François Hollande n’ira peut-être pas aussi loin que prévu sur les droits des homosexuels. Autoriser les couples homosexuels à se marier et à adopter mais leur refuser l’accès à la procréation médicalement assistée (PMA). Dans une interview accordée à La Croix publiée lundi 10 septembre, Christiane Taubira, la ministre de la Justice précise que "l'accès à la PMA ne rentre pas dans le périmètre" de la loi. Circulez il n’y a rien à voir ?
Une promesse de campagne de François Hollande
Pendant la campagne présidentielle, François Hollande s’est montré favorable à l’ouverture de la PMA aux couples de même sexe. C’est George Pau-Langevin, chargée des questions sociétales dans l’équipe du candidat socialiste, qui l’a assuré lors d’un débat organisé le 11 février 2012 par l'Association des parents et futurs parents gays et lesbiens. Une fois élu à l’Elysée, François Hollande "proposera un élargissement des conditions permettant d'accéder à la PMA", expliquait George Pau-Langevin à l’époque. "Que les gens soient mariés, pas mariés, hétéros ou homos, pour nous ce n'est pas ça qui compte, mais on souhaite qu'il y ait un projet parental organisé, quelque chose de stable".
Actuellement en France, l’insémination artificielle et la fécondation in vitro sont réservées aux couples hétérosexuels qui ne peuvent pas avoir d’enfant. Pour accéder à cette assistance médicale à la procréation, il faut être marié ou pouvoir justifier deux ans de vie commune.
Une façon de ménager la chèvre et le chou
Si l’ouverture de l’accès à la PMA aux couples homosexuels était un engagement de campagne, pourquoi y renoncer une fois élu ? Il pourrait s’agir pour le gouvernement socialiste de ménager les susceptibilités. Pour satisfaire les homosexuels (et respecter tout de même ses engagements), le gouvernement Ayrault annonce l’ouverture du mariage et de l’adoption. De nouveaux droits pour les couples homosexuels, des mesures emblématiques et symboliques. Il s’agirait en effet des premières avancées significatives pour les couples homosexuels depuis 13 ans et le vote du Pacs sous le gouvernement Jopsin. Si Nicolas Gougain, porte-parole de l’Inter-LGBT (lesbiennes, gays, bi et trans) m’explique ce mardi que le "non" de Taubira à la PMA est un "recul significatif" et redoute un "projet de loi a minima", ce recul pourrait en revanche satisfaire les opposants du futur projet de loi. En clair, le gouvernement choisirait un compromis entre le respect des promesses de campagne, les attentes des couples homosexuels et la volonté de ne pas heurter certaines sensibilités en touchant aux lois de bioéthiques, sujet épineux notamment chez les catholiques.
Pas encore un renoncenement
Malgré tout, la PMA n’est pas (encore) passée à la trappe. Dans son interview, Christiane Taubira ne ferme pas la porte à des avancées dans ce domaine, contrairement à la gestation pour autrui (mère porteuse). La ministre se contente de dire que la PMA ne relève pas de champs de compétence, elle renvoie la balle au ministère de la Santé.
Mais les conversations avec les associations de défense des droits des homosexuels et des familles homoparentales ne font que commencer. Les contours du projet de loi pourront donc évoluer. On peut aussi penser que la PMA ressurgira lors du débat parlementaire : le texte pourra très bien être amendé par les élus. La sénatrice Esther Benbassa Europe Ecologie-Les Verts a d’ores et déjà déposé une proposition de loi qui ouvre le droit à la PMA.
Autre possibilité pour le gouvernement : faire rentrer la PMA dans une révision globale des lois de bioéthiques qui comporteraient aussi un volet euthanasie... Les portes restent donc ouvertes.