L'histoire de Malaka est aussi émouvante que glaçante : à 23 ans, cette Palestinienne étudie à l'université de Sheffield en Angleterre, qui lui offre l'éducation nécessaire pour commencer une vie active loin des tirs de rocket. Mais la famille de Malaka est restée à Gaza. La jeune femme, qui n'a que peu de moyens de communiquer avec ses proches, regarde les actualités à la télévision, le ventre noué, de peur de découvrir que ses proches ont été victimes du conflit qui oppose la bande de Gaza et Israël.
Avant de fuir vers l'Angleterre, Malaka a passé son enfance à Gaza. Le Huffington Post britannique raconte son histoire. Si les coupures d'électricité et d'eau faisaient partie de son quotidien, il y avait pire : "Quand j'étais plus jeune, j'ai vu ma famille et mes amis souffrir des bombes au phosphore qui étaient lâchées sur notre région, se souvient-elle. Ce que j'ai vécu est indescriptible. J'ai passé des nuits sans dormir. J'ai perdu toute concentration et ne pouvais pas étudier." Pugnace, elle a toutefois réussi à obtenir un diplôme en littérature anglaise à Gaza.
En Angleterre, Malaka a pu retrouver un peu de sa faculté à se concentrer. Afin de rejoindre l'université de Sheffield, dans le Yorkshire, elle s'est lancée dans une campagne de "crowdfunding". Par le biais de ce financement participatif, elle a récolté assez d'argent pour partir, à savoir près de 5000 livres (soit environ 6300 euros). Elle est inscrite à l’université depuis septembre dernier, où elle étudie les sciences politiques et le droit sans avoir eu à payer de frais d'inscription. "La probabilité d'obtenir une bourse internationale est très faible", explique la jeune femme qui a réussi à obtenir un visa, avant de traverser le barrage Rafah pour rejoindre une Égypte instable, par le désert du Sinaï. Finalement, elle s'est envolée vers le Royaume-Uni, où elle est maintenant en sécurité.
"Les trottoirs sont jonchés de corps"
Mais ses proches restent en danger, dans une zone de guerre. Dimanche dernier, alors qu'elle regardait les informations, elle a vu sa tante et ses cousins à la télévision... Et a compris que leur maison avait été détruite. Son sang n'a fait qu'un tour : "Et s'ils étaient morts ?" La jeune femme témoigne : "Comme il n'y a pas de connexion internet ni d'électricité là où ils vivent, j'ai contacté un journaliste pour savoir qui était mort." Il n'a pas su lui répondre de suite. "Les trottoirs sont jonchés de corps", a-t-il seulement été capable de préciser.
Malaka a finalement réussi à joindre son père, qui l'a rassurée : personne dans sa famille n'a trouvé la mort ce jour-là. Mais l'horreur reste entière : "Mon père m'a dit qu'il avait vu des maisons en ruines. Des corps dispersés. Il a vu des mains et des bras et des corps sous les décombres. Il pouvait entendre leur voix l'appelant à l'aide."
Malaka tient à poursuivre ses études et à défendre les idéaux auxquels elle croit : "Je dois travailler en faveur de la paix et de la justice, plutôt que de juste me plaindre de leur manque."
Céline Schoen avec Loïc de La Mornais