C'est le nouveau projet, ingénieux, de Jean-Louis Etienne. L'idée est simple, mais rares sont ceux qui y avaient pensé : construire une sorte de gigantesque mât flottant, haut de 120 mètres, surmonté d'un laboratoire et d'un équipage de 7 personnes, et laisser dériver l'ensemble dans les puissants courants qui font le tour du continent antarctique.
Quarantièmes rugissants, cinquantièmes hurlants
Polar Pod, c'est le nom de ce drôle de navire, existe sur les plans. Il faut maintenant boucler le budget de huit millions d'euros pour lancer le chantier, si possible en France. Plusieurs instituts scientifiques, français et américains sont intéressés. Car l'océan austral, qui fait le tour de l'Antarctique est mal connu. Sa rudesse, les tempêtes qui le balaient en permanence, la mer déchaînée, les icebergs et les vagues scélérates en font l'une des zones maritimes les plus dangereuses du monde. Ce n'est pas pour rien que les marins appellent ces latitudes les "quarantièmes rugissants" et les "cinquantièmes hurlants"... Je l'ai vérifié moi-même en janvier-février 2011, lors d'une traversée de 5 jours à bord de L'Astrolabe, pour rejoindre la base de Dumont d'Urville (DDU pour les amateurs d'acronymes). Mon estomac avait été mis à rude épreuve...
Pour en savoir plus, et avoir une idée précise du Polar Pod, voici le sujet que j'ai réalisé dans le journal de 20h de France 2 du 8 janvier 2013.
Les grands navires d'exploration océanographique ne peuvent rester plus de quelques semaines dans l'océan austral, car leur mise en œuvre coûte cher (près de 40000 euros par jour pour certains, à cause notamment de la consommation de fioul). La biodiversité, la chimie de l'océan, le rôle du plancton, l'intense brassage des courants océaniques mondiaux qui s'y produit, les échanges entre l'océan et l'atmosphère, le cycle du carbone... Autant de domaines encore largement inexplorés sous ces latitudes. Alors que l'océan austral joue un rôle primordial dans la machine climatique.
Dans le scénario idéal, Polar Pod sera construit en France, acheminé en pièces détachées en Afrique du Sud, assemblé à l'horizontale pour prendre la mer. Pour entrer dans le courant circumpolaire, Polar Pod prendra sa position verticale. Son dessin répond à plusieurs exigences, dont une exceptionnelle stabilité, même en très forte houle. Et ce, grâce au mât en grande partie immergé, conçu pour éviter également de rentrer en résonance avec les ondes des vagues.
Départ en 2014
Tout en se laissant dériver, l'équipage pourra se livrer à des mesures permanentes. Des voiles et un petit propulseur devrait permettre d'infléchir la trajectoire, par exemple pour éviter des icebergs. L'énergie proviendra des trois éoliennes perchées au sommet et d'une hydrolienne fixée sur le mât.
La mission devrait durer plus d'un an et démarrer fin 2014. Une aventure scientifique qui s'annonce exceptionnelle.
Voici le lien vers le site de Jean-Louis Etienne .