Xaver ? c'est le nom de la dépression qui est passée sur la France durant la journée de mardi. Et c'est donc elle qui a mis en émoi - et en déroute - nos amis normands, mais aussi les Pas-de-Calaisiens. Les rédactions parisiennes étaient "tout feu tout flamme" pour couvrir cette actualité météorologique diablement rocambolesque. Ce mercredi matin, en passant devant les kiosques, on apercevait les "unes" des journaux consacrées, en partie, à... la neige. Certains canards constatent que ce fut une grand "pagaille", la "galère" pour tous, un beau "chaos" ou carrément... l'"enfer" ! L'"Enfer blanc" pour le "Courrier Picard". Saprelotte ! Et ça grelotte...
Puisque lancer une vigilance orange (ou rouge!) ne suffit pas à alerter l'automobiliste, pourquoi ne pas faire preuve d'un peu d'humour ? Ainsi, à l'entrée de chaque portion d'autoroute, les panneaux de signalisation pourraient, l'hiver prochain, afficher ce message: "Toi qui entre ici, abandonne toute espérance"...
À chaque épisode neigeux, et quelque soit son importance, c'est une divine comédie ! L'"enfer" c'est les autres, n'est-ce pas ?
"Le Parisien" adopte un ton grave et ose cette question bouleversante: "Pouvait-on éviter ça ?". Qu'il neige ? C'eût été difficile. Mais, les plus perspicaces d'entre vous auront peut-être noté l'utilisation du "ça", dans le titre. En effet, en psychanalyse, le "ça" représente l'inconscient. Il constitue, à en croire les travaux de Mr Freud, l'une des trois instances de notre personnalité. C'est donc la partie inconsciente, irréfléchie, de l'individu, celle qui le pousse à agir par pulsion, par simple envie, et pour assouvir tous les plaisirs. Le titre en "une" du "Parisien" est pour le moins ambigu. Le "ça" désigne-t-il la "pagaille" sur les routes, comme fustigée par d'autres journaux, ou dépeint-il plutôt l'automobiliste inconscient (tiens, tiens...) qui préfèrera toujours tenter le diable ? Mais ou va-t-on chercher tout cela ?! Le "ça" désigne bien évidemment les "pouvoirs publics" qui "semblent avoir été dépassés par la situation". Mon hypothèse du "ça" psychologique ne tient donc pas la route ...
Face à la (Blanche)-neige, les français souvent grincheux.
Valérie Pécresse a demandé une commission d'enquête après que la tempête a provoqué de fortes perturbations dans les transports d'Ile-de-France. Les critiques, tout comme les blocages de la circulation après chaque bordée neigeuse, ne sont guère récentes et elles remontent aussi loin que l'homme a de l'esprit et une certaine dose...comment dire... d'"indignation" ?
En 1871, alors qu'il tombe beaucoup de neige cet hiver là, un conseiller municipal exige la révocation immédiate (pas moins!) du directeur des travaux publics.
Au début du mois de mars 1909, la tourmente neigeuse ensevelit certaines régions françaises comme le nord. À Paris, il tomba 15 à 20 cm de neige. Et la presse se fit dare-dare l'écho de la paralysie des moyens de transports:
"Les omnibus restaient en panne; les chevaux de fiacre ne pouvaient plus avancer; sur diverses lignes, notamment en banlieue, les tramways ne fonctionnaient plus; un peu partout, les trains étaient en retard; un vent glacial vous coupait la figure, et dans quel état se trouvèrent bientôt nos boulevards et nos rues!"
Et, à chaque bourrasque neigeuse, il fallait balayer. Gare aux critiques ! Lorsque le directeur de la voirie parisienne s'attaquait à la poudreuse, ce n'était pas avec le dos de la pelle. On le constate, par exemple, à la lecture du récit de ce journaliste, où l'action de déneigement est presque comparée à celle d'un combat de guerriers entre d'un côté la neige et, de l'autre, les balayeurs. Que le meilleur gagne !
"Car M. de Pontich veillait. Oui, messieurs, il était prêt ! Il avait une revanche (sic) à prendre et, cette fois, il se montra à la hauteur des circonstances. Son téléphone mobilisa rapidement une armée de cantonniers renforcée de légions (sic) de pauvres gens sans travail, tout heureux de cette aubaine. Et, lancée à pleines pelletées, le sel de l'administration ne tarda pas à faire de chaque chaussée, un abominable cloaque. La boue fut poussée vers les bouches d'égout et, un peu après-midi, le soleil (...) participa à la fonte des neiges".
En décembre 1879, des chutes de neiges exceptionnelles paralysent pendant plusieurs semaines le nord de la France, dont Paris. Et bien que les chemins de fers soient fréquemment bloqués, son directeur, lassé des critiques contre les services de la voirie, se borne à répéter à qui veut l'entendre: "Je ne vois pas qu'on puisse faire autre chose que ce que je fais". Notre reporter, prenant la défense de l'administrateur, pose cependant une question toujours très actuelle:
"Les récriminations d'aujourd'hui sont-elles plus justifiées que celles d'autrefois ? Le parisien ne manque pas une occasion de dépenser son esprit. Et cet esprit n'est jamais méchant".
1870, 1909, 2013... le sel, la pelle, et aujourd'hui les commissions. La neige, c'est tabou. On en viendra tous à bout !!
Images insolites
Pour terminer, j'ai choisi deux images, cocasses, et qui résument assez bien la situation dantesque et invraisemblable qu'ont connu les habitants de la Manche et du nord de la France.
Ci-dessous, le parking, ou ce qu'il en reste, de l'aéroport de Cherbourg...
Une porte peut en cacher une autre ? Ci-dessous à Ourton, près de Béthune, mardi matin...
À suivre...