Que l'on aime Nathalie Kosciusko-Morizet ou pas, le moins qu'on puisse dire c'est que son dernier clip de campagne, compilant des extraits de ses adversaires l'encensant, est tout à la fois étonnant et désopilant. Même s'il promet d'être compliqué de recueillir les parrainages de 20 parlementaires, 230 élus locaux et 2 500 adhérents des Républicains d'ici au 9 septembre, en termes de communication politique, cela fonctionne bien. Les staffs de campagne de Bruno Le Maire et Alain Juppé sont d'ailleurs d'accord pour le confirmer. Alors pourquoi ?
Parce que l'humour est une arme de persuasion massive en politique
"Rire est le propre de l'homme" écrivait Bergson. L'humour est très précisément ce qui nous lie et fonde l'existence même de notre humanité. Alors oui, il a toute sa place en politique... s'il n'est pas un grossier moyen de dissimuler des dérapages incontrôlés. Bien manié, il permet à un candidat de faire la différence pour capter un électorat toujours plus volatil et perdu au milieu d'une "offre" politique tout à la fois pléthorique et semblable. L'humour s'impose aujourd'hui comme le dernier rempart face à une communication de plus en plus verrouillée et corsetée par une obscure novlangue politique qui ne dit plus rien à personne. A ceci près que ce registre ne fonctionne que pour les impétrants. Exit à la tête de l'Etat. François Hollande en sait quelque chose. Surnommé "Monsieur petite blague" lorsqu'il était premier secrétaire du PS, il a suffisamment été critiqué pour cela. S'il offre la possibilité de s'extraire des attaques et de prendre du recul, de se défaire des conventions et du carcan des institutions, il ne peut être utilisé qu'avec parcimonie et dans de rares occasions.
Parce que faire de ses adversaires des soutiens c'est aussi montrer leurs incohérences
En compilant et en détournant des vieux extraits d'interventions de ses adversaires, sans jamais être présente à l'écran, NKM "trolle" et se place au-dessus de la mêlée avec brio. Pourquoi ? Parce qu'elle change de partition en changeant de registre de communication, tout en révélant les incohérences de ses anciens partenaires, ces soutiens de 2014 lors de la campagne électorale des municipales. Ceux-là même qui autrefois la soutenaient. Dans le montage vidéo, Bruno Le Maire explique ainsi qu'il "souhaite qu'elle soit candidate". Quant à Jean-Francois Copé, il rappelle "qu'elle peut parfaitement l'emporter.". Evidemment les extraits sont datés et c'est précisément ce qui fait rire les internautes.
.@jf_cope @NicolasSarkozy @alainjuppe @BrunoLeMaire @HerveMariton Merci à tous pour votre soutien ?https://t.co/qWkvP8aKp9
— N. Kosciusko-Morizet (@nk_m) 5 juillet 2016
Parce que le clin d'oeil américain permet de contrer les éventuelles critiques
L'un des ressorts comiques de cette vidéo est très certainement la signature de celui-ci : "Je suis Nathalie Kosciusko, et j'approuve ce message." La référence américaine est patente et ne manque pas de panache : en reprenant les codes US, elle permet tout à fois de s'inscrire dans cette lignée tout en s'en détachant non sans autodérision. Et en cela, oui, il s'agit d'un humour bien français.
A l'heure des timelines qui mettent sur le même plan les lol cats et la dernière intervention du chef de l'Etat, il faut désormais partir en quête de ce "consom'électeur" dans les méandres du web et aller à sa rencontre pour le surprendre là où il s'informe et se divertit en adoptant ses codes. Et ça, les politiques l'ont bien compris.
Anne-Claire Ruel
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