Brexit : et si l'Ecosse sortait du Royaume-Uni ?

A exactement deux semaines du référendum britannique sur la possible sortie du pays hors de l'Union Européenne, c'est la cohésion même du Royaume-Uni qui est remise en cause. Alors que la dirigeante du gouvernement écossais Nicola Sturgeon menace d'organiser un nouveau référendum d'indépendance en cas d'un vote en faveur du Brexit, le Premier Ministre britannique David Cameron s'inquiète d'un possible démembrement de son pays.

Si les sondages d'opinion indiquent que la majorité de la population écossaise souhaite rester au sein de l'Union Européenne (54%), leur avenir n'en est pas pour autant aussi certain. Le vote prend également en compte la volonté des 3 autres nations constitutives du Royaume-Uni (l'Angleterre, le Pays de Galles et l'Irlande du Nord).

C'est dans ce contexte que Nicola Sturgeon, l'actuelle Premier Ministre du gouvernement écossais à la tête du Parti indépendantiste, a annoncé qu'il ne sera pas acceptable pour les Ecossais d'être tirés en dehors de l'UE contre leur volonté par les anglais. En conséquence, elle a menacé le gouvernement britannique à plusieurs reprises d'organiser un nouveau référendum d'indépendance, après celui de septembre 2014 qui n'avait finalement pas obtenu la majorité (44,6%).

L'organisation d'un tel référendum nécessite au préalable l'accord du gouvernement britannique de David Cameron. Cependant, elle assure qu'en cas d'un vote en faveur du Brexit elle se battrait jusqu'au bout pour obtenir le droit d'organiser ce dernier. D'autant que les membres au sein de son parti assurent qu'il atteindrait facilement une majorité favorable cette fois-ci.

Critiquée pour sa position pro-européenne et indépendantiste, elle explique qu'il n'y a pas de contradiction à vouloir être indépendante du Royaume-Uni et membre de l'Union l'Européenne, elle estime que "les pays peuvent être indépendants et interdépendants".

Les membres du gouvernement britannique, quant à eux, s'inquiètent de cette revendication. Dans un débat télévisé mardi soir, David Cameron s'est inquiété de l'avenir de l'Ecosse au sein du Royaume-Uni, en rappelant qu'il était lui-même contre le Brexit. On "ne renforce pas un pays en le menant à l'éclatement" a-t-il affirmé. Si la perte de l'Ecosse représenterait une perte de 8% de la population du Royaume-Uni, ce serait aussi une perte de 32% de son territoire, d'une importante réserve de pétrole dans la Mer du Nord, et d'une base de défense stratégique car l'Ecosse abrite de nombreuses installations militaires dont la base de sous-marins nucléaires de Faslane.

George Osborne, membre du Parti conservateur et chancelier de l'Echiquier sous la direction de David Cameron, a lui aussi averti les anglais : "le Brexit déclencherait un choc économique profond en Ecosse". Le phénomène aurait de redoutables répercutions : aggravation de la situation de l'emploi, baisse drastique des prix de l'immobilier, et plus globalement une baisse du niveau de vie. "Le commerce extérieur réalisé avec l'Union Européenne a créé des emplois en Ecosse et le retrait de ce marché unique aurait des conséquences drastiques sur l'économie de cette région" où 43% du total des biens exportés le sont à destination de l'UE.

Ces 5 dernières années, l'Ecosse a bénéficié de 153 projets d'investissements à l'initiative de l'UE, ce qui équivaut à presque un tiers de tous les projets d'investissements dont elle a profité jusqu'à aujourd'hui. Des investissements conséquents qui ont contribué à protéger ou créer au total 16 000 emplois. Ruth Davidson, la dirigeante du Parti conservateur écossais, rappelle que le travail de milliers d'écossais dépend des exportations vendues au sein de l'UE et qu'afin d'assurer la création de nombreux autres emplois dans les années à venir, elle votera pour rester dans l'UE le 23 juin prochain.

Si l'Ecosse venait à être indépendante, dans quelle condition réintègrerait-elle l'Union ? La question avait déjà été posée en 2014 lors du précédent référendum. Dans la pratique, il semblerait que si l'Ecosse demandait son adhésion à l'UE, elle bénéficierait d'une procédure d'entrée accélérée. Concernant la conservation de sa monnaie (la livre), le gouvernement britannique s'y opposera probablement, tout comme il l'avait déjà annoncé en 2014.

Claire Perrodon avec Loïc de la Mornais