Alors que Marine Le Pen, Sarkozy ou Hollande ont fait l’objet de nombreuses BD, il n’existe encore aucun album consacré à Macron. Le candidat d’En marche est-il privé de cases et de bulles ?
La vie secrète de Marine Le Pen, Les malheurs de Marine, La face crashée de Marine Le Pen, La présidente…Les bandes dessinées sur la candidate du Front national font florès. Certaines connaissent même de beaux succès en librairie. La série La présidente de Boujellal et Dupaire (Editons les Arènes Démopolis) s’est vendue à plus de 200 000 exemplaires comme nous le rappelle sur Culturebox Laurence Houot. Sarkozy et ses femmes, Sarkozy et les riches, Les Sarkozy gèrent la France, Sarkozy, tu nous manques déjà… On croirait les titres d’une série Z. Ce ne sont pourtant que des albums parus sur celui qui fut souvent caricaturé en Iznogoud. Quant à François Hollande, il n’a pas échappé au phénomène avec, par exemple, Campagne présidentielle de Mathieu Sapin ou Moi Président de Marie-Eve Malouines et Faro. Il s’est même fait un nom en BD en jouant son rôle de président dans une histoire de zombies.
Macron, lui, ne connaît pas ce succès. Y aurait-il un cabinet au noir dessein pour empêcher les dessins sur le candidat à la présidentielle ? Amélie Mougey est la rédactrice en chef de l’excellente Revue dessinée, trimestrielle d’actualité en BD qui existe depuis plus de trois ans. Son équipe suit de près les élections avec Battre la campagne, un carnet en ligne quotidien, dessiné et décalé sur la présidentielle. « A La Revue dessinée la différence de traitement entre Macron et Le Pen n’existe pas. C’est moins vrai pour les albums BD. Marine Le Pen est clivante, elle suscite des peurs, ce qui fait d’elle probablement un bon personnage de bande dessinée. Par son parcours, sa qualité d'héritière de Jean-Marie Le Pen, du fait de son parti et l‘histoire de celui-ci, cette personnalité comporte la part d’ombre et les aspérités suffisantes pour donner à des auteurs de BD l’envie de s’en emparer. Pour les raisons diamétralement opposées, la personnalité d’Emmanuel Macron est bien moins attractive », explique Amélie Mougey.
Un trio suit de près aussi en temps réel cette campagne. Dix jours à peine après le résultat de l’élection sortira Le Journal du off aux éditions Glénat. Une BD encore en écriture et tirée de véritables conversations « en off » avec les auteurs, les journalistes Renaud Saint-Cricq, Frédéric Gerschel et le dessinateur James. « C’est toujours plus complexe de faire rêver avec un personnage du centre et Macron se situe au centre. D’autant que le véritable héros, ou plutôt anti-héros, de cette campagne, ce n’est ni lui, ni Marine Le Pen mais François Fillon. Le personnage fort de cette campagne restera le candidat des Républicains », affirme James.
Un positionnement au centre, un profil moins rugueux, une histoire sans affaire ne sont pour autant pas les seules explications qui l’excluent du monde des bulles. Aurel est un auteur BD qui s’est spécialisé dans la politique. Il est aussi dessinateur de presse et collabore notamment au Canard Enchaîné et au journal Le Monde. Il a réalisé déjà deux albums sur Sarkozy (Sarkozy et ses femmes, Sarkozy et les riches) et deux autour de François Hollande (La République des couacs, Hollande et ses deux femmes). Il est celui qui a le plus dessiné Emmanuel Macron avec son dernier album Faire la loi (Editions Glénat). Une BD réalisée avec Patrick Roger et Hélène Bekmézian au scénario sur la création de la fameuse Loi Macron. Il se souvient de sa première fois avec le candidat : « Il est le plus jeune dans la politique. Avant d’avoir dessiné La République des couacs, il y a environ trois ans, je ne savais pas qui c’était. Et il est nécessaire d’avoir de la matière et du temps pour faire une bande dessinée. Au minimum, il faut compter plus de six mois pour réaliser un album. Macron a été plus rapide que ses biographes. Pourtant il y a de quoi faire avec ce personnage. On pourrait faire un portrait du système à travers son parcours. Du début à la fin, Science politique, l’ENA, Bercy et un passage par les banques, il n’y a rien de travers. Il est un cas d’école du système, l’exemple de cette bulle technocratique qui finit par accéder au pouvoir », commente Aurel. Ça ne doit pas consoler d’un mandat présidentiel mais, quel que soit le résultat des élections, Emmanuel Macron est donc certain de devenir… un personnage de BD. Question de temps.