Comment le Royaume-Uni tente de mettre fin au hooliganisme ?

Des supporters de Chelsea accusés de racisme, l'affaire scandalise l'Angleterre. Et pourtant, les heurts autour des matchs de foot ne sont pas un phénomène nouveau au Royaume-Uni. Déjà en 1974 à Blackpool, une bataille entre hooligans faisait un mort. Au fil des drames et des compétitions mondiales, le pays a mis en place des mesures de plus en plus radicales pour tenter d’enrayer la violence.

Premières mesures il y a 30 ans.
Le 29 mai 1985, Liverpool affronte la Juventus de Turin en finale de la coupe d’Europe, au stade du Heysel en Belgique. Avant même le début du match, des hooligans anglais attaquent des supporters italiens. Bilan : 39 morts et 600 blessés.

Suite à ce drame, les autorités britanniques interdisent l’alcool dans les stades, et instaurent le Public Disorder Act de 1986. Les individus les plus violents, connus des services de police, n’ont plus le droit d’assister aux matchs.

Puis survient la tragédie de Hillsborough en 1989. 96 personnes sont tuées dans un mouvement de foule. Les hooligans ne sont pas directement responsables de l’accident, mais le gouvernement décide de renforcer la sécurité dans les stades. Les places debout sont supprimées, les caméras de surveillance se multiplient.

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Des supporters de Liverpool essaient d’échapper au mouvement de foule à Hillsborough (crédit: Rex Features)

Parallèlement, la police britannique renforce son arsenal juridique dans les années 1990. Les hooligans présumés peuvent être placés sur écoute. La police infiltre des clubs et parvient à identifier les supporters les plus violents pour les condamner, grâce à la création d’unités spéciales.

En 1991, le gouvernement créé trois nouvelles infractions et renforce les sanctions, via le Football Offences Act. Les chants racistes ou injurieux sont passibles de prison, de même que le jet d’objets sur les joueurs et l’intrusion de supporters sur le terrain.

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Un supporter nu s’introduisant sur le terrain lors d’un match opposant Manchester à Aston Villa (crédit : photo news)

En prévision du Championnat d’Europe de 2000, le gouvernement prend de nouvelles dispositions. Les supporters condamnés ou suspectés de hooliganisme doivent rendre leur passeport les jours de matchs internationaux, et pointer au commissariat. Ils peuvent être bannis à vie des stades britanniques et risquent jusqu’à 10 ans de prison s’ils passent à l’acte.

A l’approche des championnats internationaux, le gouvernement renforce les contrôles. En 2010, il annonce que 3200 hooligans connus des services de police seront privés de Mondial. En 2014, ils sont 1400 à ne pas pouvoir se rendre au Brésil.

Depuis une vingtaine d’années, l’augmentation du prix des places a aussi contribué à réduire la violence autour des stades. En moyenne, un abonnement au championnat anglais coûte plus de 650€. Patrick Mignon, responsable du Laboratoire de sociologie du sport de l'INSEP, constate ce phénomène : « en augmentant à ce point le prix des places, les clubs anglais ont éliminé de fait les plus jeunes et les plus modestes des stades. Ils ont domestiqué leur public. Et comme les stades fonctionnent désormais en grande partie par abonnement à la saison, ceux qui continuent à venir ne vont pas prendre le risque de se faire virer. Ils ont payé trop cher pour ça ».

Si ces mesures ont permis de réduire considérablement le hooliganisme au Royaume-Uni, rien n’empêche des supporters non connus des services de police de commettre de nouvelles violences.

 

Marine Zambrano et Juliette Perrot, avec Clément Le Goff