Les sondages l’avaient prédit: Angela Merkel reste chancelière de la République fédérale d’Allemagne. Son parti, la CDU, est arrivé largement en tête avec 32,9% des voix, loin devant le SPD qui n’obtient que 20,5%. Ce matin, toute la presse allemande souligne cependant que, même si la chancelière est reconduite, il s’agit surtout d’une victoire des populistes.
Les populistes sont de retour au Bundestag, une première depuis 1945
Le pari est plus que réussi pour les populistes. Absente du Bundestag depuis 1945, l’extrême-droite fait son retour au Parlement allemand. L’Alternative pour l’Allemagne obtient 12,9% des voix et devient la troisième force politique d’Allemagne. Dans l’ex-RDA, l’AfD arrive même deuxième. Un score historique pour ce parti créé en 2013. L’AfD qui prônait un discours anti-Europe a construit toute sa campagne autour de l’immigration en critiquant la politique d’accueil d’Angela Merkel. Le discours d’Alexander Gauland, prononcé quelques minutes après l’annonce des premières estimations, laisse présager un mandat compliqué pour la chancelière: “Nous allons pourchasser Madame Merkel. Et nous allons récupérer notre pays et notre peuple”. L’AfD devrait occuper 96 sièges au Bundestag alors que l’Allemagne était l’un des rares pays en Europe où l’extrême droite n’avait pas d’élus au Parlement. Pour la Bild, le succès de l’AfD n’est pas seulement une défaite amère pour la majorité sortante mais surtout pour la démocratie allemande. Le quotidien allemand considère qu’il s’agit d’un vote contestataire, résultat d’un échec de la grande coalition. “Les électeurs ont puni la grande coalition”, titre ainsi la Mitteldeutsche Zeitung.
Des scores historiquement bas pour les deux grands partis
La CDU et le SPD sont les deux grands perdants des élections législatives de dimanche. L’Union chrétienne démocrate n’a obtenu que 32,9% des voix, son score le plus bas depuis 1949. Pour le Tagesspiegel, il s’agit d’une “victoire amère pour Angela Merkel” qui a reconnu “avoir espéré un résultat légèrement meilleur”. Même s’il s’agit de la quatrième victoire consécutive de la chancelière, “cette victoire n’est pas un triomphe”, poursuit le journal berlinois. Son parti a perdu 8,6 points par rapport aux précédentes élections législatives. Le SPD s’est quant à lui écroulé. Le parti de Martin Schulz enregistre son plus mauvais score depuis la fin de la seconde guerre mondiale, avec seulement 20,8% des voix. Pour le Tagesspiegel, Martin Schulz qui parlait hier de “journée amère pour la sociale-démocratie”, est responsable de la défaite de son parti. “Le fait d’axer sa campagne sur la justice sociale n’était pas sa seule erreur mais bien son erreur, la plus lourde de conséquences”. Ce sujet seul ne pouvait suffire pour convaincre les électeurs.
Angela Merkel doit former une coalition malgré de grandes divergences
La chancelière doit désormais former une coalition pour obtenir une majorité au Bundestag. Pour le Tagesspiegel, la campagne d’Angela Merkel commence maintenant: “le vrai défi [d’Angela Merkel] va être de trouver un allié”. La chancelière se retrouve “seule au sommet” et ne sait plus quelle alliance lui serait bénéfique. Quelques minutes seulement après la publication des résultats, les sociaux-démocrates ont annoncé qu’ils refusaient toute coalition avec la CDU. Le SPD fera donc partie de l’opposition. Les Verts et les Libéraux ont très vite reproché au SPD de se retirer des négociations avant même qu’elles aient commencé. Mais pour Thorsten Schäfer-Gümbel, vice-président du SPD, “Quand on ressort d’une grande coalition avec un score plus mauvais que quand on l’a commencée alors il est impossible d’y retourner”.
La chancelière n’a plus d’autre choix que de négocier avec les Verts et les Libéraux: “Il ne reste plus que la coalition Jamaïque [des couleurs des trois partis] à Merkel” titre le quotidien munichois Süddeutsche Zeitung. “La nouvelle Allemagne” titre le Morgenpost avec les trois visages de la nouvelle coalition: Angela Merkel, Christian Lindner (FDP) et Cem Özdemir (Verts). La CDU doit parvenir à former une coalition avec deux formations diamétralement opposées. Les Libéraux du FDP, qui fêtent leur retour au Bundestag avec 10,4% des voix, ont axé leur campagne très à droite. Les divergences avec les Verts, principalement en matière d’environnement et d’immigration, s’annoncent très compliquées à gérer. Pour les Westfälichen Nachrichten, “cette coalition tricolore serait sans aucun doute une expérience politique périlleuse où des alliances aux idées opposées seraient créés dans le simple but d’avoir un gouvernement plus ou moins stable face à une AfD épouvantablement forte.”