Dès le soir du 7 mai 2017, le chef de l’Etat tunisien, Béji Caïd Essebsi, a salué «la brillante victoire» d’Emmanuel Macron à la présidentielle française. L’occasion de «consolider la coopération bilatérale». Mais peut-être aussi le moyen de se faire pardonner un manque de discernement quand le nouvel élu n’était encore que candidat…
«On ne va pas disserter en cette occasion sur le message que le président Caïd Essebsi a envoyé (sur Facebook, NDLR) avec empressement. Il appartient à chacun de se faire sa propre opinion», souligne La Presse de Tunisie. Faut-il lire là une allusion ironique au fait que «l’empressement» du chef de l’Etat tunisien est peut-être lié au fait que celui-ci n’avait pas reçu le candidat Macron, venu à Tunis en novembre 2016… ? Il avait chargé de cette mission son fils qui l’avait accueilli… dans un salon d’honneur de l’aéroport de Tunis. A tel point que Géopolis s’était alors demandé si le pouvoir tunisien n’avait pas «parié sur le mauvais cheval»…
BCJ a donc peut-être voulu se faire pardonner pour ce qui peut apparaître a posteriori comme une boulette. D’où ses propos très élogieux dans son message sur Facebook. L’élection d’Emmanuel Macron «reflète la fidélité de la France à ses valeurs traditionnelles de liberté, d'égalité et de fraternité», n’hésite pas à écrire la présidence tunisienne.
Au-delà, le locataire du palais de Carthage en profite pour délivrer plusieurs messages au futur occupant de l’Elysée. D’abord, il rappelle sa «détermination à développer le partenariat stratégique tuniso-français et à œuvrer à consolider la coopération bilatérale dans tous les domaines». Il fait également part de son souhait de voir la France renforcer «davantage son soutien à la Tunisie afin de l’aider à réussir le pari de la démocratie et du développement économique et social.»
La Presse relève dans ce message «tous les espoirs de partenariat que cette nouvelle élection suscite du côté tunisien». Car si «Macron représente une certaine continuité par rapport (…) (à) François Hollande (…) il y a aussi une part de rupture». Autrement dit : les choses pourraient changer avec «la relance du projet européen», cher à Emmanuel Macron, pour laquelle la Tunisie «montre ses bonnes dispositions». Ainsi qu’avec «la relance de la construction euroméditerranéenne».
Dans les deux cas, on peut lire la volonté du pays de renforcer son alliance avec les Etats occidentaux. Et ce «en partenariat avec le nouveau président français de façon toute particulière», commente le quotidien tunisois. Pour résumer : à Tunis, on attend beaucoup de la France et de son jeune chef de l’Etat (39 ans). Et l’on espère que Paris comprendra cet «espoir d’un partenariat nouveau».
Quant aux 30.000 expatriés français, ils ont plebiscité Emmanuel Macron : ils l’ont adoubé avec 93,94% des voix, face à Marine Le Pen (6,06%). Un score auquel était habitué l’ancien dictateur Zine el-Abidine Ben Ali, dit-on parfois en riant à Tunis.