M. Valls, de farine strasbourgeoise en gifle bretonne

La campagne "Blitzkrieg" qu'il mène dans le cadre des primaires de la gauche réserve à M. Manuel Valls son lot de surprises puisque après avoir récemment été la cible d’un jet de farine, il a aujourd’hui été victime d’un homme qui lui a donné (ou tenté de lui donner, les images ne sont pas très précises) une gifle.

© AFP

Ces gestes inadmissibles, sans grandes conséquences sur M. Valls, qui s'en est heureusement tiré indemne et a d'ores et déjà exprimé qu'ils ne suscitaient en lui nulle peur de continuer d'aller au contact des Français, ont en revanche eu des répercussions non négligeables immédiates sur la liberté d'aller et venir de leurs auteurs qui ont tous deux été placés en garde à vue. Intéressons-nous donc aux conséquences juridiques et à la qualification pénale qui peut être retenue pour chacun d’entre eux.

D’abord l’enfarineur : rappelons qu’il s’agissait d’un opposant à l’usage de l'article 49-3 qui a souhaiter manifester sa désapprobation de la mise en oeuvre par M. Valls de cette disposition constitutionnelle en lui jetant de la farine, le 22 décembre dernier, durant un déplacement de l'ancien premier ministre à Strasbourg. Juridiquement, ce geste peut être qualifié de violences avec arme sans incapacité de travail, l’arme par destination étant en l'occurrence... la farine, hé oui. Peut-on retenir à l'encontre de l'auteur des faits la  circonstance aggravante, liée au statut de sa cible, de personne dépositaire de l’autorité publique ? Je ne le pense pas dans la mesure où M. Valls n’était plus à cette date premier ministre et n’avait pas encore retrouvé son siège de député, sauf erreur ou omission de ma part.

Dans ces conditions, la peine encourue est de trois ans d’emprisonnement et de 75000 € d’amende.

Notons que l’enfarineur pourrait également être poursuivi pour dégradations dans l’hypothèse où les habits du premier ministre auraient été abîmés de son fait.

Passons au cas du jeune homme qui a manifestement voulu administrer une gifle à M. Valls à la sortie de la mairie de Lamballe. Il est évidemment indispensable de déterminer si le coup a été effectivement porté ou non car à défaut de contact avec la personne de M. Valls, nous nous trouverions en présence d’une simple tentative de violences qui n’est pas réprimée en droit français.

Si la gifle a en revanche réellement atteint sa cible, en l'occurrence le visage de M. Valls (à vue de nez et de vidéo, il semble que ce soit le cas), cet acte peut être qualifié de violences n'ayant entraîné aucune incapacité de travail sur personne dépositaire de l’autorité publique, l'intéressé étant redevenu député depuis le 7 janvier 2017, sanctionnées des peines que j'ai indiquées plus haut. Le jeune Breton pourrait toutefois demander au Tribunal correctionnel dont il relèverait d'écarter cette circonstance aggravante si, tout comme moi avant d’écrire ce billet, il ignorait que l’ancien premier ministre avait retrouvé un mandat électif. Il s’agirait alors de violences contraventionnelles punies d’une amende maximale de 750 €, à moins la circonstance aggravante de préméditation ne soit établie à son encontre s'il devait être retenu qu'il soit sciemment allé attendre le candidat à la sortie de la mairie. Le Ministère public soutiendrait néanmoins presque certainement que la qualité d'élu de M. Valls est  publiquement connue, particulièrement durant une période où ses faits, gestes et personnalité sont mis en lumière de façon quasi-permanente.

Il est en tout état de cause vraisemblable que nonobstant la relative gravité de ces faits et leur caractère à la fois public et médiatisé, la comparution de leurs auteurs devant un tribunal pourrait être écartée au profit d’une mesure alternative aux poursuites, en considération de la personnalité de leurs auteurs plutôt que de celle de leur victime.