Discours historique de Barack Obama sur l'état de la politique américaine

Barack Obama à Springfield, dans l'Illinois. (Photo Mandel Ngan,/AFP)

C'est sans doute le jugement le plus dur qui ai été posé par un président en exercice sur la campagne présidentielle en cours. Le discours de Barack Obama face à l'Assemblée Générale de l'Illinois avait pourtant commencé de manière anodine. A l'endroit même ou il avait déclaré sa candidature à l'élection présidentielle il y a neuf ans, Barack Obama se félicite de son bilan. "Je suis convaincu que les Etats-Unis sont dans un meilleur état maintenant que lorsque je suis devenu président."

Puis, au détour d'une phrase, le ton change. "Dans un an, je porterai le titre le plus important de tous: Celui de citoyen". Barack Obama abandonne l'angélisme américain habituel ("America, the greatest democracy in the world") et livre une analyse vaste et sévère sur l'état actuel de la politique américaine.

On espère que les candidats à l'élection présidentielle, qui s'écharpent avec une intensité jamais atteinte cette année, étaient devant leur poste.

Voici une sélection des meilleurs extraits.

Sur la montée des discours extrémistes: "Nous devrions avoir un sentiment d'unité. Mais aujourd'hui, cette citoyenneté est menacée par un climat politique empoisonné qui pousse les gens à s'éloigner de notre vie politique. Ca les décourage, ça les rend cyniques. Et face à ça, des voix plus puissantes et plus extrêmes comblent le vide."

 

Sur la puissance de l'argent en politique: "Je ne crois pas que l'argent soit une parole."

Le président fait référence à la déclaration de la Cour Suprême selon laquelle "Money is speech", c'est à dire que la dépense d'argent en politique est protégée par le Premier Amendement sur la liberté d'expression. Barack Obama s'est beaucoup étendu sur le sujet. "L'argent de quelques uns ne devrait pas noyer la parole de tous les autres."

 

 

Sur les découpages électoraux frauduleux: "Les électeurs doivent choisir leurs politiciens, les politiciens ne doivent pas choisir leurs électeurs."

Le gerrymandering, le découpage électoral frauduleux, est une grande tradition américaine (nous y avons consacré un ample article à cette adresse). Il existe toujours des districts, démocrates et républicains, dont la forme évoque des "spaghettis", créés spécifiquement pour regrouper ou disperser certaines catégories d'électeurs et assurer des réélections. "Personne n'a les mains propres" reconnaît le président.

 

Sur les disputes partisanes: "On ne peut pas avancer si l'on ne fait que se détruire mutuellement."

Les allusions de Barack Obama a la campagne présidentielle en cours étaient à peine voilées quand il mentionne son dégoût pour la politique des insultes, et les mensonges.

La division de plus en plus féroce de la politique américaine entre démocrates et républicains est sans doute le point auquel Obama a consacré le plus de temps. Le président a défendu le compromis politique, expliquant que travailler en commun avec les républicains "ne faisait pas de lui un traître à son propre parti". "Si l'on ne peut pas faire de compromis, par définition, on ne peut pas gouverner!"

 

Sur la participation en politique: "Faisons du pays de Lincoln un leader dans la participation politique!"

Pendant son discours, Obama a longuement évoqué le parcours d'Abraham Lincoln, le héros des droits civiques et de la fin de l'esclavage aux Etats-Unis.

Il a aussi dessiné la voie pour une participation plus intense des électeurs aux élections américaines, liant de près son discours aux aspirations des jeunes électeurs de Bernie Sanders et reprenant même un élément de langage du socialiste. "Si 99% des gens votaient, l'argent des 1% ne compterait pas autant!"

 

Enfin, sur son propre bilan: "Je regrette de n'avoir pas limité la méchanceté en politique".

Barack Obama ne s'est pas épargné, un partie de son discours est un mea culpa, dans lequel il reconnaît sa responsabilité. Après tout, c'est après huit ans de sa présidence qu'une des campagnes les plus agressives de l'Histoire américaine se déroule.

Mais Barack Obama reste bel et bien l'homme des déclarations enthousiastes et pleines d'espoir. Dans une touche finale à ce discours très dur, il rappelle son propre parcours et conclu. "9 ans après avoir déclaré ma candidature à la Présidence ici même, je crois toujours en une politique de l'espoir."

Publié par France 2 Washington / Catégories : Non classé