États-Unis : polémique sur les enfants d’immigrés

Donald Trump a mis fin à une directive qui jusque-là permettait à des parents sans-papiers avec enfants nés sur le sol américain de ne pas être expulsés. Des familles vivent dans la crainte.

Voilà ce que redoutent des dizaines de familles aux États-Unis : que les services de l’immigration débarquent un beau matin. 211 000 expulsions ont déjà été menées depuis l’élection de Donald Trump. Un chiffre en augmentation par rapport à la période de Barack Obama. Différence notable : désormais, on n’hésite plus à séparer les familles, à qualifier les illégaux de criminels.

Vivre avec la peur

Alors pour beaucoup, les réveils sont de plus en plus difficiles depuis l’élection du nouveau président. Comme pour cette petite fille de 8 ans : "Je me sens bien avec maman, mais en même temps j’ai très peur." Elle vit la peur au ventre de se retrouver séparée de sa maman. L’une et l’autre n’ont pas le même statut : la petite, née aux États-Unis, est américaine, la mère est sans-papiers et considérée comme expulsable. Brenda est arrivée illégalement aux États-Unis il y a 23 ans. Depuis, elle travaille dans la restauration où jamais personne ne lui a jamais demandé de justifier de son statut. D’ailleurs, elle paye même chaque année ses impôts. Mais les directives Trump sur l’immigration sont implacables. Pour elle, un rêve s’écroule.

Reportage de Jacques Cardoze, Laurent Desbois, Régis Massini et Arielle Monange

Qui sont les trois proches de Donald Trump visés par les chefs d'inculpation ?

Robert Muller, procureur spécial chargé de l'enquête sur l'ingérence de la Russie lors de la campagne présidentielle de 2016, a mis en examen trois proches de l'actuel locataire de la Maison-Blanche, lundi dernier.

Qui sont les trois hommes inculpés ?

Paul Manafort est un avocat américain, un consultant politique, mais également un célèbre lobbyiste. Il s'est récemment fait connaître pour avoir occupé durant quelques mois, le poste de directeur de compagne lors de la candidature de Donald Trump aux dernières élections présidentielles. En août 2016, Manafort a été contraint de démissionner sur fond de scandale, dans la mesure où il a été le conseiller de l'ancien président d'Ukraine, Viktor Ianoukovytch.

Auparavant, Manafort avait également travaillé aux côtés de trois anciens présidents des États-Unis, que sont Gerald Ford (1974-1977), Ronald Reagan (1981-1989) et Georges H. W Bush (1989-1993). En France, Édouard Balladur s'était offert les services de l'Américain lors de sa campagne présidentielle de 1995, où il est arrivé troisième avec 18,58% des suffrages.

Rick Gates est l'un des associés de Paul Manafort. Il a rejoint l'entreprise de lobbyiste de celui-ci au milieu des années 2000. Tous deux ont collaboré aux côtés de Trump, l'un comme directeur de campagne, l'autre en tant qu'adjoint. Suite au départ de Manafort, Gates a rapidement quitté son poste auprès du président.

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George Papadopoulos a rejoint la campagne présidentielle de Donald Trump en mars 2016 en tant que conseiller en politique étrangère. Il se serait rendu en Russie dès mars 2016 dans le but de rencontrer des agents du gouvernement russe, ainsi qu'un "professeur" qui disposait d'informations pouvant compromettre l'élection de la candidate Hillary Clinton.

Quels faits leur sont reprochés ? 

Paul Manafort et Rick Gates sont visés par douze chefs d'inculpation parmi lesquels : complot contre les États-Unis, blanchiment d'argent, fausses déclarations et non déclarations de comptes détenus à l'étranger. Les deux hommes seraient ciblés pour des activités non déclarées de lobbyistes et de consultants en faveur de l'ancien président ukrainien pro-russe, Viktor Ianoukovitch. Plus de 75 millions de dollars ont transité à l'aide de comptes offshores gérés par les deux associés. Paul Manafort est accusé d'avoir blanchi à lui seul 18 millions de dollars. Rick Gates a plaidé non-coupable et a été assigné à résidence par une juge.

George Papadopoulos a reconnu être coupable de fausses déclarations quant à ses contacts avec le gouvernement russe en 2016. Ce mensonge aurait donc entravé l'enquête du FBI portant sur une possible ingérence du gouvernement russe dans l'élection présidentielle de 2016. Afin de limiter les poursuites à son encontre, Papadopoulos aurait accepté de collaborer avec le FBI en fournissant des preuves sur l'implication de plusieurs personnes dans cette affaire.

Et Trump dans tout ça ?

Donald Trump réfute encore et toujours toute intervention russe pendant sa campagne électorale. Il l'a fait savoir, comme à son habitude, sur Twitter. "Toutes ces histoires 'russes' juste au moment où les Républicains s'attaquent à une historique baisse et réforme des impôts. Est-ce une coïncidence ? NON !" a-t-il commenté dimanche 29 octobre.

L'acte d'inculpation des trois hommes, signé par le procureur Robert Mueller, ne suggère pas de collusion entre l'équipe du candidat républicain et les autorités russes.

Yelen Bonhomme-Allard

Mur entre les États-Unis et le Mexique : que peut-on acheter pour le même prix ?

Bâtir un rempart entre les deux pays afin de stopper l'immigration illégale. Cette promesse, soutenue par Donald Trump lors de sa campagne électorale, prend forme peu à peu. Huit prototypes de murs ont été présentés à San Diego le 26 octobre dernier, par les sociétés de construction sélectionnées. Le coût total de l'édification du mur, couvrant les 3 100 kilomètres de la frontière, est évalué entre 12 et 25 milliards de dollars (10 et 21 milliards d'euros) selon certaines estimations.

Voici une liste de 10 éléments que l'on pourrait acheter ou financer avec les 25 milliards de dollars (21 milliards d'euros) dédiés à la construction du mur :

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2 Skype. En 2011, le groupe Microsoft a annoncé le rachat de Skype Technologies pour la somme de 8,5 milliards de dollars (7,3 milliards d'euros).

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8 sous-marins nucléaires. Mis en service en septembre 2010, "Le Terrible" (S619) est le quatrième sous-marin nucléaire lanceur d'engins français de la classe Le Triomphant. Son coût de fabrication était de l'ordre de 2,5 milliards d'euros (2,9 milliards de dollars). 

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3 dollars à chaque être humain. Selon l'Organisation des Nations Unies, la population mondiale était estimée à 7,5 milliards individus au 1er juillet 2017. En faisant un don de 3 dollars (2,5 euros) à chaque individu sur Terre, il resterait encore de l'argent dans l'enveloppe accordée à la construction du mur.

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25 millions d'Iphone X. Pas encore présent sur le marché, le nouveau gadget d'Apple est seulement disponible en pré-commande au prix de 1000 dollars. Sa date de sortie est prévue pour le 3 novembre 2017.

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25 Instagram. En, Facebook a annoncé l'acquisition d'Instagram, l'application à l'appareil photo coloré, pour environ 1 milliard de dollars.

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1 an de subvention pour la NASA. Le budget officiel de la NASA pour l’année 2016 était de 19,5 milliards de dollars (16,8 millards d'euros). Autrement dit, une partie de l'enveloppe allouée à la construction du mur pourrait être utilisée à la conquête de l'univers.

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100 000 allers-retours dans l'espace. La compagnie Virgin Group envisage de proposer aux curieux des vols en orbite à bord de la fusée Virgin Galactic. Il faudra débourser pas moins de 250 000 dollars (215 000 euros) par ticket. 

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25 millions d'escarpins Louboutin. A 1000 dollars la paire de chaussures, 25 millions de femmes pourraient se pavaner sur leurs hauts talons, reconnaissables à leur célèbre semelle rouge.

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577 634 inscriptions à Harvard. 577 634 étudiants pourraient étudier pendant un an à l'université d'Harvard, à Cambridge. Avec ses 43 280 dollars de frais d'inscription à l'année (37 366 euros), l'établissement occupe la première marche des universités les plus onéreuses au monde.

One-kilogram gold bars are arranged for a photograph at a Tanaka Kikinzoku Kogyo K.K. store in Tokyo, Japan, on Wednesday, July 10, 2013. Gold headed for the best weekly performance since October 2011 after Federal Reserve Chairman Ben S. Bernanke called for maintaining stimulus, while assets in the largest bullion-backed exchange-traded product held steady. Photographer: Junko Kimura/Bloomberg

625 000 lingots d'or. Avec un taux de change fluctuant, fixé actuellement à 40 000 dollars (34 500 euros) par lingot d'or d'1 kilogramme, il serait possible d'acquérir 625 000 lingots d'or à la place du mur entre les États-Unis et le Mexique.

Yelen Bonhomme-Allard

Coup de crayon d'un artiste londonien sur la vie frénétique autour de la Maison-Blanche

Le New-York Times Magazine a publié, dans son édition de mardi en Une, l'illustration d'Andrew Rae, dessinateur londonien. Le croquis, intitulé "This Town Melts Down", autrement dit, "Cette ville fond" met en exergue, avec humour, tous les faits politiques marquants depuis l'investiture de Donald Trump à la Maison-Blanche.

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1. Comment expliquez-vous le choix de ce sujet ?

A. R : C'était une commande du New-York Times Magazine. A ce moment-là, je ne connaissais pas encore le titre exact du projet. Il m'a été présenté comme un "profil de la capitale pendant ce qui a été une période incroyablement tumultueuse". Peur et répugnance au temps de Trump : j'étais certain que cela aller être amusant à faire ! C'est une situation très étrange comment la pire politique engendre la meilleure des satires.

Lors de l'élaboration, je me suis beaucoup entretenu avec Gail Bichler, la directrice artistique du New-York Times Magazine. Elle m'a envoyé une liste de propositions, j'ai choisi les plus réalisables, et apporté ma touche personnelle en ajoutant quelques éléments. Par exemple, l'équipe du journal souhaitait un grand oiseau Twitter cachant le soleil. Mais je trouvais qu'une nuée d'oiseaux s'envolant de la Maison-Blanche était plus représentatif.

2. Quelles références politiques sont présentes au sein de votre illustration ?

A. R : Pour n'en citer que quelques unes, on retrouve Maggie Haberman avec un assistant lui chuchotant à l'oreille, Sergey Kislyak allongé sur un canapé et des personnes aisées en train de jouer au golf. L'Air Force one volant au-dessus du Mar-a-Lago était l'une des suggestions qui n'a pas fonctionné par exemple. J'ai soumis l'idée d'un monstre des marais et l'équipe a imaginé un monstre sortant de l'eau pour envahir la scène, ce qui était une très bonne idée.

Aussi, très tôt, nous avons décidé de ne pas introduire Donald Trump dans l'image. Tant mieux, car je suis un peu fatigué de le dessiner, bien qu'il soit représenté par une sculpture de glace dans la seconde illustration. Enfin, j'étais tenté de donner à la scène un ciel sombre, mais finalement l'opposition du ciel bleu lumineux à cette scène de chaos a plus d'impact il me semble.

3. Quels messages souhaitez-vous transmettre à travers vos réalisations ?

A. R : En général, mes dessins tentent de refléter ma vision du monde. Je ne veux pas ramener un message sous la gorge de qui que ce soit, mais je ne peux pas m'empêcher de laisser mes croyances s'infiltrer dans mon travail. Par exemple, il m'arrive parfois de dessiner le même genre d'images, mais seulement s'il s'agit de quelque chose auquel je crois. J'en tire ainsi beaucoup plus de plaisir.

4. Hormis la politique, quels sujets vous passionnent ?

A. R : J'ai écris un roman graphique intitulé Tête de lune et la machine à musique, (en anglais Moonhead and the Music Machine) que je suis actuellement en train d'adapter en programme pour enfants à la télévision. J'affectionne également la science, l'éducation, la machinerie, la technologie et l'environnement. J'aime dessiner des personnages expressifs corporellement, mais ce que je préfère c'est laisser libre court à mon stylo et découvrir quelles étranges créatures vont naître sur le papier.

Yelen BONHOMME-ALLARD

Obamacare vs Trumpcare, les manifestants font entendre leur voix

Pour la deuxième journée consécutive, des centaines de manifestants se sont rassemblés sur la place du Capitole, dans la capitale américaine. Tous s'opposent au projet de loi de Donald Trump, visant à remplacer la loi Obamacare mise sur pied par son prédécesseur Barack Obama.

"L'Affordable Care Act a sauvé ma vie" : c'est le message que Julian Joshua veut faire passer en soulevant sa pancarte au dessus de la foule. Ce retraité ne brandit pas une banale planche de carton. C'est sa vie qu'il porte à bout de bras. Originaire de Grande-Bretagne, il est venu s'installer aux États-Unis, avec sa femme américaine, il y a plusieurs années. Six mois seulement après son arrivée, les médecins lui ont diagnostiqué un cancer de la prostate. "J'en fais une histoire très personnelle, s'indigne Julian. Obamacare a totalement sauvé ma vie. Sans cette loi, j'aurais dû dépenser une fortune pour être soigné". Le Britannique, qui deviendra officiellement un citoyen américain le 4 juillet prochain, n'a dû débourser que 2 500$, une somme dérisoire comparée au montant de la facture de l'ordre de plusieurs dizaines de milliers de dollars.

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Depuis, Julian est totalement guéri mais, n'exclut aucune rechute. C'est la raison pour laquelle il est venu manifester avec sa femme aujourd'hui. Le couple promet qu'il reviendra tous les jours si nécessaire, pour s'assurer que d'autres malades puissent bénéficier des mêmes aides financières. "Obamacare est un droit, non un privilège" soutient-il d'un ton engagé. 

Julian n'est malheureusement pas le seul à s'inquiéter des conséquences de l'abrogation d'Obamacare. Sous son chapeau rose, Carmen Diez Canseco applaudit ardemment les discours des activistes qui se succèdent. Agée de 66 ans, cette ancienne employée dans le secteur médical souffre depuis six années d'un cancer du sang. Aux Etats-Unis, les traitements médicaux pour ce type de cancer sont très coûteux, environ 10 000$ par mois. Sans Obamacare, Carmen est convaincue qu'elle n'aurait pas pu s'offrir les médicaments nécessaires et n'aurait donc pas survécu à la maladie : "Je serais morte depuis 4 ans".

Armée de sa pancarte, la sexagénaire dénonce que la réforme proposée par ce projet de loi bénéficiera aux riches, au détriment des pauvres. "Donald Trump n'a aucune idée que de ce que l'on vit au quotidien, assure-t-elle. Il devrait se mettre à la portée des classes les moins fortunées. Il ne survirait pas plus de trois jours dans la rue".

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Plus pour les riches, moins pour les pauvres

Selon un rapport publié par le Budget du Congrès américain (CBO), 22 millions d'Américains pourraient perdre leur assurance santé d'ici 2022 en cas d'abrogation de la loi Obamacare. Pour les manifestants, si le projet de loi est accepté, les premières victimes seront les personnes les plus vulnérables telles que les femmes, les enfants, les séniors aux faibles revenus, les personnes handicapées et ayant une maladie préexistante. Plusieurs organisations de professionnels de la santé, dont l'Association Médicale Américaine (AMA), dénoncent d'ailleurs le projet de loi du Sénat. Selon eux, en plus de diminuer drastiquement le financement de Medicaid, la couverture santé réservée aux plus pauvres, le projet de loi ne permettra pas de diminuer les coûts déjà très élevés des assurances maladies privées. 

L'avenir de la loi Obamacare sera rendu public dans une semaine. Selon Richard Arenberg, professeur en Sciences Politiques et Politique Publique à l'Université Brown, remplacer Obamacare nécessitera plusieurs années. "En ce moment, Trumpcare n'est supporté que par 17% de la population. L'ironie de l'histoire est que depuis son éventuelle suppression, Obamacare n'a jamais été aussi populaire aux États-Unis. Il est difficile de savoir quand Trumpcare verra le jour. Peut-être que d'ici là, un nouveau président sera à la tête du pays".

 Yelen BONHOMME-ALLARD avec Aliénor VINÇOTTE

Décès d'Otto Warmbier : la Corée du Nord assure être la "plus grande victime de cet incident"

Quelques jours après la mort d'Otto Warmbier, la Corée du Nord s'estime victime "d'une campagne de diffamation" menée part Washington D.C. Les autorités réfutent toutes accusations de maltraitance à l'égard de l'étudiant américain. 

La riposte de la Corée du Nord ne s'est pas faite attendre. Au lendemain de l'inhumation d'Otto Warmbier, les autorités nord-coréennes ont démenti tout acte de torture et de maltraitance envers le jeune homme. Elles accusent la Maison Blanche de mener une "campagne de diffamation" à son encontre. « Le fait que Warmbier soit mort, soudainement, en moins d'une semaine après son retour aux États-Unis, est pour nous aussi un mystère », a déclaré un porte-parole du Conseil pour la réconciliation nationale, selon l’agence officielle nord-coréenne KCNA.

Depuis le rapatriement de d'étudiant aux Etats-Unis, l'affaire a pris une dimension politique où chacun se renvoie la balle. Le président sud-coréen Moon Jae-in tient pour responsable le régime de  Pyongyang, le qualifiant "d'irrationnel". Pour Donald Tump, le décès de l'étudiant soulève un "scandale absolu".

Face aux accusations, le porte-parole nord-coréen accuse la Corée du Sud d'utiliser le décès d'Otto Warmbier dans le seul but d'obtenir la libération de six détenus sud-coréens. "Ils n'ont absolument aucune idée de la façon dont Warmbier a été bien traité [...], mais ils osent prononcer les mots de "mauvais traitement" et de "torture" ", a poursuivi le porte-parole. Avant d'ajouter que la Corée du Nord est la "plus grande victime de cet incident".

Après un an et demi de détention, l'étudiant américain avait été rapatrié dans le coma, avant de décéder quelques jours plus tard. Il a été inhumé hier, dans sa ville natale, à Cincinnati. 

Yelen BONHOMME-ALLARD

Renvoi du directeur du FBI : récit d'une folle semaine

Le 9 mai dernier, James Comey, directeur du FBI, a appris qu'il était renvoyé. Quelques minutes plus tard, la toile et les médias américains s'enflammaient. Et pour cause : Donald Trump est seulement le deuxième président américain à limoger un directeur du très puissant Federal Bureau of Investigation.

Nommé par Barack Obama

James Comey avait été nommé à la tête du FBI en septembre 2013 par Barack Obama. Il avait fait parler de lui en octobre 2016 lorsqu'il avait pris la décision de réouvrir l'enquête sur les mails d'Hillary Clinton quand elle était secrétaire d'Etat, à quelques semaines de l'élection présidentielle américaine. Comey décide finalement de fermer l'enquête une semaine plus tard, en réaffirmant les conclusions publiées en juillet.

Cette affaire n'a pas été sans conséquence pour l'ancien directeur, qui s'est vu accusé de politiser le FBI. Par ailleurs, lors de la victoire de Donald Trump en novembre, nombreux sont les démocrates qui se sont empressés de le tenir responsable de la défaite de la candidate. 

Renvoi brutal 

Mardi 9 mai, à la surprise générale, Donald Trump a remercié James Comey qui, étant en déplacement, a appris la nouvelle... en regardant la télévision. Ce dernier a d'ailleurs d'abord cru à une fausse rumeur.

Très vite, la question des motivations de cette décision s'est posée. Le fait que James Comey soit en charge de l'enquête sur les possibles liens entre les élections américaines, le président américain et la Russie n'a pas échappé à beaucoup d'américains, y voyant là un motif de mécontentement tout trouvé pour le président. C'est alors que le cycle infernal des déclarations et contre-déclarations s'est enclenché. 

Contradictions à la Maison Blanche

La Maison Blanche a d'abord déclaré que le président américain avait suivi les recommandations de Jeff Sessions et Rod Rosenstein, respectivement procureur général et procureur général adjoint. Kellyanne Conway, conseillère de Donald Trump, a affirmé la même chose. Le mémo de Rosenstein met en cause la manière dont le directeur du FBI a géré "la conclusion de l'enquête sur les mails" d'Hillary Clinton. 

Sarah Huckabee Sanders tient une conférence de presse. Mercredi 10 mai 2017. CNN.

Sarah Huckabee Sanders tient une conférence de presse. Mercredi 10 mai 2017. CNN.

Le 10 mai, Sarah Huckabee Sanders, porte-parole adjointe, déclare cependant que Donald Trump, ainsi qu'une grande partie du FBI, n'avait plus en confiance en James Comey. Le même jour, le président américain confie en effet penser que le directeur "ne faisait pas du bon travail", et admet, le lendemain, qu'il l'aurait limogé "peu importe les recommandations".

Entendu par le Sénat jeudi 11 mai, McCabe, directeur par intérim du FBI, a contredit les allégations de Sanders. Selon lui, Comey était respecté et bénéficiait "du soutien de ses collègues".

Andrew McCabe, directeur du FBI par intérim, est entendu par le Sénat. 11 mai 2017. LA Times.

Andrew McCabe, directeur du FBI par intérim, est entendu par le Sénat. 11 mai 2017. LA Times.

Etouffer l'enquête sur la Russie?

Beaucoup de contradictions, donc, qui laissent penser que Donald Trump aurait voulu empêcher l'ancien directeur d'enquêter sur les interférences russes durant l'élection présidentielle américaine. Le président a raconté jeudi que James Comey lui avait confié à trois reprises qu'il n'était pas personnellement visé par une investigation du FBI. À ce qui ressemble à de l'ingérence de la part du président, McCabe répond seulement que ce n'est pas "dans les pratiques du FBI de notifier des personnes sous le coup d'une enquête". 

Le 11 mai au soir, le président américain a finalement admis que la question de la Russie était bien en jeu : «En fait quand je me suis décidé, je me suis dit: ‘le truc avec la Russie, Trump et la Russie, c’est une histoire inventée’», a-t-il déclaré à NBC News. Pour couronner le tout, ce dernier a tweeté ce qui semble être une menace envers Comey ce vendredi 12 mai : « James Comey ferait bien d’espérer qu’il n’existe pas d’'enregistrements' de nos conversations avant qu’il commence à faire des révélations à la presse ! ». 

Donald Trump va désormais devoir nommer un nouveau chef du FBI en tentant de contenter le plus grand nombre, alors que de nombreux parlementaires reprochent au président d'avoir voulu interférer dans les affaires judiciaires. Les démocrates réclament la nomination d'un procureur spécial et indépendant afin de se charger de l'enquête sur la Russie. Affaire à suivre.

 

Victoria David

À Harvard, une "école de la résistance" à Donald Trump

Le 5 avril dernier, Timothy McCarthy, professeur à Harvard, a donné la leçon inaugurale de l'Ecole de la résistance - la Resistance School - créée par des étudiants de la Kennedy School d'Harvard. L'objet de cette résistance? Le Président des Etats-Unis, Donald J. Trump.

Formation gratuite de quatre semaines ouverte à tous, le programme en ligne veut permettre à ses étudiants de combattre la politique de Donald Trump. Les étudiants affichent, sur leur site internet, vouloir « affiner les outils dont nous avons besoin pour nous défendre au niveau fédéral, au niveau des Etats et au niveau local »

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Capture d'écran de la page d'accueil du site de "l'école", où l'on peut lire: "des compétences pratiques pour reprendre l'Amérique"

Jefferson et Harry Potter comme sources d'inspiration

Leur inspiration, cette phrase de Thomas Jefferson, devenue leur devise« Lorsque l’injustice devient loi, la résistance devient devoir. » Une injonction qu'ils ont prise à la lettre en créant cette plateforme. Le groupe vous rappellera peut-être l'armée de Dumbledore dans le roman de J.K. Rowling, comme le souligne Le Figaro Etudiant. Créée par Harry Potter, cette armée prend des cours de défense afin de combattre Voldemort.

Des outils contre l'impuissance 

Seule la moitié des 18-29 ans a voté lors de l'élection présidentielle américaine de 2016, alors que le taux de participation national est de 58%. Une participation faible qui ne traduit cependant pas forcément un désintérêt, comme l'ont démontré les centaines de manifestations anti-Trump qui ont proliféré sur les campus américains durant les premières semaines de son mandat. À l'image des manifestants, les fondateurs de l'école de la résistance n'ont pas voulu se résoudre à leur impuissance. 

Joseph L. Breen, cofondateur, a en effet confié au journal de l'université The Crimson que l'idée leur était venue après avoir discuté de la manière dont ils pouvaient faire face à Trump. "Nous pensions qu'il y avait beaucoup d'étudiants qui voulaient s'engager dans l'activisme politique mais qui n'avaient pas les bons outils pour le faire", a-t-il ajouté. 

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« Lorsque l’injustice devient loi, la résistance devient devoir. », Thomas Jefferson. Capture d'écran du site resistanceschool.com 

"Comment communiquer nos valeurs en matière de plaidoyer politique" 

6.500 étudiants répartis dans les 50 états américains et à travers le monde se sont inscrits pour assister à la première session, alors que 15.000 l'ont visionnée en direct, selon Quartz.com. "Comment communiquer nos valeurs en matière de plaidoyer politique", voilà l'objet de ce premier cours, donné par Timothy McCarthy, qui a soutenu le projet dès le début. Durant sa conférence, McCarthy abreuve ses étudiants de conseils. Du deuxième discours d'investiture d'Abraham Lincoln à la "Déclaration de Sentiments" de la Convention de Seneca Falls, une première pour le droit des femmes aux Etats-Unis, il leur recommande ses indispensables.

La deuxième leçon a eu lieu mercredi 12 avril. Sara El-Amine, directrice exécutive d'Organizing for Action (OFA) - un mouvement d'appui à Barack Obama, fait remarquer Le Monde -, a répondu à la question "Comment mobiliser et organiser nos communautés?". 

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Résumé du deuxième cours donné par Sara El-Amine. Capture d'écran du site resistanceschool.com.

Créer un véritable mouvement 

Dans la pratique, il s'agit de quatre semaines de cours donnés par des professeurs prestigieux. Les vidéos sont retransmises en direct sur YouTube et sur les réseaux sociaux. Le site encourage les participants à s'inscrire en groupe plutôt qu'individuellement, afin d'entretenir une dynamique qui se veut avant tout collective. Un avis partagé par McCarthy, pour qui il s'agit d'un "mouvement": "les écoles sont propices à l'échange intellectuel, à la transformation sociale, et oui, si nécessaire, à la résistance politique" a-t-il confié au Crimson.

Au-delà de la simple résistance au nouveau président, il s'agit donc de créer un véritable mouvement pour permettre à ceux qui le souhaitent de s'engager en politique et, surtout, de s'organiser.

 

Victoria David 

 

 

 

Qui est Neil Gorsuch, le nouveau juge de la Cour suprême?

Plus d'un an après la mort d’Antonin Scalia, juge conservateur de la Cour suprême américaine, le Sénat américain vient de confirmer la nomination de Neil Gorsuch pour occuper le siège vacant.

Un juge conservateur

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Neil Gorsuch s'exprime après sa nomination, mardi 31 janvier. (CNBC)

À 49 ans, ce juge fédéral à la cour d’appel du Colorado (dixième circuit), avait tous les atouts pour séduire l’establishment républicain.

Nommé en 2006 par le Président George W. Bush, il avait été confirmé sans opposition par le Sénat. Réputé conservateur, le juge s’est notamment fait connaître par son soutien à la décision Burwell v. Hobby Lobby en 2013.

Dans cette décision en appel, la cour avait jugé que les chefs d’entreprise pouvaient utiliser des motifs religieux afin de refuser de fournir des moyens de contraception à leurs employées, comme les y obligeait l’Obamacare. La Cour Suprême avait par la suite validé ce jugement.

Rétablir la majorité conservatrice

Neil Gorsuch restaure la majorité conservatrice de la Cour, avec cinq juges conservateurs contre quatre plus libéraux. Campant des positions similaires à celles de Scalia quant à l’interprétation de la Constitution, Gorsuch serait néanmoins plus ouvert au dialogue avec ses collègues.

Avoir choisi un juge jeune n’est pas anodin pour Donald J. Trump. Gorsuch pourra siéger à la Cour pendant plusieurs décennies. Fidèle aux valeurs républicaines mais moins clivant que le juge défunt, le nominé de Donald Trump semble être un choix sage, qui a été applaudi dans les rangs républicains dès sa nomination.

Une confirmation compliquée 

Les sénateurs démocrates, agacés par le comportement de leurs collègues républicains l’année dernière, ont essayé de faire échouer sa confirmation. 

En mars dernier, les républicains avaient en effet refusé d’examiner la nomination de Merrick Garland par Barack Obama. Une décision controversée qui avait poussé le New York Times à parler, en janvier, de nomination « illégitime » de la part du Président Trump.

En minorité au Sénat – la chambre se composant de 48 sièges démocrates contre 52 sièges républicains –, les démocrates ont utilisé leur unique arme: le filibuster (ou obstruction), consistant à rallonger le débat parlementaire. Il fallait alors 60 sénateurs aux républicains pour passer outre, un nombre presque impossible à atteindre.

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Neil Gorsuch, aux côtés de Mitch McConnell, leader de la majorité républicaine au Sénat qui a enclenché "l'option nucléaire" jeudi 6 avril. (AP Photo/ J. Schott Applewhite) 

 

Recours à "l'option nucléaire"

Ces derniers ont donc décidé jeudi 6 avril de mettre leurs menaces à exécution en ayant recours à "l'option nucléaire", qui consiste à modifier le règlement intérieur du Sénat. Comment? En abaissant le seuil nécessaire pour passer outre l'obstruction de 60 à 50 sénateursIls ont ainsi pu confirmer la nomination de Neil Gorsuch et se passer de l'accord des démocrates ce vendredi 7 avril.

Les démocrates devraient payer cette obstruction au prix fort puisque cette modification aura probablement des conséquences à long terme. Outre faciliter les futures nominations du président dans les années qui viennent, c'est un changement du fonctionnement du Sénat auquel nous devrions assister. Jusqu'ici considéré comme favorisant le travail entre les deux camps, le Sénat pourrait, à l'image de la Chambre des représentants, devenir plus partisan, cela favorisant ainsi "des nominations plus idéologiques," selon Nina Totenberg.

Supreme Court Associate Justices Anthony Kennedy testifies on Capitol Hill in Washington, Monday, March 23, 2015, before a House Committee on Appropriations subcommittee on Financial Services hearing to review the Supreme Court's fiscal 2016 budget request. (AP Photo/Manuel Balce Ceneta)

Le Juge Anthony Kennedy au Capitole le 23 mars 2015. (AP Photo/ Manuel Balce Ceneta)

Neil Gorsuch pourrait ne pas être le seul juge nominé par Donald Trump pendant sa présidence. Anthony Kennedy, juge conservateur de la Cour, avec qui Gorsuch a par ailleurs travaillé, pourrait saisir l’opportunité pour prendre sa retraite, comme le souligne le Washington Post. Il donnerait la possibilité à l’Administration Trump de s’assurer d’un deuxième siège conservateur pour plusieurs années et ainsi de sécuriser la majorité conservatrice de la Cour.

Victoria David

Eviter Trump pendant une semaine ou comment tirer les leçons d'une overdose médiatique

Farhad Manjoo, journaliste au New York Times, s'est lancé un défi de taille: ne pas entendre parler de Donald J. Trump dans les médias pendant une semaine. "Je voulais voir ce que je pourrais apprendre sur les médias modernes en y observant l'omniprésence de M. Trump," raconte-t-il dans un article publié le 22 février.

"Inévitable"

Ce qui devait d'abord ressembler à un défi personnel pour ce journaliste passionné s'est transformé en une tâche presque impossible dans la pratique, tant le 45ème président des Etats-Unis est partout. "D'une certaine manière, mon expérience a échoué: je ne pouvais quasiment pas trouver d'article sans Trump," reconnait Manjoo.

Selon lui, la couverture médiatique du businessman devenu président a atteint des niveaux sans précédent. En cause: Trump, évidemment, mais aussi les réseaux sociaux et le comportement des médias.

"Je me suis demandé si nous n'étions pas en train de surdoser Trump, à l'exclusion de tout le reste," remettant en question son propre comportement. Une réflexion qui avait déjà émergé durant la campagne présidentielle puisque cette attention médiatique lui avait largement servi de publicité gratuite.

Donald J. Trump est dans tous les journaux, qu'ils soient politiques ou pas. Pour le journaliste, Trump n'est plus seulement le message, il est devenu le moyen par lequel toutes les histoires sont racontées. Il est devenu "inévitable".

Point commun entre Amazon, le Bachelor et la NBA

Afin d'éviter d'avoir à faire au locataire de la Maison Blanche, Farhad Manjoo s'est tourné vers des sites internationaux comme la BBC ainsi que des sites spécialisés, tout en continuant de consulter les réseaux sociaux. Mais, même en utilisant ces plateformes, difficile d'échapper au businessman. "Et sa présence ne s'arrête pas à l'actualité".

Du Bachelor à Amazon - qui lui suggère l'achat de papier hygiénique à l'effigie de Donald Trump pour la Saint-Valentin - en passant par la série The Big Bang Theory, les Grammys, les Golden Globes, le Super Bowl et la NBA, rien ne lui résiste. Seuls Instagram et Snapchat semblent plus imperméables aux aventures du milliardaire.

La personne la plus "connue" de l'histoire?

Mark Wilson:Getty Images

Photographes rassemblés autour de Jeff Sessions et Charles E. Grassley le 29 novembre au Capitole. Mark Wilson/ Getty Images. 

Selon Farhad Manjoo, "il est probable que personne n'ait été aussi connu que M. Trump aujourd'hui". Si cette affirmation est difficile à prouver, la comparaison de quelques chiffres permet néanmoins au journaliste du Times de parvenir à un résultat presque inquiétant: la couverture médiatique de Trump dépasse à elle seule d'environ 1000 dollars celle des 1000 personnes les plus connues rassemblées.

Un volume insoutenable

Bien que reconnaissant qu'il est essentiel de traiter en profondeur les actions de la nouvelle administration, l'article pointe du doigt l'amplification créée par l'écosystème médiatique: "Trump ne représente pas 90% de ce qui est important dans le monde". D'autant plus qu'il n'est président que depuis un mois.

Un rythme qui parait donc difficilement tenable pendant le reste du mandat selon le journaliste, qui pense que la scène médiatique ne doit surtout pas se cantonner à un seul sujet.

"Les journaux des Première et Deuxième Guerres Mondiales étaient remplis de sujets n'ayant pas trait à la guerre. Les journaux d'aujourd'hui comprennent eux aussi de nombreux articles qui ne sont pas reliés à Trump, mais beaucoup d'entre nous ne lisent plus les journaux. Nous lisons Facebook, nous regardons la télé, et là, M. Trump est ce dont tout le monde parle, en excluant presque tout le reste."

Eviter Trump pendant une semaine c'est donc réaliser l'overdose du personnage dans les médias et se rendre compte de l'urgence d'un changement de son traitement médiatique. Dans un contexte de rejet des médias et d'attaques constantes envers les journalistes, les pratiques journalistiques sont plus que jamais scrutées.