Six semaines, 1,7 million de machines à voter ou encore 56 hélicoptères, c’est, entre autres, ce que nécessite l'organisation des élections législatives indiennes. Débutées le 11 avril dernier, ces élections doivent permettre aux Indiens de renouveler les 543 sièges de leur Assemblée nationale, la "Lok Sabha".
Des confins de l'Himalaya aux plages de Goa, de New Delhi à Bangalore, près de 900 millions de citoyens sont appelés aux urnes dans la démocratie de la démesure.
La plus grande démocratie du Monde
Avec ses plus de 3 millions de kilomètres carré, l'Inde a dû trouver un processus électoral démocratique organisable dans tout le pays. C'est donc un scrutin "uninominal majoritaire à un tour" qui a été choisi. Chaque citoyen vote pour un candidat. Celui récoltant le plus de voix dans son État est élu au Parlement. Puis, ce sont les députés qui élisent le nouveau Premier ministre.
Faire consensus est déjà complexe, mais par sa taille, l'Inde rend ce défi utopique. En réalité, il est quasiment impossible pour un parti d'obtenir la majorité des sièges. Lors des élections de 2014, 1700 partis avaient proposé au moins un candidat. Si dans de nombreux cas cela représente uniquement une occasion de faire passer des idées, il est obligatoire pour chaque parti aspirant à gouverner de négocier des alliances avec des partis régionaux. Ces tractations débutent avant les élections, durent pendant celles-ci et s'achèvent bien après le dépouillement. Le but : former un groupe suffisamment nombreux pour s'entendre sur le nom du futur Premier ministre
En l'état, l'échiquier politique indien ne devrait pas être bouleversé par ces élections. L'Alliance Démocratique Nationale (NDA) guidée par Narendra Modi, Premier ministre sortant, et l'Alliance Progressiste Unie (UPA) menée par Rahul Gandhi sont données en tête. Elles resteraient alors les deux forces majoritaires du pays.
Une organisation millimétrée
Défendant son statut de "plus grande démocratie du Monde", l'Inde s'est dotée d'un code électoral, particulièrement pointilleux. Face à l’immensité du sous-continent, les organisateurs ont trouvé la parade. Ce sont les urnes qui se déplacent jusqu’aux électeurs, et même dans les zones les plus reculées : il est ainsi interdit qu’un Indien se trouve à plus de deux kilomètres d’un bureau de vote. Tenir cette règle relève d’une prouesse. Pour s’y astreindre, il a fallu, dans certains villages, installer des urnes pour une dizaine d’habitants.
Cette année, 10 millions de personnes sont engagées par la commission électorale pour veiller à la mise en place et à la surveillance des votes. L’organisation nécessite également l’utilisation de 570 trains et 56 hélicoptères pour transporter les urnes.
Entre le 11 avril et le 19 mai prochain, près de 900 millions de personnes doivent pouvoir voter. La Commission suit donc un calendrier précis, dans lequel il a fallu calquer les meilleures dates de vote en fonction des jours de récoltes ou des festivités propres à chaque région.
En ce lundi 29 avril, date de la quatrième phase de vote, neuf États s’expriment, avec notamment le Maharastra où se trouve Bombay. La capitale, New Delhi, elle, votera lors de la prochaine et avant-dernière phase de vote, prévue le 12 mai.
Au-delà du calendrier, donner la chance à chaque citoyen d'exprimer sa voix s'apparente parfois à un défi. Dans certaines zones reculées, le personnel de la Commission se déplace en chameau voire à dos d'éléphant. Et une fois que tout le monde a pu voter, le travail n’est pas terminé. Il faut encore comptabiliser chaque voix : un autre chantier chronophage. Finalement, le scrutin rendra son verdict le 23 mai.
Mathis Lescanne