A la veille de la Fête de l'Humanité les 15 et 16 septembre à la Courneuve, "première grande mobilisation populaire" contre le traité budgétaire européen, Jean-Luc Mélenchon publie "L'Europe austéritaire". Compte-rendu de cet argumentaire militant prêt à servir contre le traité "Merkozy".
La forme : didactique
Couverture blanche et titre bleu (mais où est passé le rouge du Front de gauche ?), format et prix poche (5 euros), L'Europe austéritaire est un manifeste de cent pages à vocation militante et pédagogique contre un double traité :
- le Traité européen sur la "Stabilité, la Coordination et la Gouvernance" (TSCG), qui doit être discuté à partir du 2 octobre à l'Assemblée nationale
- le "Mécanisme européen de stabilité", déjà adopté.
Publié aux éditions Bruno Leprince, co-signé par l'ex-candidat du Front de gauche à la présidentielle et par Céline Meneses l(déléguée nationale Europe du Parti de gauche), l'ouvrage attaque dès le titre une Europe qualifiée d'"austéritaire".
Néologisme et mot-valise que les auteurs expliquent ainsi : "autoritaire dans sa méthode, la construction européenne a progressivement imposé l'austérité comme contenu unique de la politique économique appliquée sur le continent." "De cette double caractérisation est né un mot, "austéritaire", contraction des termes austérité et autoritaire."
Le fond : militant
"Règle d'or" d'équilibre budgétaire, "déficit structurel", "sanctions automatiques" : l'ouvrage analyse et commente notions techniques et principaux articles des deux traités, s'attardant évidemment moins sur les dangers d'une dette excessive que sur ceux de l'austérité.
Si l'écriture se veut pédagogique, elle laisse parfois percer la gouaille de Jean-Luc Mélenchon ("voyez comme c'est sournois") ou son art de la synthèse historique : "la première règle d'or budgétaire ne date pas d'hier. Elle a été mise en place par la dictature de Salazar. Le résultat est connu : elle a fait du Portugal le pays le plus pauvre d'Europe."
Même talent pédagogique pour résumer le "déficit structurel" , dont il n'existe pas de "définition harmonisée" : "ce terme sert généralement d'excuse pour tailler prioritairement dans les dépenses liées au service public".
Si cet ouvrage de combat ne prétend ni à l'objectivité, ni à l'exhaustivité, il a le mérite de rappeler que "les plans d'austérité sont souvent des remèdes qui aggravent le mal", comme en Grèce où, de 2010 à 2012, le chômage a doublé pendant que la dette s'aggravait.
Mêmes en termes contestables, il lance le débat autour de deux textes touffus, qui n'ont pas encore eu le même retentissement passionné que le Traité constitutionnel européen, pendant la campagne référendaire de 2005.
L'objectif : un référendum
Faut-il le rappeler ? Quand le premier secrétaire général François Hollande faisait campagne en 2005 pour le "oui" au traité constitutionnel européen, son camarade Jean-Luc Mélenchon rejoignait le camp du "non". Les militants socialistes donnèrent raison au premier, les électeurs français au second. Trois ans plus tard, Jean-Luc Mélenchon quittait le parti socialiste pour fonder le Parti de gauche.
Entre ces deux-là, la guerre n'est pas finie : Jean-Luc Mélenchon souligne que François Hollande n'a "nullement renégocié le Traité européen, dont pas un mot n'a bougé depuis son élection".
Le député européen réclame donc un référendum, non prévu pour l'instant. Avec L'Europe austéritaire, il fournit aux militants anti-traité un argumentaire clé en main, première pierre à l'édifice avant la manifestation du 30 septembre.
Jean-Luc Mélenchon espère probablement aussi, à travers cette campagne, regagner un peu de sa surface médiatique de la campagne présidentielle. En caressant le rêve de devenir le meilleur opposant de son ancien camarade de la rue de Solférino ?
L'Europe austéritaire. Critique argumentée du traité "Merkozy" Jean-Luc Mélenchon, Céline Meneses (café république , éditions Bruno Leprince)