Un nouveau Blueberry par Sfar et Blain : tempête et explications

Une case du prochain Blueberry, signé Sfar et Blain, à paraître fin 2018 chez Dargaud.

Le prochain Blueberry sera signé Joann Sfar et Christophe Blain. L’annonce a soulevé incompréhension et colère chez les aficionados. Sfar tente de déminer le sujet en justifiant ce choix.

Un scoop. C’est comme ça que le site des éditions Dargaud titre leur annonce du 10 janvier. Le western qui fait référence dans le monde en bulles va être repris. Créé en 1963 pour le Journal Pilote, Blueberry est le fruit d’immenses talents conjugués. Celui de Jean-Michel Charlier au scénario et de Jean Giraud alias Gir ou Moebius au dessin. Depuis le décès du dessinateur en 2012, la série n’avait pas connu de nouvel album. Pour redonner vie au lieutenant de la cavalerie US ont été choisis deux talents actuels. Le très en vue Joann Sfar, artiste complet, dessinateur, romancier, cinéaste, auteur du Chat du Rabbin. Et le virtuose Christophe Blain, flanqué de séries à succès et saluées par la critique comme Quai d’Orsay ou Gus.

Blueberry scenarisé par Charlier et dessiné par Giraud (extrait de la couverture du T2 de l'intégrale Dargaud).

Blueberry scénarisé par Charlier et dessiné par Giraud (extrait de la couverture du T2 de l'intégrale Dargaud).

La veille de l’annonce par Dargaud, le site de l’Express dévoile une case de ce futur Blueberry. Au dessin, la différence saute aux yeux. Les deux nouveaux auteurs ne sont pas dans la continuité graphique de Giraud. Ils ont leur style et ils le conserveront. Ce faisant, ils allument la mèche des réseaux sociaux et autres forums spécialisés BD. Les gardiens du temple montent aux commentaires et se lâchent : « c’est une blague ? », « trahison », « ces deux-là n’en ont jamais assez, ils veulent encore plus de fric », « c’est un coup d’éditeurs pour faire toujours plus de recettes »… et je n’ai sélectionné que des propos modérés. Au passage, force est de constater que Facebook ne produit pas toujours le meilleur. Il est décevant de voir avec quelles facilités certaines personnes (et même parmi les auteurs) se désinhibent avec des propos inutilement blessants.

Photo Dargaud / Rita Scaglia

Joann Sfar (photo Dargaud / Rita Scaglia)

La mayonnaise montant, Sfar s’offre comme un « droit de réponse » sur sa page Facebook. Affûté comme il l’est sur les nouveaux médias, il le fait très vite, le 10 janvier. Fake news d’abord sur le titre. « Notre album n’a pas de titre pour l’instant. Il n’a jamais été question qu’il s’appelle DUST ». Parce que Dust est précisément le titre du dernier album de Mister Blueberry réalisé par Giraud en 2005. Puis, Joann Sfar revient sur la genèse de l’événement. Leurs rencontres avec Jean Giraud. L’admiration partagée et les propositions faites à Blain et Sfar, du vivant de Giraud, de donner une suite à la série. L’auteur du Chat du Rabbin explique aussi pourquoi la suite n’a pas eu le temps de voir le jour avant le décès de Giraud.

Photo Dargaud / Rita Scaglia

Christophe Blain (photo Dargaud / Rita Scaglia)

Et concernant le style graphique, la ligne est claire : « Personne n’est jamais à la hauteur de rien, on ne se permettrait jamais de se comparer à Charlier ou Giraud, mais nous ne sommes pas là pour les copier. Nous souhaitons faire des albums vivants et pertinents, avec nos moyens.», écrit Sfar. Le nouveau Blueberry sera plus un album hommage qu’une suite de la série. Sans doute à la manière de Matthieu Bonhomme avec Lucky Luke. Le pitch ? « Comment un forain d’origine allemande à moitié fou, bonimenteur, incontrôlable, propriétaire d’un étrange automate capable de jouer aux échecs, mettra à lui seul en péril une paix fragile entre les Indiens et l’armée américaine », dixit Dargaud.

Personnellement, j’ai hâte de découvrir cet album, un diptyque, prévu pour la fin de l’année. Même si je ne suis pas dupe de l’intérêt pour un éditeur de prolonger une série « bankable ». Et même si je suis certain de préférer Sfar dans son Chat du Rabbin et Blain dans Gus tout comme Matthieu Bonhomme dans Esteban. Alors enterrons la hache de guerre pour ne garder que le plaisir de lire les aventures de ces héros qui ne meurent jamais vraiment.