Au dernier étage du Brooklyn Museum, à New York, se déroule en ce moment l'exposition Disguise. Les oeuvres d'une vingtaine d'artistes sont réunies pour explorer le thème de l'identité à travers un élément clé: le masque africain.
Longtemps utilisés en Afrique pour représenter l'identité d'un individu, les masques ont été, avec la colonisation, sortis de leur contexte d'origine pour devenir des objets d'art. Avec Disguise, le masque devient sculpture, mais pas seulement: il est aussi peinture, photographie, vidéo, danse ou encore performance artistique.
Au coeur de la ville multiple et multiculturelle qu'est New York, l'exposition tente de répondre à une question parfois difficile: comment définir son identité? Et, surtout, peut-on la définir?
L'identité, c'est une question qui a toujours travaillé Brendan Fernandes. Cet artiste Kenyan et Indien, qui a grandi au Canada avant de venir s'installer aux Etats-Unis, utilisait depuis longtemps les masques dans ses oeuvres. C'est donc tout naturellement que les conservateurs du musée lui ont proposé de faire partie du projet.
"Ce qui m'intéresse avec les masques," explique-t-il, "c'est qu'ils peuvent à la fois créer une identité, ou cacher une identité. Leur rôle est multiple, on n'est jamais vraiment sûr de ce que l'on voit."
La multiplicité se ressent aussi dans les matériaux et médias utilisés par Brendan Fernandes. Au sol, des sculptures de biches portant des masques africains semblent fixer, sur l'un des murs, une installation de trois masques qui clignotent. L'artiste présente aussi une série de quatre dessins représentant des animaux masqués, ainsi qu'une vidéo.
"Utiliser différentes techniques me rend plus libre," dit-il. "Les concepts, les idées sont au coeur de mon travail. C'est ce que je veux mettre en avant. La technique n'est qu'un moyen pour faire passer l'idée. Je ne me limite donc pas à une sorte d'art. Au contraire, la pluralité m'intéresse."
Le travail de Brendan Fernandes reflète en effet sa propre interprétation de l'identité: une identité en mouvement, jamais fixe, parfois difficile à cerner. Ainsi, le clignotement des masques lumineux n'est pas aléatoire. C'est en fait un code en morse, indéchiffrable pour le visiteur. Quant aux biches, elles semblent perdues: "C'est comme si elles se demandait "on va où?" Mon idée c'est que, justement, on n'est jamais sûr de savoir où aller."
Disguise réunit des voix différentes autour d'une même idée, d'une même réflexion. Cela donne une exposition riche et foisonnante, qui, finalement, n'apporte une seule réponse, mais propose, explore et cherche - et on en sort peut-être avec plus de questions que quand on y est rentré.
Disguise: Masks and Global African Art
Brooklyn Museum - Brooklyn, New York
Jusqu'au 18 septembre.
Texte: A.P.
Photos: Paul Markovic