Lassé du feuilleton Copé-Fillon ? Fatigué d'une crise qui n'en finit pas ? Epuisé par la sinistrose ambiante ? Réfugiez-vous dans le festival Twitterfiction, qui a commencé mercredi 28 novembre et se termine dimanche 2 décembre.
Des écrivains - américains, australiens, britanniques, mais aussi francophones- inventent une fiction morcelée en 140 signes. En France, le festival a fait surgir de l'ombre @MarcelLasoen, "né il y a très longtemps à Wattrelos, dans le nord de la France" .
Depuis des années, je vis planqué. Caché. Enterré. Oublié. #twitterfiction
— Marcel Lasoen (@MarcelLasoen) Novembre 28, 2012
Mais il est temps de mettre fin à cette vie dans l’ombre.J’ai décidé de révéler mon secret, ici sur Twitter. #twitterfiction
— Marcel Lasoen (@MarcelLasoen) Novembre 28, 2012
Qui tient la plume de ce personnage venu livrer ses mystères sur Twitter ? De ce héros qui traîne après lui les fantômes de la résistance et leur funèbre cortège de trahisons ? Le directeur de l'Ecole supérieure de journalisme de Lille, Marc Capelle, 54 ans.
"Rentrer dans l'exigeant format du tweet"
"J'ai découvert, nous a-t-il, dit, l'existence de ce festival il y a trois semaines en allant sur le blog officiel de Twitter. C'était amusant et très peu contraignant. Il fallait envoyer un projet de narration qui serait soumis au jury. Sur six cents candidatures au niveau mondial, une trentaine de projets ont été retenus, dont trois français" (le sien, celui du romancier Fabrice Colin et "les sonnets collaboratifs" du collectif Twitrature).
Les motivations ? "Ma démarche, poursuit Marc Cappelle, "était de rentrer dans le format tweet qui est contraignant (140 signes maximum), de jouer avec l'univers Twitter, de penser à un outil nouveau. Parler de littérature me semble un terme exagéré, a moi qui vient, à 54 ans, de l'univers de la plume Sergent-Major et de la machine à écrire, mais c'est un bon laboratoire. Même si j'ai déployé peu de moyens : avec ce type de fiction, il faut penser images, liens, vidéo."
"Jouer avec ce média-là"
Déjà auteur d'une trentaine de romans publiés notamment chez Gallimard, et d'une série intitulée #microfictions sur Twitter, l'écrivain Fabrice Colin, lui, a vu dans ce festival un défi, et un champ insuffisamment exploré par les écrivains français.
"Les trois quarts des participants sont anglo-saxons. Il y a un truc très conservateur en France. Quoiqu'on en dise, Twitter c'est de l'écriture : il y a des façons de jouer avec ce média-là. Je pense que Twitter n'est pas pris en charge par les écrivains malgré une visibilité délirante"
Dans son scénario (intitulé #par ailleurs), un bus fait demi-tour, face à une ville interdite d'accès. Interloqués, passagers et chauffeurs de bus réagissent sur Twitter :
#Sal Et puis j’ai vu la première personne se transformer en verre. La première. Je ne sais pas comment expliquer ce qui s’est passé.
— Fabrice COLIN (@fabricecolin) Novembre 29, 2012
Petit plus : les cinq personnages fictifs qui tweetent -le chauffeur de bus et les quatre passagers - répondent aux internautes/lecteurs, qui les interpellent. De l'écriture interactive et collaborative.
Un canevas et de l'impro
Comme Marc Cappelle, Fabrice Colin a préparé le canevas de son histoire. Il publiera de 60 à 80 tweets par jour jusqu'à dimanche, et va improviser parce qu'il aime sur twitter "le côté spontané, gratuit, ouvert à la discussion. Sans filet."
Honneur à ces expérimentateurs, même si la catégorie #twitterFiction ne figurait pas, jeudi, dans les grandes tendances sur Twitter. Quant au message le plus retweeté (rediffusé) sur le sujet, il est carrément railleur :
Le sucre fond dans mon yaourt. Mais que va t'il se passer ?? Suspense. Reponse au prochaine épisode ... #twitterFiction twitter.com/PedroSoares94/…
— Pedro Soares (@PedroSoares94) Novembre 29, 2012