Le parti populiste de Grande-Bretagne Ukip fait encore les gros titres cette semaine, au grand désarroi de Nigel Farage, son ancien leader, qui reprend temporairement ses fonctions. Celle qui lui avait succédé vient de démissionner, après 18 jours à la tête du parti. Deux jours plus tard, deux élus UKIP se sont battus au Parlement européen. Et ce lundi, la candidat favori à la direction du parti a jeté l'éponge. Le parti qui, sous l'impulsion de son leader charismatique Nigel Farage, a œuvré avec passion pour une sortie du Royaume-Uni de l’Union Européenne, semble aujourd’hui à bout de souffle.
Branle-bas de combat dans le parti qui, il y a trois mois encore, était le grand vainqueur du référendum sur l’appartenance à l’Union Européenne. L’Ukip de Nigel Farage avait alors réussi son pari : convaincre les Britanniques que la Grande-Bretagne n’a pas besoin d’appartenir à une union politique et recevoir des ordres de Bruxelles pour briller sur la scène internationale.
Très vite pourtant, les décisions prises par les membres du parti surprennent les électeurs. Nigel Farage le premier quitte le navire en juillet dernier, estimant avoir accompli son « ambition politique ». Cofondateur de l'UKIP en 1993, l’ancien trader de 52 ans avait fait d’une sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne son objectif ultime. Objectif atteint.
Après sa démission surprise, il lâche même une petite bombe et revient sur l'une des promesses de campagne des partisans de la sortie de l'Union Européenne. "C'était une erreur, confie-t-il, de promettre que l'argent que nous envoyons à l'Union Européenne servira à financer notre service de santé."
Premier coup dur pour le parti.
Le mois dernier, Diane James est élue à la tête du parti pour lui succéder. Députée européenne et porte-parole du parti pour les questions de politique intérieure, Diane James, 56 ans, semblait alors être le choix le plus judicieux. Si elle n'a pas le charisme de son prédécesseur, elle en partage néanmoins les idées fixes, notamment sur la nécessité de mettre fin à l'immigration européenne. Elle est par ailleurs perçue comme une source de stabilité et de sérieux pour le parti.
Nigel Farage et Diane James
4 octobre. Diane James démissionne de ses fonctions
Diane James entame pourtant la semaine des mauvaises nouvelles pour l'UKIP : après seulement 18 jours à la tête du parti, elle démissionne de ses fonctions pour des raisons "personnelles et professionnelles". Des rumeurs de désaccords au sein du parti font vite les gros titres de la presse britannique. Plusieurs cadres du parti avaient prévenu qu'elle ne semblait pas assez solide et non armée psychologiquement pour diriger un parti tel que l'UKIP.
Elle a d'ailleurs officialisé sa démission par le biais d'un communiqué :
"Il est devenu clair que je n'ai pas l'autorité suffisante, ni le soutien complet de tous mes collègues du Parlement européen et des responsables du Parti pour mettre en œuvre les changements que je pense nécessaires et sur lesquels j'avais fait campagne."
Second choc pour le parti.
Nigel Farage revient mais promet de ne rester en charge que temporairement, le temps d'organiser de nouvelles élections. "Même pour dix millions de dollars, je ne reviendrai pas. Je suis à la retraite maintenant", a-t-il assuré. Lui qui a déjà démissionné deux fois de ses fonctions semble pourtant toujours largement présent dans la vie de son parti.
6 octobre. Un eurodéputé au sol au Parlement Européen
Dans cette crise de succession, un leader potentiel émerge pourtant. Steven Woolfe, 49 ans, lui aussi eurodéputé, annonce sa candidature à la tête du mouvement aux suites de la démission de Diane James. Il a d'ailleurs rencontré plusieurs membres du parti lors d'une réunion sur l'avenir de l'UKIP au Parlement européen de Strasbourg ce jeudi 6 octobre.
Le ton monte. Il est accusé par Mike Hookem d'être en lien avec le parti conservateur et d'envisager de quitter UKIP. Les deux hommes sortent de la pièce pour régler ce conflit "mano a mano" et Steven Woolfe s'effondre, après s'être heurté la tête sur une vitre. Si les circonstances de cette altercation sont encore floues, elles témoignent d'une profonde discorde au sein du parti populiste.
Steven Woolfe sur le sol du Parlement européen de Strasbourg
Si après avoir été hospitalisé à Strasbourg, Steven Woolfe est rentré chez lui le dimanche suivant, l'état du parti, quant à lui, semble beaucoup plus dramatique. L'ensemble des médias britanniques et européens ont relayé la photo de l'eurodéputé inconscient sur le sol du Parlement européen. Si Steven Woolfe s'est relevé de cet embarras, près de quinze jours après, l'Ukip ne semble pas parvenir en faire de même.
17 octobre. Le candidat favori à la direction du parti claque la porte
Ce lundi, Steven Woolfe, candidat favori pour pour prendre la direction du parti, a claqué la porte. "C'est avec regret et une profonde tristesse que j'abandonne ma campagne pour le leadership et que j'annonce ma démission avec effet immédiat de l'Ukip", a écrit Steven Woolfe dans un communiqué publié sur son site internet et diffusé sur Twitter. L'eurodéputé en a profité pour dénoncer un parti "rongé par des querelles, par des guerres par procuration entre factions rivales", "dirigé par un Comité exécutif national qui n'est pas adapté à sa mission." Il a également déclaré que le parti était entré dans une "spirale mortelle" depuis le départ de Nigel Farage."Je suis arrivé à la conclusion que l’Ukip est ingouvernable sans Nigel Farage", a-t-il conclu.
https://twitter.com/Steven_Woolfe/status/788065654515654656
Cependant, Steven Woolfe n'a pas pour autant l'intention de se retirer de la vie politique puisqu'il entend "siéger au Parlement européen en tant qu'indépendant".
L'abandon de Steven Woolfe illustre les difficultés du parti britannique europhobe depuis le retrait de son leader Nigel Farage depuis le Brexit. En attendant l'élection du prochain leader, prévue le 28 novembre prochain, c'est Nigel Farage qui assure la direction de l'Ukip par intérim. Faute de nouveau candidat, sera-t-il obligé de se représenter à la présidence du parti pour sauver le navire ? Les candidatures sont ouvertes jusqu'au 28 octobre.
Elise Dherbomez avec Loïc De La Mornais