L'élection présidentielle en Tunisie

Partisans du candidat Beji Caid Essebsi, à Tunis le 21 décembre 2014 (AFP - Anadolu Agency - Yassine Gaidi)

Beji Caïd Essebsi a donc officiellement été élu président de la Tunisie lors du scrutin du 21 décembre 2014. En dépit d’une campagne tendue, les Tunisiens ont voté démocratiquement. Et c’est sans doute là l’essentiel, à l’heure où les espoirs nés du «Printemps arabe» sont largement retombés, en Egypte, en Syrie, en Libye…

«Le bon déroulement de ces élections ne fera que rehausser le prestige de la Tunisie, l’unique pays du Printemps arabe qui a pu et su se tirer d’affaire», analyse Tunis Hebdo. Et aussi le pays où est né ce fameux «printemps» le 14 janvier 2011. Une époque alors qualifiée de «magique» par un chauffeur de taxi tunisien à Paris…

«Aboutissement d’un processus, sans bains de sang ni potence. Qui l’eût cru ? Dans leurs rêves les plus fous, les ultras de l’optimisme n’auraient pu imaginer un scénario aussi rose. Réussir les différentes phases de la transition démocratique, en éviter tous les écueils pour en atteindre, aujourd’hui, l’ultime étape, sans effusion majeure de sang ni affrontements généralisés, tient tout simplement du miracle», commente de son côté le quotidien La Presse. «L’ultime étape» en l’occurrence de la transition politique, depuis la chute du régime de Ben Ali et qui s’est poursuivie avec l’élection d’une Assemblée nationale constituante le 23 octobre 2011. Pour s’achever avec les législatives du 26 octobre et la présidentielle.

Et le journal de poursuivre : «Pacifiste mais ferme, beaucoup plus attachée à la patrie qu’à la notion de nation, ancrée dans son environnement arabo-musulman mais abhorrant dogmatisme, extrémisme et violence, la majorité des Tunisiens s’est rangée du côté de ceux qui partagent ses valeurs et défendent les fondements de la République, à savoir les forces intérieures de l’ordre, l’armée et plus particulièrement les composantes de la société civile, avec à leur tête l’Ugtt (le grand syndicat, NDLR), l’Utica (patronat, NDLR), la Ligue des droits de l’Homme et l’Ordre des avocats, parrains du Dialogue national qui a fait transiter le pays du provisoire au durable».

De fait, on n'insistera sans doute jamais assez sur le rôle de la puissante société civile dans la mise en place, en 2013, de ce «dialogue national» qui a permis de relancer le processus institutionnel démocratique. Processus alors notamment enrayé par les errements constitutionnels, la situation sociale, les assassinats de deux leaders du camp séculaire et les attaques djihadistes.

Alors, évidemment, il ne s’agit pas de dire qu’aujourd’hui, tout est devenu beau et rose comme par enchantement. Les défis qui attendent le nouveau gouvernement sont gigantesques : situation économique très difficile, chômage très élevé des jeunes et des moins jeunes, disparités de développement entre littoral riche et régions de l’intérieur pauvres, djihadisme, institutions fragiles, instabilité aux frontières (notamment en Libye)…

C’est donc un dur «labeur» (pour reprendre une expression de La Presse) qui attend le président. élu, quel qu’il soit. «Maintenant au boulot», résume de son côté de manière lapidaire le journal arabophone Assabah Hebdo. «Tout ce que nous souhaitons, quelque soit le résultat, c’est que (l’élu) soit à la hauteur», écrit le journal. Une lapalissade, pourraient dire certains. Mais c’est effectivement ce que l’on peut souhaiter de mieux à la Tunisie.

Publié par Laurent Ribabeau Dumas / Catégories : Non classé