Le gouvernement dévoilera mercredi 14 mars son projet de réforme de la SNCF. En Italie, où la concurrence sur le marché ferroviaire existe depuis 2012, deux compagnies se partagent les rails : Trenitalia (public) et Italo (privé).
C'est le seul TGV privé d'Europe : depuis 2012, ses rames couleur bordeaux circulent à 300 km/h sur les voies à grande vitesse de la péninsule. Italo, c'est son nom, y croise les TGV de TrenItalia, la compagnie publique. Une bataille du rail bien visible dans toutes les grandes gares d'Italie. Avec 75% d'occupation dans ses trains, les rames d'Italo sont bien remplies.
40% de baisse sur les prix en moyenne
Les clients sont séduits par des prix souvent plus bas que ceux de la SNCF italienne. "Sur ce trajet, je paye 30 euros de moins que le prix moyen du billet", explique une passagère. Pour cet autre passager, "le rapport qualité-prix est meilleur que dans les trains publics". La compagnie publique a été contrainte de s'aligner.
En Italie, l'arrivée de la concurrence a ainsi fait baisser les prix des billets TGV de 40% en moyenne. Dans ce train privé, il y a quatre classes au lieu de deux. Il dispose de classes de luxe "Club", avec de petits compartiments très prisés par les hommes d'affaires qui veulent faire des réunions, ou par les familles avec des enfants. "On se sent comme à la maison, c'est très relaxant. Il y a même des écrans pour les enfants", assure une usagère. La compagnie propose aussi une classe business "Prima", avec service à bord et des sièges larges, une classe "Confort", aménagée comme la "Prima" mais sans le service et enfin une classe économique, la "Smart".
Des débuts difficiles pour Italo
En 2015, la SNCF, qui possédait 20% des parts d'Italo renonce et change de voie. L'entreprise italienne est alors au plus bas : trois ans d'activité sur les rails de la péninsule, 20% du marché ferroviaire italien mais des comptes en banque toujours dans le rouge. Les trains privés essuient un échec à hauteur de plus de 200 millions d'euros de pertes en 3 ans. Italo a formulé un appel de fonds pour acheter de nouveaux trains. La SNCF, jugeant cette décision prématurée, a préféré se retirer.
Finalement, cette levée d'investissements a permis à Italo de redéfinir sa stratégie commerciale et les ventes reprennent. En 2016, ses bénéfices doublent et les voyageurs sont de plus en plus nombreux à choisir ses trains bordeaux. En 2017, Italo transporte 13 millions de personnes.
Évoluer sur un marché ouvert à la concurrence a forcé Italo et Trenitalia a proposer plus de services et à des prix plus compétitifs. Après des années difficiles pendant lesquelles Italo perdait beaucoup d'argent, la compagnie en gagne à présent : aujourd'hui, elle contrôle 35% du marché du TGV en Italie.
En février 2018, la compagnie italienne a été rachetée pour près de 2 milliards d'euros par le fonds américain GIP (Global Infrastructure Partners), plus grand fonds spécialisé dans les infrastructures du monde. Des armes en plus pour l'entreprise privée dans cette guerre des prix face à Trenitalia.
Et pour la France ?
Les premiers trains privés à circuler en France sont les trains Thello, qui joignent depuis 2011 Marseille à Milan et Venise à Paris. A partir de décembre 2020, le monopole public pour les trains à grande vitesse sera levé en France et tout un nouveau marché s'ouvrira aux compagnies privées, dont Italo.
Les trains rouges-bordeaux pourraient devenir des sérieux rivaux pour nos TGV et arriver en France d'ici trois ans. Italo a obtenu ce mois-ci un "passeport" lui permettant d'accéder aux rails britanniques et il a déjà montré son intérêt pour les chemins de fer français.