Donner du travail aux réfugiés ? Le patronat allemand dit oui !

Des demandeurs d'asile à Berlin : les patrons allemands souhaitent une ouverture du marché du travail - REUTERS/Axel Schmidt

24 000 réfugiés en France au cours des deux prochaines années. Cette annonce, faite par François Hollande, peut faire sourire face aux plus de 800 000 réfugiés attendus rien que cette année en Allemagne. Un pays où les grands patrons appellent déjà à l’ouverture du marché du travail aux réfugiés.

  « La grande majorité des réfugiés est bien formée et motivée. Exactement les personnes que nous recherchons ». Un appel signé dans la Bild am Sonntag par Dieter Zetsche, le chef de Daimler. Et quand l’un des plus importants grands managers allemands s’exprime aussi clairement, il ne le fait pas par hasard. Dieter Zetsche se dit même prêt à envoyer des recruteurs dans les centres d’accueil. Car l’économie allemande est à sec de travailleurs qualifiés. Avec un manque de 140 000 ingénieurs et techniciens, sans parler des secteurs de l’hôtellerie, de la santé et des aides à la personne qui n’arrivent pas à embaucher.

Dieter Zetsche, le chef de Daimler, recherche des ingénieurs désespérément

Dieter Zetsche, le chef de Daimler, recherche des ingénieurs désespérément

 

Des déficits qui s’expliquent bien sûr par le trop faible taux de natalité mais aussi par un système de formation qui tousse, malgré les louanges souvent entonnées. 20% des jeunes allemands n’ont ainsi pas le niveau à leur sortie du système scolaire pour entamer une formation professionnelle. Le président de la BDA, la confédération des patrons, est à son tour monté en première ligne. Ingo Kramer s’en est pris directement à la législation du pays sur l’asile, un système qui « tient les réfugiés à l’écart du marché du travail pendant de nombreux mois ».

Maiga et Malik, deux réfugiés maliens, font partie des rares élus à avoir trouvé un travail : à Berlin, ils fabriquent des meubles en bois © Verena Brüning

 

L’interdiction de travailler est ainsi totale les trois premiers mois après leur arrivée. Une fois la porte entrouverte, elle se referme très vite. Les réfugiés font face aux employés dits privilégiés : les Allemands et les ressortissants de l’Union européenne sont prioritaires lors du processus d’embauche. Des barrières administratives qui éteignent tout espoir d’intégration rapide au marché du travail.

Difficile également de prendre en formation de jeunes réfugiés qui risquent à tout moment d’être expulsés. Franck-Jürgen Weise, président de l’agence fédérale pour l’emploi, réclame donc une interdiction d’expulsion pour les personnes en formation professionnelle. Poussées par les décisions fortes d’Angela Merkel et du gouvernement, les prises de position du patronat allemand surfent également sur la vague de solidarité de nombreux Allemands envers les réfugiés. Les images de l’accueil réservé aux nouveaux arrivants en gare de Munich sont encore dans toutes les têtes.

Un réfugié en provenance de Hongrie à la gare de Munich - dpa/Sven Hoppe

 

Il y a cependant d’autres images, moins positives pour l’Allemagne qui ont effrayé l’économie allemande. Celles de manifestations anti-réfugiés aux relents néo-nazis et d’incendies criminels contre des lieux d’accueil pour réfugiés. Un patronat bien conscient de l’importance à l’export de la marque « Made in germany » qui ne peut se permettre une telle publicité. Certainement aussi l’une des explications de cette communication à l’unisson des grands managers allemands.

 

Par Julien Mechaussie