Ils étaient d'abord une poignée. Puis, semaine après semaine, la foule a grossi pour atteindre hier à Dresde près de 15 000 personnes. Sous la bannière des "patriotes européennes contre l'islamisation de l'occident" (Pegida), ces manifestations sont le reflet d'une tendance lourde: la xénophobie et le racisme se renforcent en Allemagne. Voici notre reportage diffusé lundi 15 décembre dans le JT de 20 heures:
Le mouvement Pegida inquiète car il canalise un racisme latent bien ancré dans une partie de la population allemande. Il y a ce sondage réalisé pour le Spiegel: les deux tiers des Allemands considèrent que le gouvernement ne tient pas assez compte des inquiétudes que soulève l'immigration, 34% estiment que le pays est confronté à une phase "d'islamisation". Et dans une autre enquête d'opinion publiée hier par Die Zeit, la moitié des Allemands disent avoir de la "sympathie" pour le mouvement Pegida, 30% le soutiennent "totalement".
Cela traduit de vraies inquiétudes face à la hausse de l'immigration. Le pays est devenu la première destination européenne, avec une hausse de 60% des demandes d'asile depuis un an. Mais dans un pays confrontée à la dénatalité, l'immigration est aussi une chance. Angela Merkel l'a rappelé à plusieurs reprises, mais elle sait que cela ne passe pas dans une partie de son électorat. Elle observe d'ailleurs avec inquiétude le succès du parti anti-euro AfD, cette "Alternative pour l'Allemagne" qui a récolté 7% des voix aux dernières élections européennes et est désormais crédité de 10% d'intentions de vote. Avec un discours décomplexé sur l'identité allemande, il comble un vide à la droite de la CDU, le parti de la chancelière, qui jusqu'ici pouvait compter sur son allié bavarois de la CSU pour satisfaire les électeurs les plus conservateurs. Hier à Dresde, un haut responsable de l'AfD a été vu parmi les manifestants de Pegida. Il a d'ailleurs expliqué que son parti était leur "allié naturel".
Comme souvent quand un parti se fait doubler sur sa droite, il est tenté d'accélérer... La CDU s'est penchée récemment sur l'opportunité d'interdire ou non le voile intégral. La CSU a même proposé d'obliger les immigrés à parler allemand chez eux. Devant le tollé, elle a dû faire machine arrière.