2012, année de l'éducation ?

Cette semaine c’était la rentrée des profs, et cela s’est drôlement vu dans les médias : reportages, tribunes, analyses et relai des discours des principaux candidats à la présidentielle qui ont bien compris qu’il fallait occuper le terrain de l’éducation (particulièrement les candidats aux primaires PS, en pleine bourre, et dont l’un a spammé la boîte à com’ du blog avec des liens vers son site…). Dans quelques jours on passera à autre chose et les mêmes candidats auront aussi un avis sur la question, et ainsi de suite jusqu’à ce qu’élection s’ensuive.

Sauf que, si l’on en croit les déclarations d’intention, cette campagne présidentielle fera la part belle à l’éducation. Chouette ! Enfin, chouette, ça dépend. Parce qu’à vue de nez, on va pas beaucoup parler pédagogie et contenus…

Si j’ai bien suivi, les trois principaux thèmes ciblés par les politiques sont :

- le statut de l’enseignant : il s’agit essentiellement de discuter le volume horaire hebdomadaire et particulièrement celui des profs de collège et de lycée (sur ce sujet, il faut lire l’excellente synthèse de Maryline Baumard dans le Monde du 1er septembre) ;

- les rythmes scolaires : je rappelle que ce qu’on entend par « rythmes scolaires » c’est la somme des arrangements trouvés avec les lobbys du tourisme compatibles avec les impératifs familiaux (= il faut garantir les vacances aux lobbys et les weekends aux parents qui peuvent partir à la campagne) ; les élèves et plus encore les contenus ne font guère partie de la réflexion ;

- l’autonomie des établissements, chacun prenant en charge la pédagogie mais aussi la gestion humaine et le recrutement (c’est entre autre là que ça peut coincer, on l'a vu cette année avec les recrutements de profs non qualifiés à Pôle Emploi).

On aura l’occasion de revenir plus en détail sur ces thèmes en temps et en heure. On se contentera ici de noter que sur ces thèmes les situations de l’école primaire et du secondaire diffèrent très sensiblement.

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Si les politiques ont ainsi placé l’éducation tout en haut de la short-list des thèmes de campagnes, il y a une bonne raison, vous pensez bien. Certes, on ne peut jamais exclure que l’évidence et l’importance de la chose suffisent. Mais surtout, les politiques ont l’œil rivé aux sondages et les sondages placent l’éducation aux premiers rangs des préoccupations des français pour les élections à venir. Le 6 juillet, un sondage BVA annonçait « L’éducation, priorité des français devant l’emploi » : 60 % des français citent l’éducation au premier rang de leurs attentes prioritaires en matière d’action publique, devant le chômage : les courbes se sont croisées en douze mois, -17% pour l’emploi, + 17 % pour l’éducation.

Fin août un sondage CSA formule les choses un peu différemment et demande aux sondés quels sont les sujets qui leur paraissent importants aujourd’hui : le chômage et l’emploi arrivent en tête (42 %), l’éducation vient juste ensuite (35 % et même 41 % pour les parents d’élèves).

Malgré la période de crise budgétaire et la prise de conscience du problème de la dette, 50 % des interrogés sont tout à fait favorables à ce que les pouvoirs publics donnent plus de moyens à l’éducation (63 % chez les parents d’élèves). Plus frappant encore : 82 % des français interrogés pensent que le non-remplacement d’un enseignant partant à la retraite sur deux est une mauvaise chose, marquant leur net désaccord avec ce qui constitue pourtant la pierre angulaire de la politique gouvernementale. Logiquement, la baisse du nombre d’élèves par classe arrive en tête des sujets prioritaires, devant le suivi des élèves en difficulté.

Plus globalement, les français sondés sont très critiques quant à l’action du gouvernement : 56 % des parents d’élèves et jusqu’à 63 % des salariés du public pensent que l’action du gouvernement va dans le mauvais sens, particulièrement pour ce qui concerne la réduction de l’échec scolaire (61%), la formation des enseignants (59%) et la valorisation du métier (63 %).

L’image de l’école primaire reste cependant très positive, 2/3 des sondés estimant qu’elle fonctionne bien ou très bien (plus significatifs encore les ¾ des parents d’élèves), mais cette image s’érode chaque année (80 % en 2007).

De ces deux sondages, les politiques peuvent tirer d’intéressantes conclusions : les français s’intéressent de très près à l’éducation qui leur paraît centrale pour l’avenir du pays, mais en désavouant massivement l’action du gouvernement, notamment en termes d’effectifs et de moyens, ils indiquent à la fois qu’ils en perçoivent au quotidien les conséquences et que la direction à suivre est toute autre. Les français maintiennent leur confiance aux enseignants, mais doutent de l'institution Education Nationale.

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...Sinon, ben lundi on découvrira nos élèves pour l’année. Je me demande un peu comment va se passer cette rentrée, avec la fermeture sèche de 1500 classes. Dans mon école, on sent bien la différence : 1 classe en moins = passage de 25 à 30 élèves par classe en moyenne.

Pour ma part, 31 élèves dont 22 garçons… Je vous tiens au courant.

df

ddff

PS : En guise de clin d’oeil, deux petits sondages intéressants débusqués par le Café Pédagogique : on veut parfois nous faire croire que les vacances scolaires françaises sont les plus longues qui soient… Faux : elles sont même plutôt dans la moyenne basse en Europe. Quant au salaire des enseignants français, énième confirmation : la France bien mal classée. Allez-y, c'est dans l'éditorial de François Jarraud.