Greenpeace, tout comme 9000 autres ONG, est dans le viseur du gouvernement indien. La célèbre organisation environnementale est menacée de fermeture, officiellement pour mauvaise gestion et non respect de la loi indienne. Mais c’est en fait un immense bras de fer qui se joue entre les autorités publiques, qui prônent la croissance à tout prix, et ces défenseurs de l’environnement, accusés de freiner le développement économique du pays.
Pour Greenpeace, c’est évident, « le gouvernement indien a cherché des fautes dans presque tous les projets que nous menons » affirme Divya Raghunandan, directrice de programmes Greenpeace en Inde. Exemple de campagne qui fâche : celle que l'ONG a menée contre l’extraction de charbon dans la forêt de Mahan, dans l’Etat du Madhya Pradesh. Greenpeace et les villageois voulaient sauver la forêt, le gouvernement voulait favoriser ses industries.
Pour le premier ministre de l’Inde, le très « pro-business » Narendra Modi, il n’est pas question qu’une ONG entrave ses ambitions industrielles. Nucléaire, exploitation pétrolière, barrages, à chaque projet, le gouvernement et les organisations s'opposent.
A tel point qu’en 2014, un rapport secret du Bureau de l’Intelligence indien qualifiait les ONG « d’anti-développement ». « De telles organisations internationales ont redoublé d'efforts pour encourager des campagnes qui “retardent le développement” de l'Inde, en pointant du doigt le secteur industriel (avec des campagnes contre le charbon, contre l'uranium et contre l'exploration de pétrole), les OGM, le changement climatique, et le nucléaire » lit-on dans ce rapport, dévoilé par la presse indienne.
Aujourd’hui, Greenpeace est menacée de fermeture. Officiellement, la raison invoquée par le gouvernement est la mauvaise gestion financière de l’organisation. Résultat, ses comptes bancaires ont été gelés, et aucune aide financière extérieure n’est autorisée. Si rien n’est fait, l’ONG pourrait fermer sa filiale indienne d’ici à la fin du mois de mai. Mais c'est évidemment sans compter sur les membres de l'organisation. « Nous sommes Greenpeace, nous ferons autant de bruit que possible », poursuit Divya Raghunandan.
Les ONG, un symbole d'ingérence politique ?
Mais, Greenpeace est loin d’être la seule visée. Sur le territoire indien, 9000 ONG sont concernées : des organisations environnementales bien sûr, mais aussi celles du secteur humanitaire comme Médecins Sans Frontières (MSF). Dès 2008, l'organisation a reçu des avertissements lors des campagnes de soins à destination de tribus vivant sous contrôle des Naxalites, des rebelles communistes traqués par le gouvernement. Le gouvernement refuse que des instances internationales s’immiscent dans ses affaires internes.
L’Inde ne veut pas non plus que ses faiblesses soient montrées du doigt, étalées par les ONG sur la place publique. « Pendant très longtemps, les discriminations de castes, les droits humains et les grands chantiers étaient des thèmes de choix pour les organisations internationales qui cherchaient à discréditer l’Inde », lit-on encore dans le rapport de 2014.
Ses problèmes, l’Inde veut les régler seule et à sa manière.