Un Bon petit soldat , Mazarine Pingeot ? La fille longtemps cachée de François Mitterrand conte à nouveau, dans un livre enlevé et souvent drôle, une enfance pas comme les autres. Le père qu'il fallait taire et la vie quai Branly, où le président, le soir, venait rejoindre son second foyer, celui qu'il formait avec Anne et Mazarine Pingeot.
Autant de souvenirs revisités à l'occasion de la campagne Hollande, conclue par la première victoire d'un candidat socialiste à la présidentielle depuis 1988.
Plus d'une fois, l'agrégée de philo -digne héritière d'un maître de la formule assassine - trempe sa plume dans l'acide. La preuve par ces échantillons :
Bertrand Delanoë et l'esprit petit-bourgeois
"C'était ce couple (celui formé par François Mitterrand et Anne Pingeot) qui était réel, sans être apparent. C'était bien elle qu'il retrouvait chaque soir, dans le secret de son appartement.
Alors quand vous entendez Bertrand Delanoë vous annoncer le projet de baptiser le square de la rue de Bièvre : "square Danielle et François Mitterrand", vous éprouvez une pointe d'amertume : le mensonge va donc se perpétuer, et l'esprit petit-bourgeois l'emporter sur la vérité de ces couples. Vous avez honte. Les convenances, toujours, finissent par gagner."
Pas tout à fait puisque ce petit square ne portera, finalement, que le nom de Danielle Mitterrand, selon une décision votée lundi 12 novembre par le Conseil de Paris.
Michel Onfray et Luc Ferry, "des philosophes" ?
"Vous prodiguez des cours de philosophie à des étudiants qui se raréfient - la philosophie, ça ne sert à rien et aucun philosophe ne porte de Rolex, à part peut-être Michel Onfray et Luc Ferry qui pourraient se l'offrir, mais qui a dit que c'étaient des philosophes (à part eux-mêmes) ?"
"L'hystérie" de Nicolas Sarkozy
"Vous avez peur de beaucoup de choses, mais pas d'un homme comme lui (Nicolas Sarkozy): on le dit autoritaire, ou autoritariste, qui humilie ses conseillers, ses proches, ses secrétaires. Vos anciens gardes parfois vous racontent. Ceux qui ont continué leur métier.
L'hystérie, les colères, on n'attend personne dans les convois à l'étranger puis on hurle sur ceux qui sont en retard, on ne visite pas le pays, vexant les hôtes, on change de planning sur un coup de tête, on engueule en public. Se tenir était sans doute le lot d"une génération précédente, de ceux qui ont connu la guerre, se taire, s'enfuir, dormir dans des forêts glacées, partager la soupe, prendre des décisions de vie ou de mort."
"Marine Le Pen n'existe pas"
"Marine Le Pen vous fait un peu pitié, et de la peine, pourquoi pas. Elle n'en demeure pas moins une femme dangereuse et détestable. Mais vous ne pouvez vous empêcher de l'imaginer petite fille, dans l'obligation de défendre un père détesté, puis de devenir lui-même pour mieux encore le protéger, et de sacrifier son identité propre, pour venger une famille. Marine Le Pen n'existe pas. Marine Le Pen est la fille qui veut plaire à son père. Elle est le désir de son père. Elle est un grand vide comblé par l'image que son père lui renvoie...
Les familles politiques sont des prisons. D'autant plus lorsqu'elles sont extrêmes. Les filles des hommes politiques qui font de la politique sont des religieuses mariées à leur dieu, dieu le père, tout-puissant. Le père qui s'en est fait des soldats au lieu d'en faire des enfants.
Seriez-vous en train de parler de vous ? Oseriez-vous faire un rapprochement entre la blonde haineuse et vous-mêmes (brune et très compromise avec les Arabes) ? Horreur et damnation, c'est bien ce que vous êtes en train de faire."
Bon petit soldat de Mazarine Pingeot, Julliard (19 euros)