« Vous allez devoir affronter toute une série de situations » les enfants sont prévenus, ils vont vivre une expérience pas comme les autres, celle de la migration. Dans un collège romain, les enseignants misent sur le jeu de rôles pour faire comprendre à leurs élèves les conditions de vie des migrants. Pendant 1h30, les adolescents interprètent trois personnages, trois réfugiés arrivant d'Afrique et d'Asie. Traversée en bateaux avec des passeurs ou contrôles de police à l'arrivée, les ateliers sont pensés pour être aussi réalistes que possible .
Le « voyage » commence par la répartition des rôles. Les enfants sont incités à s'approprier leur personnage. Le premier groupe joue le rôle de Patricia, 24 ans, originaire du Nigeria. Une jeune femme contrainte de quitter son pays après la fuite d'un pipeline rendant ses terres impropres à la culture et donc à la vie sur place. Le deuxième, Abshir, est un journaliste somalien forcé de fuir après avoir révélé un cas d'injustice environnementale liée à l'élimination de déchets toxiques. Le dernier groupe interprète le rôle de Mahmud, un petit propriétaire terrien originaire du Bangladesh, contraint de quitter son pays pour des raisons économiques. Des personnages fictifs mais inspirés d’histoires vraies.
Une méthode pédagogique insolite
Des passeurs viennent chercher les enfants, yeux bandés. Ils les emmènent dans une salle sombre et leur ordonnent de monter dans un bateau gonflable. « Vous ne devez rien dire à personne sinon on s’en prendra à votre famille ». Les passeurs se prennent vraiment au jeu, les enfants aussi. Alessio, 11 ans parle à la première personne : « je me suis fait arrêter, j’ai peur qu’ils me fassent du mal ». Mais quand on lui demande s’il a peur, l’enfant répond avec le sourire : « je sais que nous sommes dans un jeu ». Le parcours continue au commissariat, des policiers procèdent à un interrogatoire et relèvent même les empreintes digitales des enfants.
Une méthode pédagogique qui peut étonner mais qui semble amener une réelle prise de conscience.« La vie des migrants est très dure, la nôtre est beaucoup plus facile », confie Andrea, 11 ans.« Donner à ces enfants la possibilité de vivre à la première personne l'histoire d'un migrant, ça a un impact beaucoup plus fort que n'importe quoi d'autre », affirme Valentina Di Odoardo, responsable du projet « Planète migrants ».
Ce jeu de rôle crée par l'organisation CIES, co-financé par l’Union européenne, a déjà été expérimenté dans dix écoles de Rome. Il sera bientôt testé dans toutes les écoles d’Italie, mais aussi dans d’autres pays européens.