Très présent, il y a seulement quelques années, le conflit israélo-palestinien a quasiment disparu des médias français, même si, à l’occasion, les chaines tout-info l’évoquent et que la presse écrite y fait allusion de temps à autre. A Jérusalem et à Tel Aviv, les bureaux des chaines internationales ont littéralement fondu. ABC, CBS, ont fermé. ABC n’est plus représenté que par un seul journaliste. Les rédactions expliquent ce phénomène par l’absence de news importants. Au Proche Orient,dit-on, l’actualité est ailleurs avec le printemps arabe, les conflits en Syrie et en Libye etc. L’occupation de la Cisjordanie, le développement des colonies n’est pas une nouveauté et n’intéresse plus. A cela viennent s’ajouter les campagnes des organisations pro-israéliennes à l’affut de chaque reportage considéré comme pro-palestinien. Par exemple, le magazine « Un œil sur la planète. Palestine », diffusé en octobre 2011, a suscité une véritable tempête, avec des interventions du CRIF et de l’Ambassade d’Israël. Même si les auteurs de l’émission ont eu le soutien du CSA et des sociétés de journalistes, les rédactions savent à quoi s’attendre si elles remettent le couvert. recevant, à coup sur, critiques injustifiées, accusations d’antisémitisme voir menaces. Pourquoi, en l’absence d’actualité incontournable, prendre des risques et diffuser un sujet qui, aussi exact soit-il, va immanquablement, créer la polémique ?
Donc, au moins sur ce blog, voici où en est ce conflit qui, à tout moment risque d’embraser à nouveau le Proche-Orient:
Eh oui ! L'Autorité palestinienne est au bord de l’effondrement. De mois en mois, elle fait face à des difficultés croissantes pour payer ses 180 000 employés. A nouveau, d’ici la fin octobre, elle ne versera que la moitié des salaires de septembre. Explications : si une bonne gestion économique a permis de réduire la dépendance de l’Autorité envers l’aide internationale qui est passée de 1,8 à 1,1 milliards de dollars en 2010, le déficit s’accumule en raison du peu d’entrain des donateurs internationaux à financer l’autonomie palestinienne en l’absence d’un processus de paix. L’aide américaine est passée en trois ans de 150 millions de $ (sur les 250 millions promis !) à zéro en 2012. Les États arabes qui, au moment de l’accord de Paris en décembre 2007 s’étaient engagés pour au moins 400 millions ont donné à 200 millions. Évidemment, les dirigeants de ces pays font face à l’agitation du printemps arabe.
La Banque mondiale et le FMI pointent du doigt les difficultés du gouvernement du Premier ministre Salam Fayyad à développer la zone C en Cisjordanie qui entièrement sous contrôle israélien et représente 60 % de ce territoire, pour ne pas parler de Jérusalem-Est coupé du reste du territoire palestinien. Et les investissements privés ? Ils sont minimes car peu d’entrepreneurs ou de sociétés étrangères prennent le risque de venir s’installer chez les Palestiniens, sachant qu’ils n’ont pas la garantie que leurs produits pourront passer régulièrement les barrages militaires israéliens. Dans ces conditions la dette de l’Autorité atteint plus d’un milliard trois cent millions de dollars. Pas question d’emprunter aux banques installées à Ramallah, elles ont déjà prêté l’équivalent de leurs fonds propres. Selon des économistes européens, dans ces conditions, la faillite financière devrait arriver vers mars-avril 2013.
Le scénario est prévisible : n’étant pas payés les policiers, les membres des forces de sécurité palestiniennes démissionnent pour chercher du travail ailleurs. Or, en coordination avec l’armée et le Shin Beth israéliens, ce sont eux qui assurent la lutte contre la violence et maintiennent le calme en Cisjordanie. Ce serait la fin de l’administration de Mahmoud Abbas et de son Premier ministre, Salam Fayyad, Israël n’aurait plus le choix et devrait réoccuper la Cisjordanie. Pour les Israéliens, un tel développement serait catastrophique. Il faudrait remettre en place l’administration militaire dissoute en 1994, assurer la collecte des impôts, payer les salaires des fonctionnaires, des enseignants, des médecins palestiniens. Mais surtout, ce serait un message à l’ensemble des pays arabes : "la paix israélo-palestinienne est impossible". Les traités de paix avec l’Egypte et la Jordanie résisteront-ils à un tel développement ? Ce n’est pas certain.
Dans ces conditions, dans les cercles dirigeants à Ramallah l’atmosphère est sombre. Certains responsables comme Saeb Erekat parlent ni plus ni moins que de dissoudre l’Autorité autonome. Pour l’heure, Mahmoud Abbas envisage une dernière tentative avant de quitter la scène politique : déposer, en novembre, après l’élection présidentielle aux USA, auprès de l’Assemblée générale des Nations Unies une demande de reconnaissance de la Palestine en qualité d’état non membre de l’ONU. En principe la motion devrait être approuvée à la majorité. Automatiquement, comme le veut la loi américaine, Washington suspendra sa contribution au budget des Nations Unies. Ce serait la crise. Abbas proposerait alors des négociations directes avec Israël sans conditions préalables, sans réclamer un arrêt de la colonisation. Le pari est risqué car le gouvernement israélien menace déjà de prendre des mesures de rétorsion contre l’Autorité palestinienne si elle se lance dans une telle initiative. Le tout est de savoir si les 180 000 employés palestiniens impayés et en colère attendront d’ici là ? Et puis, sur le fond, un accord est-il possible alors que plus de 300 000 colons sont installés en Cisjordanie et n’ont pas l’intention de partir ?