Vendredi soir, un jeune demandeur d’asile a été victime d’une agression raciste à Croydon, un quartier du sud londonien. L’adolescent de 17 ans, Reker Ahmed, a été gravement blessé à la tête mais ne serait plus entre la vie et la mort. Cet acte s’inscrit dans la lignée d’une augmentation considérable des crimes xénophobes depuis le vote du Brexit en juin dernier.
Scolarisé et sous l’autorité d’un tuteur légal, l’adolescent kurde iranien se trouvait à un arrêt de bus près du bar The Goat à Croydon avec deux amis lorsqu’il a été abordé par un groupe d’une dizaine de personnes. C’est lorsque ses agresseurs ont découvert son statut de demandeur d’asile qu’ils ont commencé à le battre jusqu’à ce que la police intervienne.
Si ses deux amis ont réussi à s’enfuir indemnes, l’adolescent n’était plus conscient à la suite des coups qu’il a reçus et souffrait de fractures au crâne et à la colonne vertébrale ainsi que d’un hématome au cerveau. Son état serait désormais stable et il serait sorti ce lundi des soins intensifs.
Pour insister sur la violence de l’agression, Jane Corrigan, inspectrice en chef, a rappelé sur la chaîne BBC que les crimes d'une telle violence restaient rares. « Je n’ai pas vu une agression de cette nature depuis très longtemps, et c’est très bouleversant. », a-t-elle précisé.
Après plusieurs appels à témoins, les enquêteurs de la MET – police du Grand Londres - ont pu arrêter treize personnes impliquées dans l'agression. Tous comparaîtront devant le Tribunal de Croydon le 2 mai prochain (BBC).
Cet acte de violence illustre un climat de xénophobie toujours plus pesant depuis la campagne sur le Brexit. Pour rappel, en février, la police londonienne recensait déjà 3356 délits racistes depuis le 23 juin dernier, jour du référendum sur le Brexit, avec une augmentation de déjà 20% entre avril et juin 2016. Le mois de juillet 2016 enregistrait d’ailleurs un nombre de crimes xénophobes au Royaume-Uni presque deux fois plus haut (+41%) qu'en juillet 2015.
Le fait divers a donc pris une tournure politique, notamment avec les accusations portées par Diane Abbott, ministre de l'Intérieur travailliste du cabinet fantôme, contre le gouvernement conservateur qu'elle juge responsable de ce racisme croissant. Selon elle, ce n’est « malheureusement pas un incident isolé mais qui fait partie d’une augmentation considérable des crimes racistes auxquels le gouvernement conservateur ne peut encore apporter de réponse efficace. »
Et d’ajouter : « Avec des politiciens d’extrême droite partout dans le monde qui prennent pour bouc émissaire les migrants, les réfugiés et autres pour justifier leurs problèmes économiques, nous assistons à une hausse profondément inquiétante des politiques attisant la haine. »
Sur la chaîne britannique SkyNews, elle n’a également pas hésité à dénoncer le Brexit pour justifier cette recrudescence des délits racistes. « La majorité de la campagne du Brexit a été menée autour de la peur des migrants, ce qui est maintenant reflété dans l’augmentation de ces crimes. », a-t-elle affirmé.
Chris Philp, député conservateur du Sud de Croydon, a réagi en déclarant qu’il était « méprisable » de blâmer le référendum pour expliquer l’agression.
De son côté le maire de Londres, Sadiq Khan, s’est exprimé sur Twitter en rappelant que « les crimes racistes n’ont pas leur place à Londres, en Grande-Bretagne ou ailleurs. » Selon lui, Londres est une ville où les différences ne sont « pas seulement acceptées mais adoptées et célébrées. »
« Nos communautés ne seront pas divisées par ceux qui cherchent à attiser la haine. Et nous adopterons toujours une tolérance-zéro envers ces crimes », conclut-il.
Marine Clerc avec Matthieu Boisseau