La théorie des "immigrés contre les travailleurs britanniques" mise en pièces par 'Prêt à manger'

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C'est une affirmation que l'on a entendu très souvent ces derniers mois, aussi bien aux États-Unis que pendant la campagne du Brexit ou encore en ce moment pendant la campagne présidentielle française : les travailleurs immigrés piquent les emplois des ressortissants nationaux. 'Prêt à manger", le géant britannique de la restauration, - 250 magasins dans tout le pays - vient contredire une fois de plus cette théorie et montre que dans certains cas les travailleurs immigrés prennent les emplois que les nationaux ne veulent pas. Andrea Wareham, la directrice des ressources humaines du groupe a en effet déclaré que seulement 2% des candidatures viendraient de citoyens britanniques.

« Si je devais remplir tous nos postes vacants avec des employés britanniques, je ne pourrais pas le faire… à cause d’un manque de candidatures des nationaux », a-t-elle déclaré à la Commission des affaires économiques de la Chambre des Lords.

Cette statistique remet en évidence l’importance de la part des immigrés sur le marché du travail britannique et soulève des questions sur l’avenir de la chaîne une fois le Brexit acté… En effet, elle pourrait rencontrer des difficultés après le Brexit dans la mesure où 65% de ses employés non-britanniques viennent de pays membres de l’Union Européenne, rapporte SkyNews.

Ces chiffres rappellent à quel point les travailleurs étrangers et nécessairement européens constituent une part importante dans l’activité économique du Royaume-Uni. Ils font en effet écho aux 30% d’employés non-britanniques du secteur de la restauration et de l’hôtellerie, tout comme aux 35% d’agents d’entretien ménager (statistiques de l’Observatoire des migrations de l’Université d’Oxford). Les derniers chiffres montrent également que 11% du personnel du NHS – Service national de santé publique – et 26% des médecins du Royaume-Uni ne sont pas britanniques.

Pour rassurer les professionnels des domaines concernés, le ministre du Brexit, David Davis, a annoncé que la porte d’entrée du Royaume-Uni ne pouvait pas se fermer brutalement car cela va prendre « des années et des années » pour replacer des britanniques à des postes en grande partie occupés par des migrants, comme dans la santé, rapporte The Guardian.

Mais dans le cas de ‘Prêt à manger’, si la part des employés étrangers est importante, c'est aussi parce que les britanniques ne veulent pas postuler auprès du groupe, ce qui rend le Brexit d'autant plus inquiétant pour l'entreprise.

Pour autant, selon Andrea Wareham, une augmentation des salaires ne serait pas la solution pour attirer plus de candidatures britanniques. Elle estime en effet que l’entreprise offre « des carrières fantastiques » et rémunère déjà ses salariés à un niveau bien au dessus du salaire national de subsistance (qui consiste, depuis le 1er avril 2016, à augmenter de 7,5% le taux horaire du salaire minimum des plus de 25 ans).

Pour se préparer à une chute du nombre d'employés étrangers provoquée par la sortie du pays de l’Union Européenne, il faut selon elle savoir attirer les nationaux en changeant les mentalités et en redorant l’image de la restauration, notamment vis-à-vis de ses conditions de travail.

Quoi qu'il en soit, cet exemple vient conforter une fois de plus l'avis de nombreux économistes qui affirment que réduire l'immigration pour donner plus de travail aux nationaux et réduire le chômage ne fonctionne pas... d'autant plus dans un pays qui ne souffre pas véritablement du chômage (4,9% en juillet 2016).

Marine Clerc avec Loïc De la Mornais