Que faut-il lire pour comprendre l'actualité internationale ? Laissez tomber les experts en costume-cravate et ouvrez un SAS : c'est le très sérieux message délivré le 30 janvier par Le New York Times.
Des livres prophétiques ?
Sous le titre The Spy Novelist who knows too much (le romancier d'espionnage qui en sait trop), le journaliste Robert F.Worth, spécialiste du Moyen-Orient, consacre un long article à Gérard de Villiers, 83 ans, auteur de la série à succès des SAS (100 millions d'exemplaires vendus, selon le journal).
Ce qu'il en ressort ? Que l'écrivain aurait le don de voyance. Dès juin 2012, un de ses livres, Le chemin de Damas, décrivait l'attaque d'un des sièges du pouvoir syrien, un mois avant qu'elle ne se produise.
Même talent dans Les Fous de Benghazi, évoquant un centre secret de commandement de la CIA dans la ville libyenne, six mois avant la mort de Christopher Stevens. L'ambassadeur américain est décédé le 11 septembre 2012, lors d'une attaque du consulat américain de Benghazi. Même prescience dans un roman datant de 1980 et mettant en scène l'assassinat du président égyptien Anouar Al Sadate (abattu en 1981) par des islamistes.
Enfin, La liste Hariri avait, paraît-il, estomaqué les connaisseurs avec son luxe de détails sur le complot ourdi pour tuer l'ancien premier ministre libanais Rafic Hariri, victime d'un attentat à Beyrouth en 2005. Des précisions qui seraient issues d'un rapport confidentiel des services de renseignement libanais.
Parmi ses lecteurs : Hubert Védrine
Si les librairies chic parisiennes ne vendent pas ses oeuvres, certains de ses lecteurs, révèle le quotidien new-yorkais, ont fréquenté les allées du pouvoir. L'ancien ministre des Affaires étrangères de Lionel Jospin, Hubert Védrine, confie ainsi au journaliste : "l'élite française fait croire qu'elle ne le lit pas, mais ils le lisent tous".
Et Gérard de Villiers de raconter comment il fut convié au Quai d'Orsay à un dîner en tête-à-tête par le même Védrine, parce que le ministre s'était rendu compte "qu'ils avaient les mêmes sources".
"Même les gens qui ne parlent pas lui parlent"
Car le créateur de de Malko (son héros récurrent) serait à tu et à toi avec des diplomates et des espions de tous pays. Son nom serait un sésame à la DGSE (les services de renseignement français) et "même les gens qui ne parlent pas lui parlent", affirme une journaliste russe. Pourquoi ? Pour que l'information sorte au sein des différents services. Et les derniers SAS, selon Le New York Times, seraient les mieux renseignés.
Malgré nos préventions contre cette littérature sexiste, guerrière et complotiste, nous faudra-t-il lire Panique à Bamako, qui date de septembre 2012 ? Qui sait, l'épilogue de la guerre au Mali y est peut-être livré ?
A lire sur Le New York Times : The Spy Novelist who knows too much