Les Israéliens veulent Netanyahu

Dans Haaretz, dimanche dernier, Rogel Alpher met enfin les pieds dans le plat. Rien n’y fera, le public israélien veut Benjamin Netanyahu. L’arithmétique est sans appel. Le Premier ministre sortant pourra, après les élections, former une coalition gouvernementale majoritaire regroupant le Likoud, les autres éléments de la droite nationaliste et les partis ultra-orthodoxes. Une majorité d’israéliens, écrit Alpher, glorifie son armée, vénère la mémoire de l’Holocauste, soutient la poursuite de la colonisation, s’oppose – pour une raison ou une autre - à un accord avec les Palestiniens, et favorise le renforcement de l’identité nationale religieuse de l’état.

Le dernier sondage de l’Institut pour la démocratie à Jérusalem le confirme : 54,7% des personnes interrogées pensent que le bloc de droite va former le gouvernement après le scrutin. Seuls 29,6% estiment que ce sera le bloc centre gauche. 47,3% se prononcent pour la droite. 41 % sont en faveur de l’opposition actuelle. A moins d’un glissement inattendu de l’opinion public avant le scrutin du 17 mars, Netanyahu devrait gagner son pari et former un gouvernement selon son cœur, sans les centristes qu’il déteste. Exit Tzipi Livni qui voulait à toute force négocier avec Mahmoud Abbas. Exit Yaïr Lapid et son équipe de députés aux critiques insupportables. En d’autres termes, le résultat prévisible du vote est moins important que la campagne électorale elle même, avec un grand absent : le conflit avec les Palestiniens. 66,5% des personnes interrogées dans le cadre de ce sondage, pensent que des négociations entre Israël et l’Autorité palestinienne n’aboutiront pas à un accord de paix au cours des années à venir. L’argument de la communication gouvernementale est parfaitement intégré par la majorité des Israéliens : « C’est la faute à Mahmoud Abbas ! ». Bien sur, Benjamin Netanyahu répète qu’il est toujours en faveur d’une solution à deux états telle qu’il l’avait définie dans son discours à l’Université Bar-Ilan en 2009, mais ajoute que les Palestiniens l’ont « vidée de son contenu. Au lieu de négocier, ils vont à la Cour pénale internationale de La Haye pour y accuser le soldats israéliens de crimes de guerre ». Exit le processus de paix.

Iran Iran
A sa grande satisfaction, c’est l’affaire du nucléaire iranien qui est omniprésente dans les médias israéliens, grâce à l’invitation concoctée par Ron Dermer, l’ambassadeur d’Israël aux Etats Unis et John Boehner, le président de la chambre des représentants. Netanyahu prendra la parole devant les deux chambres du Congrès le 3 mars, deux semaines avant les élections en Israël. Cela, en dépit de toutes les réactions négatives à cette initiative. La colère de la Maison blanche. Le président des Etats Unis n’a pas été consulté comme le voudrait le protocole le plus élémentaire. Le Premier ministre israélien, invité uniquement par les Républicains prononcera un discours critiquant la politique iranienne de Barack Obama. Furieux, le Vice-président, Joe Biden, le président de la chambre des représentants a annoncé qu’il ne serait pas là.. De nombreux parlementaires démocrates, devraient l’imiter. Ceux là seront punis par les pro-Netanyahu, de la droite de la communauté juive. Selon Politico, Matt Brooks, le directeur de la « Jewish Republican Coalition » : « Nous utiliserons toutes les ressources nécessaires pour que les gens sachent qu’au lieu de soutenir Israël et le Premier ministre Benjamin Netanyahu dans son opposition à un Iran nucléaire, (ces démocrates) ont choisi une attitude partisane en soutenant le président Obama » Cette organisation est financée en partie par Sheldon Adelson, le milliardaire qui, en Israël, possède le quotidien gratuit Israël Hayom. Cet organe de presse soutient Netanyahu contre vents et marées. Face à un congrès divisé, et alors que des personnalités juives de premier plan - comme Abe Foxman, le patron de la Anti Defamation League – lui conseillent de ne pas venir, le Premier ministre israélien annulera-il son voyage à Washington ?

Un extraordinaire sentiment de puissance
Que non ! Au cours d’une soirée électorale à Jérusalem, devant quelques centaines de francophones, il a lancé : « De même que je suis allé à Paris, j’irai partout où je serai invité à présenter la position d’Israël face à ceux qui veulent nous détruire. Je le ferai non pas en tant que Premier ministre de l’Etat d’Israël mais comme représentant du peuple juif dans son ensemble ».
Netanyahu à Paris, jouant des coudes en tête du cortège des dizaines de dirigeants venus soutenir la France après les attentats à Charlie Hebdo et à l’Hyper Cachère.. Puis, invité à prendre la parole devant les deux chambres du congrès à Washington contre l’avis du président américain. Aucun autre homme politique au monde ne peut se permettre de telles initiatives. De nombreux électeurs israéliens adorent cette extraordinaire image de puissance qu’il projette ainsi. Mais, cela va bien au delà de la simple manœuvre électoraliste, En fait, Benjamin Netanyahu poursuit la mission dont il se considère investi : faire face à la menace de destruction qui, de génération en génération, depuis la haute antiquité plane sur le peuple juif. Pour cela, il doit rester à la tête du gouvernement israélien et lutter partout où c’est possible pour empêcher un accord sur le nucléaire iranien. Garder le contrôle de la Terre d’Israël ? C’est quasiment fait. Avec plus de 400000 israéliens habitant la Cisjordanie, la probabilité d’un accord paraît extrêmement faible Et si les palestiniens veulent un état, ils doivent reconnaître Israël comme l’état nation du peuple juif. Ils refusent et donc inutile d’en parler.

Voir: Rogel Alpher: http://www.haaretz.com/opinion/.premium-1.641287
Sondages: http://en.idi.org.il/media/3875187/Peace_Index_Data_January_2015-Eng.pdf
Politico: http://www.politico.com/story/2015/02/benjamin-netanyahu-israel-congress-114965.html