Grâce à Youtube, des jeunes Syriens expliquent l'Allemagne à leurs compatriotes

© Zukar

Des centaines de milliers de Syriens ont fui leur pays pour venir en Allemagne. Et quand ils arrivent, le choc des cultures peut être violent. Pour faciliter leur intégration, des jeunes réfugiés utilisent les réseaux sociaux et la carte de l'humour.

"Qui sont ces Allemands ?"

C'est la question à laquelle Firas Alshater voulait une réponse. Pour cela, il a fait une vidéo, déjà vue plus de 400 000 fois sur YouTube.

"En Syrie, je faisais des films. Sauf quand j'étais en prison, parce que je faisais des films", explique le jeune homme dans sa vidéo. Il compare ensuite sa ville d'Alep avec celle de Berlin. Avant la guerre qui frappe la Syrie depuis 2011, puis après : dans la ville syrienne, tout est destruction. A Berlin, rien n'a changé. Alors, lorsqu'il est arrivé dans la capitale allemande, une question s'est imposée à lui : "je ne voulais pas seulement apprendre à parler allemand, je voulais aussi comprendre et connaître vraiment les gens".

Une démarche pas si facile quand on arrive dans un pays sans en parler la langue. "Beaucoup de réfugiés ont les mêmes problèmes. Ils sont surtout d'ordre bureaucratique. J'ai reçu beaucoup de lettres de différentes administrations qui me demandaient beaucoup de choses, mais je ne comprenais pas."

Dans son petit film, il reproduit le Blind Trust Project. Une initiative pour lutter contre les discriminations au Canada. Un homme, les yeux bandés, attend dans la rue avec deux pancartes à ses pieds qui proclament : "Je suis musulman, je suis catégorisé comme étant un terroriste". Puis: "Je vous fait confiance. Me faites-vous confiance ? Faites-moi un câlin."

Une vidéo devenue virale et vue plus de 2,5 millions de fois. Le jeune syrien s'est mis en scène de la même façon avec une pancarte où est écrit : "je suis un réfugié syrien. Je te fais confiance. Me fais-tu confiance ? Fais moi un câlin !". Firas Alshater a eu cette idée fin 2014. "J'ai vu d'importantes manifestations en Allemagne de Pegida [mouvement islamophobe allemand]. J'ai voulu savoir si la plupart des gens étaient anti-réfugiés."

Mais les réactions sont un peu différentes en Allemagne... car les gens sont plus timides. Après quelques minutes d'attente, ils sont plusieurs à venir le serrer dans leurs bras. Et Firas Alshater de conclure : "les Allemands mettent longtemps à démarrer, mais quand ils sont partis, plus rien ne les arrête !".

Après le succès de cette vidéo, Firas Alshater a reçu beaucoup de soutiens. "J'ai désormais beaucoup de responsabilités. Ils sont nombreux à me demander quand viendra la prochaine vidéo".

En attendant le deuxième épisode de sa série "Zukar", il a réalisé ce clip contre le racisme:

Manier l'humour pour toucher le plus de personnes possible, voilà l'objectif. "Je veux faire rire les gens tout en faisant passer des messages. Mais il faut trouver un équilibre. En Syrie, je ne pouvais pas rire du gouvernement par exemple. Ici, il y a la liberté d'expression, mais je dois quand-même trouver un équilibre pour faire rire à la fois les Allemands et les Syriens."

Convaincre les Allemands qui ont peur des réfugiés

Abdul Abbasi et Allaa Faham sont eux aussi syriens, réfugiés, et ils ont également choisi les réseaux sociaux pour s'adresser à leur compatriotes. Ensemble, ils forment le GLS ou German LifeStyle. Dans leur video la plus vue (plus de 300 000 fois sur leur page Facebook), on voit Alla Faham parler à ces Allemands qui craignent "l'afflux des réfugiés". "Je voudrais leur dire que nous avons fui devant la mort, le terrorisme, l’oppression et l’insécurité. Nous ne sommes pas venus par intérêt personnel ou économique. Mais nous avons été contraints de prendre ce nouveau chemin pour cette nouvelle vie."

Un propos grave, mais ils aiment aussi pratiquer l'humour. Dans ce sketch intitulé "Quand ton pote doit partir", les deux jeunes syriens comparent les réactions des Allemands et des Syriens lorsque l'un des deux amis dit qu'il doit s'en aller. La séparation des premiers est beaucoup plus simple que celle des seconds ...

 

Par Marc Taubert