
Charles est un fondu d’Italie, sa maman, Viola, était de la Botte. Façon de parler, on est d’accord ! Petit, il y passait toutes ses vacances, et aujourd’hui, il ne peut se retenir de s’y précipiter au minimum deux à trois fois l’an.
Avec “Vino & Cucina”, Charles a voulu rendre hommage aux vins italiens. « La star, ici, aime-t-il à répéter, ce sont les 250 crus qui vieillissent dans la cave. » Enfin, qui vieillissent, si on leur en donne le temps. Car, Charles nous a concocté une sélection des plus séduisantes. Petits domaines inconnus, quelques fois grands comme trois carrés de vignes… Bel exemple, avec les trois hectares cultivés par Christiano Guttarolo, jeune vigneron de Gioa del Colle, le plus beau terroir des Pouilles, où il élève un “primitivo”, non filtré, très peu souffré, aux notes de framboise et de thé vert, d’une souplesse infinie de tannin. Une friandise absolue. Et il paraît que ce garçon propose également une cuvée vieillie en amphore, que Vino & Cucina ne tardera pas à mettre sur sa carte. Un massacre, si l’on en croît les trémolos dans la voix de Florent Coyac, le sommelier de “Vino & Cucina”. Autre belle découverte, le splendide Ageno 2007, “La Stoppa”, d’un domaine mené par Elena Pantaleoni. Avec sa baguette magique, elle fait non pas un vin blanc, mais un vin orange, majoritairement issu du cépage malvoisie. Un vin pour amateur éclairé, c’est certain. Sec, acide, astringent (ça peut faire peur), mais également d’une formidable fraîcheur, d’une intensité aromatique rare, diffusant des fragrances de pomme à cidre. Pas de filtration, un caractère oxydatif assumé, une bombina !
Pour déguster ces vins, Charles Teboul a bien sûr une carte et des menus (le midi, entrée/plat 18€ et le soir menu dégustation 40€). Toujours des produits de saison, travaillés dans un esprit contemporain. En ce moment, le homard, le sanglier sont notamment les produits qui guident l’inspiration de Charles Teboul. Mais dès 19h et jusqu’à 21h, il ne faut pas rater le moment de l’Aperitivo. Tapas transalpines au comptoir, avec des produits à tomber comme ce formidable jambon cuit à la truffe noire d’été, en provenance direct de Romagne, ou ces “Nduja” de cochon noir de Calabre, genre de saucisson très piquant mais addictif, ou encore un Asiago de 60 mois d’affinage, un fromage qui aime recevoir l’onction d’un trait de vieux balsamique pour sublimer ses saveurs. Et pour le dessert : panna cotta ! Voilà la recette.
Panna cotta, infusée de cardamome, coulis de potiron
Pour six personnes
Pour la panna cotta
65 cl de crème fraîche liquide à 35 %
100 gr de sucre semoule
3 feuilles de gélatine
3 graines de cardamome verte
Pour le coulis de potiron
100 gr de chair de potiron
30 grammes de sucre semoule
Un trait de jus de citron
Raisins de Corinthe macérés dans le rhum
Réalisation
Pour le coulis
Cuire à feu doux dans une casserole la chair de potiron avec le sucre et le jus de citron, pendant une heure, ajouter un peu d’eau si nécessaire. Mixer le tout. Obtenir un coulis bien lisse, laisser refroidir.
Panna cotta
Faire chauffer à feu moyen la crème fraîche liquide avec le sucre et les graines de cardamomes concassées, laisser infuser pendant un quart d’heure sur le feu. Puis de nouveau un quart d’heure, hors du feu. Filtrer, puis incorporer les feuilles de gélatines préalablement ramollies dans de l’eau froide.
Dressage
Dans des ramequins, verser le coulis de potiron, recouvrir avec la panna cotta. Laisser prendre au frais (environ une heure). Au moment de servir, disposer quelques raisins de Corinthe sur le dessus de l’entremet.
Adresse : Vino & Cucina 22-24 rue Saint-Sauveur - 75002 Paris
Tél : 01 42 33 08 42