L'Allemagne, rattrapée par ces vieux démons ? C'est en tout cas le constat que dresse le Comité des Nations Unies pour l'élimination des discriminations raciales (CERD). Il s'est réuni mardi 5 mai pour débattre de la xénophobie en Allemagne. En effet, depuis quelques temps, le pays est dans son viseur. Et les représentants allemands présents hier à Genève ont reconnu que la lutte contre le racisme était un combat encore loin d'être gagné ...
Il faut dire que depuis la naissance du mouvement Pegida, ce groupe qui s'oppose "au fanatisme religieux, au radicalisme et à l'islamisme", la parole s'est libérée. Menaces, insultes et agressions sont devenues fréquentes dans un pays qui fait face à un afflux massif de réfugiés. Et selon les prévisions du site Statista, ce chiffre serait à la hausse en 2015 : plus de 400 000 personnes devraient demander l'asile cette année.
Mais aujourd'hui, l'attrait du "Multi-Kulti" - l'adage allemand qui voulait croire à l'intégration des autres nationalités et cultures dans le pays - semble avoir fait long feu. "Le racisme n'est plus uniquement visible dans les milieux d’extrême-droite mais se retrouve dans l'ensemble de la société", rappelle un membre de l'Institut allemand des droits de l'Homme. Et Pegida n'y est pas pour rien...
Pegida, l'Allemagne face à ses peurs
Le 5 janvier, sous la bannière Pegida (acronyme des "Européens patriotes contre l'islamisation de l'Occident"), 8 000 personnes manifestent dans les rues de Dresde. Du jamais vu ! Les sympathisants du mouvement se positionnent pour le durcissement des conditions d'accueil des demandeurs d'asile et des lois contre les immigrés délinquants. Dans le cortège, des familles, des étudiants ; Pegida semble attirer toutes les tranches d'âge. En effet, près d'un Allemand sur deux montrent de la sympathie pour le mouvement, 30% avouent même le soutenir totalement. Dans cette tension ambiante, les actes de violence se multiplient.
Selon le ministère de l'Intérieur allemand, environ 800 délits à caractère racial ont été recensés en 2014, soit 43% de plus qu'en 2013. Paradoxalement, les mouvements d'extrême droite ont de moins en moins d'adhérents ; ils ne seraient plus que 7 000 en 2014. Mais les autorités allemandes ont raison de s'inquiéter de la montée du racisme dans le pays. Depuis le début de l'année, ce sont déjà 76 actes xénophobes qui ont été commis en Allemagne.
Par Camille Wormser
