En 1992, Zeineb Kebaïli, Française née en Tunisie, se marie avec Jean-Pierre Marcie-Rivière. A sa mort, en 2010, elle laisse à son époux une fortune importante, notamment placée en Tunisie. L’un de ses neveux tunisiens a attaqué le testament devant la justice du pays. Motif : le mari n’était pas musulman. Se basant sur la charia, la cour d’appel de Tunis a décidé de dissoudre le mariage. La Cour de cassation doit se prononcer.
En première instance, la justice tunisienne avait validé le mariage. Qui a donc été retoqué en appel. «Pour les juges, le mariage entre Jean-Pierre et Zeineb n’aurait jamais dû être considéré comme valide», rapporte Le Point. Ils se fondent sur le Code du statut personnel, en vigueur en Tunisie, selon lequel la charia (loi islamique) régirait la législation sur les unions matrimoniales : en clair, un non-musulman ne peut pas épouser une musulmane. Mais l’inverse est vrai : un homme musulman a le droit de se marier avec une femme non-musulmane.
Problème : le fameux code ne dit rien de tel et n’énonce pas d’empêchements en la matière. Et l’affaire pose plusieurs questions. D’abord le fait que l’article 6 de la Constitution tunisienne reconnaît «la liberté de croyance, de conscience et le libre exercice des cultes». Dans ce contexte, Zeineb est décrétée d’emblée musulmane sans qu’on lui ait demandé son avis…
Autre élément, et non des moindres : les juges estiment que l’épouse de Jean-Pierre Marcie-Rivière (un industriel) est tunisienne. Or celle-ci est (plutôt était puisqu’elle est décédée) exclusivement française puisque ses parents «ont été naturalisés français avec leur fille après l’indépendance» en 1956, observe Le Canard Enchaîné. D’autant qu’elle avait refusé la nationalité tunisienne à sa majorité.
«Les avocats de Marcie-Rivière s’inquiètent des conséquences pour les couples mixtes en cas de confirmation par la Cour de cassation de la dernière décision de justice. Et particulièrement pour les juifs français nés en Tunisie ou d’un père né en Tunisie», explique Le Point. Alerté, l’Elysée se serait montré «démuni». Contactés par nos soins, les services de la présidence nous ont renvoyé vers le ministère des Affaires étrangères «parce que ce sont eux qui traitent le dossier». Tout comme nos confrères du Point que le Quai d'Orsay avait renvoyé vers le ministère de la Justice...
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