"The Canyons" avec Lindsay Lohan : à peine fini, déjà culte

S'il existait une recette magique en la matière, le film The Canyons présenterait tous les ingrédients pour être labellisé "film culte", avant même sa sortie en salles. Réalisé par Paul Schrader, scénariste de Taxi Driver et Raging Bull, ce film indé-à-petit-budget s'est offert Lindsay Lohan au casting et véhicule déjà un millier de petites histoires qui le rendent sensationnel. Equipe improbable, tournage surréaliste et scénario très hot : voici son histoire.

Dream-team au générique

D'abord, l'équipage. On l'a dit, aux manettes, on retrouve Paul Schrader, qui a collaboré avec Martin Scorsese et réalisé une quinzaine de films, dont American Gigolo. Lubrique, fantasque et ultra têtu, ce réal âgé de 66 ans a bataillé pour que Lindsay Lohan rejoigne le casting, contre un salaire dérisoire (le budget total de 250 000 dollars provient en partie de fundraising sur internet). La rencontre tient presque du deal : lui apporte à Lindsay Lohan la crédibilité cinématographique qu'elle recherche. Elle, le glamour et son aura de "fille à scandale".

A ses côtés, un acteur porno que les internautes connaissent bien : James Deen, sorte de "boy-next-door" qui a "voulu faire du X dès la maternelle" (lien en anglais). Il a été spécialement recruté par Bret Easton Ellis, auteur en 1991 d'American Psycho et désormais scénariste de The Canyons. Et comme si cette "dream-team" foutraque ne suffisait pas, le cinéaste Gus Van Sant fait également partie du casting. Quant à l'histoire, elle raconte les soubresauts d'un triangle amoureux particulièrement hystérique et porté sur le sexe.

Un tournage surréaliste

Le film a assis sa petite notoriété à la faveur d'un article du New York Times (en anglais) paru mi-janvier. Un journaliste a été autorisé (invité ?) à suivre l'intégralité du tournage à Los Angeles et Malibu. Coup de com' réussi qui laisse entrevoir de vraies pépites. Dès le premier jour du tournage, Lindsay Lohan fait faux bond à l'équipe. Evincée par Schrader, elle revient en pleurant "comme un enfant perdu dans les bois". Schrader cède. Sa Porsche et ses escarpins ne manqueront plus un seul jour de tournage. Ses pilules pour l'aider à dormir, non plus.

Canyons

Il y a du Marilyn dans cette femme outrancière, fragile, déphasée et à la fois très bosseuse. Le tournage d'une scène de sexe se révèle particulièrement chaotique. Malgré l'équipe réduite pour l'occasion, Lohan refuse de tourner cette séquence de partouze avec James Deen et deux autres acteurs porno. Elle se réfugie dans un placard, seule, prostrée. "Tu as signé ton contrat, tu savais à quoi t'attendre !", menace le réalisateur, à travers la porte. Pas de réponse. Une heure plus tard, l'actrice se décide enfin à sortir mais garde son peignoir sur elle. Comment l'inciter à se mettre nue ? En faisant pareil, se dit Schrader. Il se déshabille intégralement face à la jeune femme, lui murmure "j'ai envie que tu sois à l'aise, allons-y", elle se retourne en hurlant "Pauuul !" et, contre toute attente, finit par tomber le peignoir. "Action !" "Cut" Quelques minutes ont suffi, c'est dans la boîte.

Un film "fascinant" selon Steven Soderbergh

A lire le récit du tournage, on se demande si The Canyons sera le plus beau navet des vingt dernières années ou un vrai coup de génie. Sa version définitive ne semble pas enthousiasmer Bret Easton Ellis et a été rejetée de deux festivals indépendants majeurs, Sundance et South by Southwest. Publié le 12 janvier, cet extrait a de quoi laisser songeur. Nous disons "oui" au tapis musical à la Twin Peaks et au décor ultra-moderne, mais espérons qu'il sera question d'autre chose que de téléphones qui sonnent dans le film...

Pour redresser le tir et bidouiller une version de meilleure qualité, le producteur Braxton Pope a demandé à Steven Soderbergh d'intervenir au montage. Ses conseils n'ont pas été retenus, mais Soderbergh assure que The Canyons possède de nombreuses qualités. "J'aime vraiment ce qu'ils ont fait, comment ils l'ont fait, a-t-il dit à Indie Wire (en anglais). Le film est fascinant et il y a une scène de sexe spectaculaire." Chef-d'œuvre ou pas, The Canyons pourra toujours s'enorgueillir d'avoir "secoué le financement du cinéma indé américain", pour reprendre les mots de Rue 89. Il devrait sortir simultanément en salles et en VOD aux Etats-Unis. En revanche, il n'est pas impossible que ce film ne soit jamais montré en France.

Publié par Ariane Nicolas / Catégories : Actu