Dans l’ombre de la guerre syrienne, le martyr de Foua et Kafraya

Ces deux villages chiites étranglés par la rébellion ont bénéficié de la reprise d’Alep par le régime.

Le 19 décembre, alors que l’évacuation des quartiers d’Alep-Est reprenait péniblement son cours, une dizaine d’autocars quittaient les villages de Foua et Kafraya, deux localités assiégées par les rebelles dans la province d’Idlib, au nord de la Syrie. A leur bord, des civils blessés, malades ou tout simplement à bout de forces.
La veille, leur départ avait été contrarié par des hommes en armes, probablement des combattants islamistes, qui incendièrent les véhicules devant servir à leur transport. Cette action a entrainé la suspension de l’accord sur Alep, retardant de plusieurs heures l’exfiltration des groupes rebelles et de leurs familles de l’ultime enclave sous leur contrôle. Il a fallu attendre une condamnation officielle de l’armée syrienne libre (ASL) pour clore l’incident.
En apparence anodin, le sort de Foua et Kafraya constitue une ligne rouge pour l’Iran, principal allié du régime d’Assad avec la Russie. Ces deux villages, largement peuplés de musulmans chiites, ont déjà fait l’objet d’un marchandage aux allures de transfert de population. A deux reprises - la dernière fois en septembre dernier -, des civils y ont été évacués en échange du départ de rebelles ou de leurs proches de la ville de Madaya, près de la frontière libanaise, encerclée par le régime.
Ce genre de négociations pourrait être amené à se reproduire dans d’autres secteurs de la Syrie où les rebelles sont en difficulté, à l’instar du Wadi Barada, au nord-est de Damas. Cette région, qui alimente en eau potable la capitale syrienne, est aussi essentielle pour le Hezbollah libanais qui y fait transiter ses convois. Les forces pro-Assad y mènent une violente offensive depuis la reconquête d’Alep.
Crise humanitaire
Soumises à un blocus quasi hermétique depuis l’offensive, en 2012, des djihadistes de Fatah al-Sham (ex-Front al Nosra) contre la province d’Idlib, Foua et Kafraya sont présentées comme les deux villes oubliées du conflit syrien. Nourriture et médicaments y sont une denrée rare, en quantité bien trop insuffisante pour subvenir aux besoins de ses 20.000 habitants.
Comme à Madaya, la famine guette. Selon des sources pro-régime, le désastre humanitaire qui règne à Foua et Kafraya a entrainé la mort de 2.200 personnes, dont près de 400 enfants. Sur les réseaux sociaux, de nombreuses photos montrant des hommes et des femmes rachitiques illustrent cette tragédie. Les partisans d’Assad en ont fait leur principal argument pour dénoncer les exactions des rebelles.
En novembre dernier, l’armée syrienne, aidée par des milices populaires, a tenté de desserrer l’étau autour de ce deux localités. Mais l’opération a été repoussée à une trentaine de kilomètres de son objectif. En représailles, comme à chaque fois que les quartiers est d’Alep étaient bombardés, des groupes rebelles ont lourdement pilonné Foua et Kafraya. Des milliers d’obus et de roquettes y auraient été tirés ces derniers mois, rajoutant au calvaire de la population.

 

Publié par france2middleeast / Catégories : Syrie