A l'UMP, le putsch contre Jean-François Copé a-t-il définitivement fait pschitt ?

Jean-François Copé, président de l'UMP, le 26 février 2014 à Nantes (Loire-Atlantique). (JEAN-SEBASTIEN EVRARD / AFP)

Est-ce seulement partie remise ? Le coup de force dont on parlait, sous cape, avant les municipales est-il ajourné ou abandonné ? Dans l'UMP de Jean-François Copé, on n'est jamais à l'abri d'un putsch en préparation, d'un complot en gestation ou d'une cabale en cours d'organisation. Le putsch est, ici, une sorte de marque de fabrique.

Quelques semaines avant les élections des 23 et 30 mars, un ancien ministre des gouvernements Fillon laissait en entendre, à demi-mot en confidence, qu'une opération d'exfiltration du président du principal parti de l'opposition était en cours d'élaboration. Ses instigateurs tablaient sur un résultat mitigé de la droite aux municipales pour en faire porter la responsabilité à Copé.

Le maire de Meaux venait de traverser une passe difficile après l'enquête de l'hebdomadaire Le Point sur les largesses dont aurait bénéficié, de la part de l'UMP pendant la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy, la société de conseil et de communication Bygmalion, fondée par deux proches de Copé. Ce dernier avait tenté de redresser la barre dans une "déclaration solennelle" qui avait été analysée, à peu près unanimement, comme un coup d'épée dans l'eau.

La mise sous scellés des comptes du parti et l'annonce du dépôt de deux propositions de loi sur la transparence de la vie publique étaient en effet apparues comme une opération de diversion pour repousser les assauts venus de l'intérieur même de l'UMP.

Le résultat du scrutin a fait chuter l'édifice

La fragilisation politique du président de l'UMP via cette "affaire" - il entend prouver que les accusations lancées contre lui sont des "allégations totalement mensongères" - et la multiplication des sondages qui annonçaient plutôt une bonne résistance de la gauche sans déferlante de droite avaient conforté "les putschistes" dans leur volonté d'engager le fer avec Copé.

L'après-municipales devait être le moment idéal pour encercler le patron du parti et le contraindre à rendre des comptes politiques... et financiers.La perspective était bien de prendre le contrôle de l'UMP. Las ! Le résultat du scrutin a fait chuter l'édifice. Avec quelque 150 villes de plus de 9.000 habitants passées de gauche à droite, il devenait difficile de mettre en évidence un échec de Copé.

A contrario, aucune des têtes d'affiche de l'UMP n'a multiplié les éloges en sa direction pour ce qui apparaît, quand même, comme un résultat sans précédent pour la droite. Tout le monde a préféré insister sur l'échec magistral de la gauche, ce qui correspond aussi à la réalité puisque jamais aucun camp n'a pris une telle tannée aux municipales sous la Ve République.

Fillon et Wauquiez dans son collimateur

Cette extrême modération dans le compliment à l'endroit de Copé, pour injuste qu'il soit, montre à quel point les responsables de cette formation vivent à couteaux tirés et combien les rancoeurs, toujours vives, ne sont pas prêtes de s'éteindre entre les deux principales factions - copéiste ou filloniste -, sans compter les sous-groupes et les individualités qui attendent leur heure au coin du faux pas.

Sur le site du "Monde", le 2 avril, le journaliste Alexandre Lemarié donnait un aperçu de ces hostilités sous-jacentes. "Je n'oublierai pas ceux qui m'ont attaqué pendant la campagne au lieu de me défendre", aurait déclaré Copé lors d'une réunion du bureau politique, la veille, rapportait-il. "Ceux", plus particulièrement visés, étaient Fillon et Laurent Wauquiez.

L'assertion a été prise par les intéressés comme une "provocation" agressive. L'ancien premier ministre, poursuit Le Monde, aurait contre-attaqué en demandant la mise en place d'un comité pour surveiller la gestion de l'UMP. On peut imaginer qu'il s'agit autant de la gestion financière que de la gestion politique du parti.

Prochaine étape : les élections européennes

A peine sorti la tête haute des municipales, Copé est déjà attendu par ses "compagnons" au détour du prochain scrutin : les élections européennes du 25 mai. Donné à moins de 20% dans les intentions de vote, le PS regarde l'UMP et le FN se disputer la première place de cette consultation.

Selon un récent sondage Ifop, la droite avec 24% devancerait l'extrême droite (22%) qui serait en léger recul par rapport à une autre enquête de janvier du même institut. Mi-février, Opinion Way donnait aussi un écart de 2 points entre les deux partis.

Autant dire que la situation est compliquée à gérer pour Copé qui est confronté à un lourd défi : réussir à faire la synthèse entre les pro et les anti-européens au sein de l'UMP. Entre Alain Juppé ou Bruno Le Maire, Européens convaincus, et Henri Guaino qui ne votera pas pour Alain Lamassoure, tête de liste UMP en Ile-de-France, le fossé est difficile à combler. A cette donnée politique s'ajoutera un paramètre arithmétique qui est la dynamique actuelle du Front national. Faute de liste dans nombre de villes, une partie de son électorat n'a pas pu s'exprimer aux municipales.

Si l'UMP sortait vainqueur des européennes, alors le putsch contre Copé ferait pschitt. Mais si le FN parvenait, dans ce scrutin qui malheureusement intéresse peu les Français, à être le "premier parti" du pays, le coup de tonnerre serait tel qu'il pourrait emporter le président de l'UMP. A sa décharge, il ne serait certainement pas le seul à se retrouver au milieu de la tempête...

Publié par Olivier Biffaud / Catégories : Actu