La France, grande gagnante d'un Brexit ?

SERIE J-8 : le compte à rebours avant le grand divorce ?

Aujourd'hui, nous nous intéressons aux conséquences d'un éventuel Brexit pour la France. À première vue, Paris n'a aucune raison de se réjouir de ce départ. Mais à première vue seulement... car l'affaire pourrait finalement se révéler payante.

Paris et Londres, éternelles rivales

Et si Paris pouvait enfin se débarrasser de Londres? Ce n'est pas que la capitale française déteste particulièrement sa rivale britannique mais depuis des années, elles se livrent une bataille féroce. Alors que Paris se vante d'être la première destination touristique mondiale, Londres revendique le titre de métropole internationale la plus attractive du monde. Paris affiche fièrement sa Tour Eiffel mais Londres, avec le Shard, prétend avoir le gratte-ciel le plus haut de l'Union Européenne - en attendant la construction des Tours jumelles Hermitage Plaza qui devraient atteindre, 323m dans le quartier de la défense. Sorry guys. Et les deux capitales n'ont pas fini de se chamailler puisqu'elles sont toutes les deux candidates pour accueillir l'exposition universelle de 2025. Sur le plan culturel, Paris deviendrait en tous cas, la capitale incontestable de l'Union.

La City... à Paris

Autre pied de nez et sans doute le plus important, la City de Londres, première place financière d'Europe, pourrait déménager... à Paris. La baisse de la livre sterling pourrait conduire de nombreuses entreprises et investisseurs à fuir le Royaume-Uni, jusque là considéré comme une porte d'entrée dans l'Union.

Londres accueille plus de 40% des sièges sociaux européens des 250 plus grandes multinationales mais de nombreuses sociétés ne cachent pas leur intention de faire leurs valises. La banque HSBC a notamment annoncé qu'elle ferait venir 20% de ses effectifs à Paris si les sujets de sa Majesté décidaient de quitter l'UE. Distancée dans les classements internationaux, la France est prête à dérouler le tapis rouges aux troupes de la City. Francfort, ne compte pas lâcher aussi facilement le gâteau mais selon une étude, réalisée par Standard & Poor's, Paris est très bien placée pour devenir la première place financière européenne.

Ford, fleuron de l'industrie française?

La délocalisation d'activités pourrait aussi concerner l'industrie. Selon une enquête menée par la Bertelsmann Foundation, un tiers des entreprises allemandes et britanniques présentes au Royaume-Uni prévoit de réduire leurs activités ou de les délocaliser en cas de Brexit. Les sociétés qui exportent beaucoup vers les autres pays de l'Union Européenne, ont tout intérêt à se rapprocher de leurs consommateurs pour éviter de payer des droits de douane.

Les constructeurs automobiles sont les premiers touchés. Selon de nombreux économistes de la London School of Economics, si le Royaume-Uni quitte l'Union Européenne, Nissan, Ford et Toyota iront faire leurs investissements ailleurs. Dans le secteur agroalimentaire, où les frais de douane atteignent 20%, les entreprises pourraient aussi être tentées de traverser la Manche.

Easyjet, un aller simple vers la France?

De nombreuses compagnies aériennes low cost ont pris position pour un maintien du Royaume-Uni dans l'Union, évoquant des "conséquences catastrophiques" pour leurs activités. Dans le cadre de l'UE, les compagnies bénéficient du traité de libre circulation qui assure des tarifs avantageux pour les ressortissants de l'Union qui voyagent en Europe. Mais la présidente d'Easyjet, Carolyn McCall, a prévenu que l'entreprise avait un plan B : en cas de victoire du Brexit, la compagnie créera une entité dans un autre pays ressortissant de l'Union. Les liaisons entre la France et le Royaume-Uni étant les plus nombreuses en Europe, tous les espoirs sont permis.

La disparition de la Jungle de Calais?

Le départ des Anglais pourrait aussi entrainer une délocalisation de la jungle de Calais. En mars dernier, le ministre de l'économie, Emmanuel Macron, avait en effet averti, dans les colonnes du Financial Times, qu'en cas de sortie, Paris laisserait les migrants libres de se rendre au Royaume-Uni : "Le jour où cette relation est rompue, il n'y aura plus de migrants à Calais". Depuis 2003, les accords du Touquet autorisent les britanniques à contrôler sur le territoire français les migrants désirant se rendre outre-Manche. Une sortie de l’Union Européenne du Royaume-Uni ne remet pas forcément en cause ces accords bilatéraux mais la France ne devrait pas faire de cadeau à sa rivale britannique.

Avec l'Allemagne, au moins un couple qui dure

Enfin, la sortie du Royaume-Uni de l'Union Européenne permettrait à la France et à l'Allemagne d'approfondir leur rêve européen. Londres a acquis un statut particulier au sein de l'Union et est devenue un maître de la négociation... voire une maîtresse capricieuse. Finalement un couple solide avec l'Allemagne sera peut être plus efficace et plus reposant... qu'un instable ménage à trois !

 

Charlotte Onfroy-Barrier, avec Loïc de La Mornais